"C'est de la rage": une maire d'Isère raconte sa "peur" après avoir été agressée par un habitant

L'écharpe tricolore. (Illustration) - SEBASTIEN BOZON
"C'était horrible à vivre". Dimanche 12 octobre, Carole Fauchon, violemment agressée jeudi dernier s'est confiée à France Info. D'une voix tremblante, la maire de Thodure, raconte comment, coincée dans l'habitacle de sa voiture, elle a subi "la rage" d'un homme de 83 ans, excédé par un conflit de voisinage.
"J’ai eu l’impression que ce n’était pas lui, en fait, qu’il était hors de lui. Ce monsieur, il est très près de moi. Ses poings sont très près de moi. Je ne sais pas ce qu’il a dans ses poches", se souvient-elle en tentant de retenir ses larmes. Depuis, elle a porté plainte, contre cet administré.
"J'ai eu très, très peur"
Carole Fauchon ne cache pas sa peur. Surtout qu'elle n'est pas la première à subir, pressions, agressions verbales ou physiques. "Je pense à mon collègue, qui a été agressé au mois d’août. Et j’ai très, très peur", dit-elle. En août, Gilles Dussault, un autre maire a été agressé, à l'arme blanche. Et depuis 2020, cinq élus ont été victimes d'agressions physiques.
"On sait qu’on va être confrontés à certaines problématiques, que ça ne va pas être tous les jours facile. Mais la violence de ses propos, la violence de son attitude, ce genre de violence, on n’est pas prêts à ça", déplore l'édile.
L'agression, a duré 20 longues minutes. Enfermée dans son véhicule, Carole Fauchon a appelé la gendarmerie, qui mettra fin à son calvaire. Après cette agression, l'élue qui souhaitait se représenter se pose désormais la question.
Ces violences subies par les maires participent à un "climat anxiogène", mais ne sont pas une "cause directe majoritaire de démission", selon un rapport du Cevipof rendu en juin dernier et repéré par ICI Isère. La fonction fait bien face à une crise de la vocation.
En cinq ans, 62 maires ont démissionné dans le département de l'Isère. Un record dans l'hexagone. Les édiles d'Echirolles, Saint-Quentin-Fallavier, Allevard ou encore du village de Monsteroux-Milieu, ont tous jeté l'éponge en plein mandat. Ils sont 12%, soit un maire sur huit à avoir abandonné.
Si la situation iséroise est préoccupante, la crise est générale. D'après le Cevipof, en trois mandats, entre 2008 et 2026, le phénomène des démissions des maires "a été multiplié par quatre, mettant en lumière la fragilisation continue de la fonction".
Tensions locales et dissensions au conseil municipal
Selon l'étude, plusieurs raisons poussent les maires à démissionner. En premier lieux, dans plus de 30 % des cas, les tensions politiques locales, en l'occurrence des "dissensions au sein du conseil municipal", sont en cause. Viennent ensuite les passations de pouvoirs anticipées (13,7 %) et les problèmes de santé. Les démissions, sont majoritairement le fait de nouveaux maires en 2020, ce qui souligne, selon le Cevipof "une forme de désillusion rapide".
Une autre raison pousse les maires à démissionner, notamment ceux des villages. Auprès d'Ici, l'un d'entre eux témoigne. "Au départ, quand je suis devenu maire dans les années 80, la commune ne faisait que 150 habitants donc la charge de maire était tout à fait cumulable avec une autre activité", raconte Gérard Mathan, ancien édile de Belmont.
Mais sa commune, s'est étendue. Aujourd'hui, le village compte 600 habitants. "Au fur et à mesure, la charge de maire occupe beaucoup plus: un jour, deux jours dans la semaine puis quasiment un temps plein." Une mobilisation qui n'est pas tellement compensée financièrement, avec son indemnité à 1.650 euros bruts par mois.
Une proposition de loi visant a encourager, faciliter et à sécuriser l'exercice du mandat d'élu local a été adoptée à l'Assemblée nationale en juillet dernier. Ce texte prévoit notamment une réévaluation de 10% des indemnités des maires et adjoints dans les communes de 1.000 habitants. Le Sénat doit l'examiner en deuxième lecture cet automne.