Crack à Paris: les riverains pas convaincus par les solutions d'Anne Hidalgo, "ça ne suffit pas"

Pour le moment, la solution ne fait pas l'unanimité. Pour faire face à la prolifération du crack dans le nord de Paris, la maire Anne Hidalgo a proposé ce lundi soir dans un courrier au Premier ministre, de mettre en place quatre nouveaux lieux de prise en charge pour les toxicomanes. Elle s'était entretenue au préalable avec des riverains, des associations et des élus. Ces "quatre solutions" souhaitées par la maire doivent permettre "de sortir ces personnes de la rue et de leur dépendance".
Du côté des riverains, une aide de la ville et de l'Etat est demandée depuis plusieurs mois alors que le crack entraîne notamment des problèmes d'insécurité dans leurs quartiers. Mais certains riverains ne sont pas convaincus par les propositions apportées par Anne Hidalgo.
"On va garder le problème à Paris. Or ce qu'il faudrait c'est des centres de sevrage hors de Paris, hors d'Ile-de-France, des centres très éloignés. (..) Ils le disent eux-mêmes, ils veulent s'éloigner de Paris parce qu'ils ont cristallisé trop de souffrance", explique Tarak Sassi, fondateur du collectif "Paris anti-crack, au micro de BFM Paris.
"On ne peut pas les faire disparaître"
"Ce qu'il y a dans mon quartier, je ne le souhaite à aucune ville", assure Tarak Sassi. Les riverains pointent régulièrement du doigt les actes de délinquance et les incivilités qui se multiplient en raison de la consommation de crack. Tarak Sassi affirme notamment avoir été victime d'agressions et de menaces au couteau à proximité de son domicile. Il déplore aussi le recel de crack et de cocaïne ainsi que la prostitution qui sévissent dans son quartier.
"Il faut aujourd'hui pour nous déménager parce que nos quartiers deviennent invivables", s'alarme Tarak Sassi.
L'adjointe à la mairie de Paris en charge de la Santé publique Anne Souyris, s'oppose elle à l'éloignement des toxicomanes.
"On ne peut pas les faire disparaître et on n'a pas à les faire disparaître. Ce sont des gens qui sont malades et ce sont des gens qu'il faut soigner, donc il faut les soigner là où ils sont", assure-elle.
La lenteur du processus critiquée
Actuellement, huit lieux d'accueil existent dans la capitale. Dans son projet, la mairie de Paris propose d' "élargir les horaires de prise en charge" ainsi que les "soins et services" de ces huits centres.
Elle veut aussi mettre en place "un site adapté pour des accueils jour/nuit et une activité de soin" qui serait disponible d'ici à la fin de l'année dans le XXe arrondissement de la capitale. Dans le quartier des Grands Boulevards, deux autres centres seront installés. L'un d'entre eux devrait être ouvert à la fin de l'année. Enfin, un site dédié aux femmes toxicomanes est prévu dans le XIXe arrondissement.
Le porte-parole de l'association "Paris 19" salue la prise en charge des personnes toxicomanes que permettraient ces sites. Il critique en revanche la lenteur du processus et aurait préféré une mise en place plus rapide de ces centres alors que la rentrée et ses flux de population approchent à grands pas.
"C'est évidemment une solution de moyen et de long terme sans doute la bonne solution, la plus humaine, mais pas la solution de court terme à la catastrophe humanitaire qui se joue en ce moment", rajoute Mathieu, porte-parole de l'association "Renaissance des jardins d'Eole", l'un des endroits les plus touchés par la consommation de crack.
"On a besoin de l'Etat"
De son côté, Anne Souyris, adjointe à la mairie de Paris en charge de la Santé publique assure que la mairie met en place à la fois des solutions de court et de moyen terme.
"C'est aussi l'aide évidemment de la police pour qu'il puisse y avoir une médiation dans la ville et faire en sorte qu'il n'y ait pas de rassemblements permanents nuit et jour autour du jardin d'Éole. (...) Enfin, on a mis en place de la médiation de rue et des maraudes pour éviter des cristallisations", assure l'adjointe à la mairie.
Par ailleurs, les associations de riverains tout comme l'adjointe à la mairie de Paris, pointent l'absence de rôle joué par l'Etat. "On a besoin de l'Etat. L'Etat pour l'instant est un rendez-vous très lointain", assure Anne Souyris.
Même constat pour Tarak Sassi qui appelle Emmanuel Macron à venir se rendre compte lui-même "du manque de sécurité dans les rues". Le fondateur de "Paris anti-crack" souhaite aussi la mise en place de l'obligation de soins pour les toxicomanes considérés comme dangereux et appelle le ministre de l'Intérieur à prendre des mesures. "On en a marre des effets d'annonce qui ne servent à rien" soutient-il.