Neige, pluie, orage: pourquoi la météo nous fascine tant

La foudre lors d'un orage à Nice en octobre 2019 - Valéry Hache-AFP
Dès que le vent soufflera ou que tombe la neige, que ce soit lundi au soleil ou que l'on chante sous la pluie, la météo est bien souvent au cœur des préoccupations et des conversations, devant la machine à café aussi bien que lors des repas de famille.
En témoigne le nombre de Français qui consultent régulièrement les applications dédiées au beau et au mauvais temps. Comme l'a mesuré Médiamétrie, quelque 28 millions de personnes ont consulté des sites et applications de météo en mai 2019. Soit près de deux millions de personnes supplémentaires qu'un an plus tôt.
Le sujet passionne et les météorologues de Météo France sont les premiers concernés. L'un d'entre eux raconte qu'il investissait son argent de poche dans des thermomètres qu'il installait dans son jardin. Il a notamment "cassé sa tirelire" à l'âge de 15 ans pour s'offrir des livres de météorologie. Un autre explique qu'il continue de passer "des nuits blanches" en cas de phénomènes très importants.
Un Noël à regarder la foudre
C'est également le cas de François Gourand, prévisionniste chez Météo France, pour qui l'amour de la météorologie a d'abord été esthétique, né de l'observation "prolongée et répétée" du ciel. "Je me souviens de vacances en Corse, petit, à contempler les changements de couleurs ou de formes des nuages", se souvient-il pour BFMTV.com. Enfant, une petite station installée dans le jardin de ses parents lui permet de relever les variations de température, pression et pluviométrie.
Yohan Laurito, 23 ans, partage la même passion. Il est même tombé dedans dès sa plus tendre enfance. Son tout premier souvenir: un soir de Noël, lorsqu'il avait 4 ans. Ce ne sont pas les cadeaux sous le sapin qui l'ont marqué, mais une nuit d'orage à écouter et regarder la foudre. Aujourd'hui, ce météorologue amateur et chasseur d'orages est à la tête de Météo varoise, un site qui propose des bulletins météorologiques dans le département du Var, en Provence-Alpes-Côte d'Azur. Avec ses quelque 35 stations (dont l'une sur le toit de sa voiture), il se dit heureux de pouvoir "fournir des informations utiles".
"De nombreux secteurs d'activité sont météo sensibles, assure-t-il à BFMTV.com. Les artisans du BTP, l'agriculture ou la viticulture mais aussi les communes ou les collectivités, le tourisme et les loisirs ont besoin d'une information fiable. Même le boucher pour prévoir son stock de merguez par beau temps."
Apprivoiser l'inconnu
S'il n'a, pour sa part, pas voulu en faire son métier, Christian Kalac, directeur des coopératives agricoles de Sanary et Six-Fours dans le Var, consulte et analyse quotidiennement les modèles atmosphériques - ces cartes qui modélisent les conditions météorologiques. Ce féru de météo qui possède deux stations - dont l'une dans son jardin - livre ensuite un bulletin local sur sa page Facebook.
"C'est une passion qui m'animera jusqu'à la fin de mes jours, confie-t-il à BFMTV.com. Tout a commencé par la foudre qui est tombée deux fois en un an et demi sur notre maison lorsque je n'avais que 4 ou 5 ans. Un éclair a traversé ma chambre et j'ai vu une boule bleue se former. Les deux fois, l'incendie a été rapidement éteint mais de ce traumatisme de voir ma maison en flammes il y a quarante ans est née cette passion."
Christian Kalac, qui a lui aussi noté dans un petit carnet tous les jours pendant plusieurs années les conditions météorologiques qu'il observait, voit dans la fascination pour la météo la volonté de l'humain de reprendre le contrôle sur la vie. "Les prévisions météo permettent d'apprivoiser l'inconnu, d'avoir une domination sur l'existence alors que l'avenir peut faire peur. C'est presque de l'ordre de la prédiction et cela rassure."
"Des événements que l'on ne peut pas maîtriser"
Pour d'autres, c'est au contraire l'indomptable qui fait le charme de la météo. C'est le point de vue de Serge Zaka, chercheur en agroclimatologie et administrateur du site Infoclimat, une association de passionnés de météorologie qui propose différents relevés en temps réel. "La nature nous propose des événements que l'on ne peut pas maîtriser", analyse-t-il pour BFMTV.com.
"Si l'on peut prévoir la tempête, on ne peut que la subir et si l'on peut avertir, on ne pourra pas pour autant diminuer l'intensité des vents. On envoie des personnes sur la Lune et l'on maîtrise de plus en plus de choses mais la météo résiste à cette tentation et résistera."
Lui-même s'est épris de météorologie lors de la tempête de 1999. Il avait 10 ans et ce phénomène aussi spectaculaire qu'effrayant a servi d'élément déclencheur. "C'est aussi beau qu'inquiétant et mystérieux", ajoute ce chasseur d'orages.
"La météo amplifie nos émotions"
Autre explication à cette fascination pour la météo: le sujet est concernant, estime François Gourand. "C'est le premier sujet de proximité, il concerne tout le monde. Avec la météo, il n'y a aucune ligne de fracture, elle nous rassemble." Yohan Laurito, qui propose des bulletins météorologiques dans le Var aux professionnels mais aussi aux particuliers, est du même avis. D'autant que le changement climatique aurait accéléré les choses.
"Les phénomènes violents impactent la vie de tous les jours, aussi bien les loisirs que les activités professionnelles, et ont entraîné une prise de conscience".
Mais selon le prévisionniste de Météo France - qui va partir dans les prochaines semaines pour une mission de huit mois en Antarctique - en plus du côté pratique (faudra-t-il prendre un parapluie ou une paire de gants demain matin?) les Français ont aussi un lien émotionnel avec la météo.
"C'est quelque chose qui va influer sur notre moral ou notre humeur, de manière positive ou négative, poursuit François Gourand. La météo amplifie nos émotions."