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Sécheresse

32 départements en situation de crise: les restrictions d'eau sont-elles une solution efficace contre la sécheresse?

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Un déficit de pluie couplé et des canicules précoces provoquent des sécheresses de plus en plus importantes en France. Lors de ces épisodes, des restrictions d'eau sont mises en place. Un mal pour les agriculteurs, mais nécessaire pour l'avenir de la ressource en eau.

Des épisodes de sécheresse de plus en plus importants et précoces chaque année. En France, le déficit de précipitation de ces derniers mois conjugué avec une canicule très précoce à participer à cette année à l'arrivée anticipée de la sécheresse.

"Quand on regarde, les cinq derniers mois ont été déficitaires en précipitations, en particulier mai et juin même si c'est moins le cas en juillet", explique Jean Jouzel, climatologue et ancien membre du Giec, sur BFMTV. "Donc ça joue sur l'humidité des sols."

Le phénomène d'évaporation est aussi important: plus il faut chaud, plus l'eau de pluie va s'évaporer et ne pas rejoindre les sols. De simples précipitations ne suffisent donc pas à endiguer un phénomène de sécheresse si les températures sont élevées. Ainsi en France, près des deux tiers de l'eau de pluie est finalement évaporée.

La situation reste un peu différente pour les nappes phréatiques, qui pour certaines ont bénéficié de pluies d'hiver très abondantes. "Mais ce sont les sols qui inquiètent beaucoup, notamment les agriculteurs", souligne le chercheur.

Des conséquences lourdes sur l'agriculture

Dans le Loiret par exemple, une alerte rouge a été émise en raison d'un indice de l'humidité des sols extrêmement bas et d'un débit des cours d'eau très faible. Certains bassins sont à l'état de "crise", comme à Cosson, Loiret-Dhuy ou Bezonde.

Par conséquent, des restrictions d'eau ont été mises en place dans le département. Les arrosages des espaces publics sont interdits, et ceux des jardins potagers possibles uniquement de 20 heures à 8 heures le lendemain. Pour les agriculteurs, les exploitations ne peuvent être arrosées de l'après-midi.

Une sécheresse et des restrictions en eau qui ont forcément des conséquences sur les cultures. Sébastien Leconte, maraîcher à Saint-Cyr-en-Val, se retrouve avec des fruits et des légumes présentant des caractéristiques de stress hydrique, comme des tomates au "cul noir".

"C'est des tomates qu'il faudrait que j'arrose toutes les deux heures, et actuellement avec l'arrêté en place je ne peux pas. Elles ont donc des déformations, et c'est invendable." Une perte de 20% de sa culture pour l'agriculteur.

"Ce n'est pas un geste dérisoire"

Toutefois, si ces restrictions provoquent l'inquiétude et la colère des agriculteurs, elles sont le moyen le plus efficace de lutter contre la sécheresse.

"Ce n'est pas un geste dérisoire", assure le climatologue Jean Jouzel. "Il faut être sobre, et l'eau est un bien commun donc on fait appel à toutes les activités qui consomment de l'eau."

Le chercheur entend la difficulté des agriculteurs, mais souligne l'obligation de préserver l'eau pour éviter toute pénurie. "C'est tout le problème du réchauffement climatique. Ce type de situation, qui devient de plus en plus importante, va s'accentuer."

Jean Jouzel appelle à tenir compte du réchauffement climatique et de ses conséquences pour revoir les systèmes d'agriculture dans le pays. "L'agriculture doit faire face aux problèmes actuels, mais doit aussi s'adapter."

"L'agriculture va se modifier dans de nombreuses régions en France au cours des 20/30 prochaines années, et il faut anticiper", répète-t-il. "Il faut accepter cette idée."

En France en ce début de mois d'août, 32 départements ont été placés en situation de crise face à la sécheresse. Si rien n'est fait pour lutter contre le réchauffement climatique, les spécialistes annoncent sept fois plus de sécheresse d'ici la fin du siècle.

Juliette Moreau Alvarez