"Il y a mon ADN, mais j'y étais pas": deux hommes condamnés pour le braquage de la collection Balmain

Ils étaient six à être convoqués, ce mercredi 28 février, devant la 18e chambre du tribunal correctionnel de Bobigny. Mais seuls trois d'entre eux ont été jugés pour le vol de pièces du défilé de la maison Balmain avant la Fashion Week de septembre 2023. Car à la demande des avocats, le tribunal a disjoint les dossiers. Les trois autres prévenus seront donc jugés le 13 mars prochain.
Ce mercredi, derrière la porte vitrée du box, seuls Nassim H., 24 ans, Djibril S., 26 ans, et Abderrahim M., 25 ans, comparaissaient pour "vol aggravé", "association de malfaiteurs" et "recel". Après plusieurs heures d'audience, dans la soirée, les deux premiers ont été condamnés respectivement à une peine de trois ans de prison dont 18 mois de sursis et à trois ans de prison dont deux ans de sursis. Le troisième, Abderrahim M., a été relaxé.
Un braquage en deux minutes
Le 16 septembre 2023 un peu avant 8h30, un employé de TEC, un sous-traitant de DHL, charge 146 colis dans un camion de livraison situé dans la zone de fret de l'aéroport Charles-de-Gaulle. Dans ces cartons, de nombreux proviennent de maisons de luxe : Dior, Paco Rabanne, Givenchy ou encore Balmain. À 8h33, il quitte la plateforme et prend la direction de Paris, détaille le président à l'audience.
Le chauffeur ne s’en rend pas compte, mais il est suivi de près par une berline grise. Sept minutes plus tard, à 8h40, cette même voiture percute la camionnette, sur un rond-point de la D88, à hauteur de Villepinte. Les enquêteurs découvriront plus tard qu'il s'agit en réalité d'une Renault Talisman volée quelques jours plus tôt, dans la nuit du 12 au 13 septembre à Bobigny (Seine-Saint-Denis).
À ce moment-là, deux hommes cagoulés sortent, lui volent les clefs de l'utilitaire - un troisième homme reste au volant de la berline - et s'échappent avec les deux véhicules. Le braquage n'aura duré que deux minutes, de 8h40 à 8h42.
Plus de 500.000 euros de préjudice
Il ne faudra que quelques heures aux enquêteurs de la police judiciaire de Seine-Saint-Denis pour retrouver le camion, abandonné à Mitry-Mory (Seine-et-Marne). Dedans, il ne reste que 32 cartons, mais plus aucun de ceux attendus par Balmain. Car la maison de haute couture attendait ce jour-là une cinquantaine de pièces destinées au défilé de la collection printemps/été 2024 lors de la Fashion Week, le 27 septembre.
"Mon équipe et moi-même avons travaillé très dur. Nous allons travailler encore plus, jour et nuit, tout comme nos fournisseurs, mais c'est tellement irrespectueux", avait écrit sur Instagram le directeur artistique Olivier Rousteing.
"La société Balmain dénonce une perte de 45 pièces pour un préjudice estimé à 500.000 euros", a rappelé le président à l'audience. Deux autres colis Givenchy ont eux aussi été volés. "Huit pièces ont disparu, pour une valeur évaluée à 14.500 euros", a-t-il ajouté.
Après quatre mois d'enquête de la police judiciaire de Seine-Saint-Denis, six prévenus avaient été interpellés. Les investigations se sont concentrées sur la téléphonie et les bornages de la trentaine de numéros de téléphones rattachés aux suspects, le tout appuyé par des images de vidéosurveillance et des traces ADN. Les enquêteurs estiment qu'un repérage a eu lieu deux semaines avant le vol.
"Il y a mon ADN, mais j'y étais pas"
Mais tout au long des trois heures d'audience, les trois prévenus ont fermement nié avoir été impliqués dans le braquage. "Je n'ai rien à voir avec cette histoire", a soutenu Nassim H. dans le box, pull gris et barbichette. Pourtant, son ADN a été retrouvé sur l'appuie-tête et le volant de la Renault Talisman.
"C’est de l’ADN transportable. Si je perds ma veste et qu'elle se retrouve dans un véhicule, il y a mon ADN, mais j'y étais pas", a martelé l'intéressé.
Abderrahim M., qui comparaissait libre, est soupçonné d'avoir participé à un repérage deux semaines avant les faits. Interrogé par le président, il a expliqué qu'il avait été voir un ami - l'un des trois hommes qui sera jugé le 13 mars. "Je suis arrivé chez lui et on a pris la voiture et voilà. Il me demande de l'accompagner, je l'accompagne, c'est tout", a-t-il justifié, expliquant qu'il n'était pas au courant du projet et qu'il ne savait pas qu'il participait à un repérage.
Dans le box, Djibril S., lui, est un peu plus loquace. Interrogé sur les neuf pièces Balmain retrouvées chez lui lors des perquisitions, il a avoué avoir volé la berline en échange de vêtements de luxe.
"La Renault qui a servi au braquage, je l'ai volée à Bobigny quelques jours plus tôt en échange d'habits qu'on m'a donnés après les faits. On m'a parlé de vêtements de luxe sans me préciser la marque donc j'ai accepté. J'ai donné le véhicule contre un sac d'habits quoi", a-t-il reconnu. Et le reste des vêtements? "Je les ai revendus", a-t-il concédé, sans pouvoir donner de noms.
Malgré les précisions de Djibril S., les rôles de chacun n'ont pas pu être déterminés avec certitude à la fin de l'audience. Il faudra attendre le 13 mars prochain pour savoir si le reste du groupe, lui, est plus loquace.