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"Hors-sol", "incompréhensible": les syndicats du musée du Louvre perplexes après les annonces d'Emmanuel Macron

Musée du Louvre

Musée du Louvre - Dimitar DILKOFF

Les syndicats ont réagi ce mercredi 29 janvier aux chantiers annoncés par Emmanuel Macron pour le musée du Louvre. Ils s'interrogent notamment sur le financement des différentes annonces.

Emmanuel Macron a énuméré, ce mardi 28 janvier, une liste de chantiers de grande ampleur pour la "Nouvelle Renaissance" du musée du Louvre. Des annonces qui ne font pas l'unanimité chez les syndicats. Élise Muller, surveillante de salle et secrétaire nationale SUD Culture, indique être "ni satisfaite, ni convaincue".

"On est quand même atterré de l’ampleur du décalage entre la fantasmagorie et la mise en scène présidentielle et de la direction du musée du Louvre, et le réel du monde dans lequel on vit actuellement", déplore-t-elle, auprès de BFMTV.com.

La syndicaliste évoque même "des annonces complètement hors-sol".

La nouvelle entrée, "pas une nécessité absolue"

Alors que la mythique Joconde va changer de salle, Emmanuel Macron a aussi annoncé la "création d'une nouvelle grande entrée", au niveau de sa façade orientale près de la Colonnade de Perrault. Un nouvel accès, imaginé pour notamment désengorger la pyramide de verre.

Pour Gary Guillaud, secrétaire de la section CGT Louvre, cet accès n'était pas "une nécessité absolue", sauf s'il doit être une "ouverture sur une zone spécifique" pour admirer Monna Lisa. "C'était une demande des agents qui subissent des conditions de travail déplorables dues au fait des installations de La Joconde dans le musée. La Joconde est un musée indépendant à elle seule", rappelle-t-il.

Il espère que cette nouvelle entrée aura pour but de gérer les nouveaux flux de visiteurs. En effet, Le Louvre rénové visera quelque "douze millions de visiteurs par an" une fois l'ensemble de ses extensions terminées, espère Emmanuel Macron.

De son côté, Élise Muller, surveillante de salle et secrétaire nationale SUD Culture, évoque d'autres "urgences" à gérer pour le musée du Louvre.

"Il n’a pas beaucoup parlé des toitures, des sanitaires et de l’éclairage qui ne fonctionnent plus. De toutes ces choses qui se sont terriblement dégradées. Ce n’est pas glamour dans une conférence de presse, sauf que ce sont ça, les vrais problèmes au Louvre actuellement", précise la secrétaire nationale SUD Culture.

La question du financement

Autre question qui laisse perplexe les syndicats, la question du financement. Le coût de l'ensemble de ces projets est évalué à environ 700 à 800 millions d'euros sur une dizaine d'années, annonçait ce mardi 28 janvier l'entourage d'Emmanuel Macron à BFMTV. La première moitié sera payée par une levée de fonds et du mécénat d'ici à 2031, la seconde sera financée par tranche et sur une durée plus longue. Dès cette année, l'État va verser 10 millions d'euros.

Emmanuel Macron a aussi demandé à sa ministre de la Culture, Rachida Dati, de "préparer une tarification différenciée plus élevée pour les visiteurs étrangers venus de pays non-membres de l'Union européenne". Un nouveau billet, plus cher, qui devra entrer en vigueur "au 1er janvier 2026". Cela permettra de rapporter plusieurs millions d'euros par an.

Gary Guillaud, comme Élise Muller se disent sceptiques concernant ces chiffres. Le secrétaire de la section CGT Louvre explique que le nouvel accès coûterait 400 voire 500 millions d’euros, sans prendre en compte la nouvelle salle dédiée à La Joconde et les rénovations évaluées au même prix. Il dénonce un financement des travaux "incompréhensible" et revient aussi sur l'augmentation du tarif pour les étrangers hors UE.

"Je ne vois pas comment ça va permettre de financer 1 milliard d’euros en six ans. Je ne vois pas comment le contrôle peut se faire, comment un financement via la billetterie peut se faire, à part s’il y avait déjà un mécène merveilleux qui débarquerait de je ne sais pas où", insiste-t-il.

Gary Guillaud s'interroge aussi sur ce que vont faire les agents du musée du Louvre pendant les travaux: "Comment on va gérer l’accueil du public et la qualité de travail des agents?"

"Un projet à un milliard d'euros est une hérésie"

Élise Muller, elle, se questionne sur les coûts annexes de ces travaux pour les voisins du musée du Louvre.

"Puisque le projet qui est prévu est entre La Seine et la ligne 1 de métro, des travaux d’une telle ampleur ça impacterait aussi la RATP (...) Est-ce ce surcoût a été étudié avec la régie des transports parisiens?", se demande-t-elle.

Elle s'interroge aussi sur le manque à gagner "considérable" pour l'État et pour l'administration fiscale. "Dans la période actuelle, un projet à un milliard d'euros est une hérésie", souffle-t-elle, déplorant, par ailleurs, un projet qui ne concerne qu'un petit nombre de Parisiens et un public international "richement doté".

Solenne Bertrand