Certificats de paternité, présence depuis un an... Valls veut "restreindre l'accès au droit du sol" à Mayotte

Moins d'un mois après le cyclone Chido qui a dévasté Mayotte, haro sur le droit du sol. Le ministre des Outre-mer Manuel Valls espère largement modifier cet accès à la nationalité française pour les enfants nés sur le sol mahorais.
"Il faut restreindre l'accès au droit du sol", a jugé l'ex-Premier ministre ce dimanche 13 février sur BFMTV, appelant à "agir sans tabou dans le consensus le plus général".
Un droit du sol déjà limité
Depuis 2018 et la loi asile-immigration défendue par Gérard Collomb alors ministre de l'Intérieur, une dérogation existe déjà à Mayotte, qui restreint la possibilité de devenir Français pour les enfants nés sur l'archipel. Il faut que l'un des parents ait, au jour de la naissance, été présent de manière régulière en France depuis trois mois.
Depuis, la situation n'a guère changé dans le 101e département français. Au 1er janvier 2024, l'institut de statistiques Insee estimait la population de Mayotte à 321.000 personnes. Et selon la préfecture de Mayotte, citée dans un rapport d'information de l'Assemblée nationale en mai 2023, un peu moins de 50% de la population est de nationalité étrangère.
"Entre un tiers et la moitié de la population serait en situation irrégulière", selon la préfecture. Le phénomène met sous très forte pression les écoles et le système hospitalier.
"Regarder ce que dit la droite"
Au début de l'année 2024, des barrages routiers ont paralysé la circulation et la vie économique de l'archipel pour dénoncer l'insécurité et la crise migratoire. De quoi pousser le gouvernement à hausser le ton en la matière.
"On peut aller encore plus loin dans ce domaine-là", exhorte Manuel Valls, appelant notamment à "regarder ce que dit la droite".
Les députés LR vont profiter de leur niche parlementaire du 6 février prochain - cette journée qui leur permet de débattre des textes qu'ils souhaitent dans l'hémicycle - pour tenter de faire voter une proposition de loi sur Mayotte.
Elle propose d'aller beaucoup plus loin que ce qui existe depuis 2018 en permettant l'accès a la nationalité française pour les enfants nés à Mayotte à la condition que les deux parents soient présents de façon régulière sur le sol français pendant au moins un an.
"Agir sur les faux certificats de paternité"
Manuel Valls ajoute, lui, une possibilité qui n'est pas citée par la droite, celle d'agir "sur les faux certificats de paternité".
Si l'arsenal juridique permettant de lutter contre ces faux certificats existe déjà, il semble peu utilisé à Mayotte. L'ex-député LR de Mayotte Mansour Kamardine a déjà évoqué sur BFMTV le fait qu'à Mayotte, des habitants se présentent "deux ou trois fois dans l'année pour se pacser, sans vérifier que le PACS précédent a été dissous", permettant une "reconnaissance en paternité fictive", comme l'avance un rapport parlementaire.
La position du ministre des Outre-mer fait largement consensus dans les rangs gouvernementaux. Lors de sa visite dans l'archipel fin décembre, François Bayrou jugeait que "la question du droit du sol était une question qu'il fallait se poser".
Vers une loi consacrée à l'immigration à Mayotte
Le ministre de l'Intérieur Bruno Retailleau et le ministre de la Défense Sébastien Lecornu ont de leur côté signé une tribune conjointe avec Manuel Valls dans Le Figaro le 5 janvier, y partageant leur assentiment.
Seule voix discordante: celle d'Élisabeth Borne, désormais ministre de l'Éducation nationale, qui avait largement pris ses distances avec ses collègues sur BFMTV le même jour.
Après le discours de politique générale de François Bayrou ce mardi, les députés se pencheront dans la foulée sur le projet de loi spéciale pour reconstruire Mayotte. Un second texte devrait ensuite arriver dans l'hémicycle spécifiquement consacré aux questions migratoires dans l'archipel.