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Raids sur Gaza : quelle est la stratégie d'Israël ?

Des soldats israéliens dans des véhicules de transports blindés (VTB) face à la frontière entre Israël et Gaza, le 15 novembre 2012.

Des soldats israéliens dans des véhicules de transports blindés (VTB) face à la frontière entre Israël et Gaza, le 15 novembre 2012. - -

Selon Jean-François Daguzan, spécialiste des rapports israélo-palestiniens, l'opération israélienne est la conséquence "d'une situation de destabilisation que le pays n’a pas connu depuis 1977".

Depuis deux jours maintenant, une vaste opération militaire israélienne contre Gaza secoue le Proche-Orient. Baptisée "Pilier de Défense", l'opération a été déclenchée mercredi vers 14h30 avec l'assassinat d'Ahmad Jaabari, le chef militaire du Hamas (parti au pouvoir dans la bande de Gaza). Depuis, le Hamas a répliqué en tirant des dizaines de tirs de roquettes mortels en direction d'Israël, laissant craindre une nouvelle escalade de la violence.

>> A lire également : "Un chef militaire du Hamas tué par un raid israélien".

Officiellement, l'opération menée par l'armée israélienne a pour but de répondre aux tirs de roquettes sur le sud de son territoire et d'y mettre un terme.

Mais d'autres raisons permettent d'expliquer cette intervention. Entre les élections législatives en janvier 2013, la récente alliance entre le premier ministre Benjamin Netanyahu et "Israël Beitenou", l'extrême-droite israélienne, sans oublier la "menace" de l'Iran... BFMTV fait le point avec Jean-François Daguzan, maître de recherche à la Fondation pour la recherche stratégique.

Une bataille électorale

Pourquoi Israël décide d'intervenir maintenant en particulier ? Y a-t-il une relation avec les élections législatives qui auront lieues en janvier 2013 ?
Je pense que l’opération 'Pilier de Défense' tient à plusieurs causes. Sur un plan interne, il y a la question électorale qu’on ne peut évidemment pas éliminer. Il s’agit d’une certaine manière pour le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu de marquer des points en matière de sécurité, à un moment où l’angoisse de la population est extrêmement forte.

Il ne faut pas oublier qu’il y a d’un côté les tirs du Hamas, mais également cette montée de la tension sur la frontière Nord avec les évènements en Syrie.

Montée d’angoisse, élections législatives en janvier 2013... il y a donc une nécessité pour Benjamin Netanyahu de montrer qu’il ne laissera rien passer.

Et puis il y a toujours un effet de surenchère qui joue dans le processus électoral. C’est une façon de couper l’herbe sous le pied des autres formations qui pourraient hurler à la mort en disant que le Premier ministre ne fait pas son travail et qu’il faut donc en changer. Donc il anticipe finalement les critiques.


Décrédibiliser la candidature palestinienne à l'ONU

Quelles sont les causes externes à cette intervention ?
Du point de vue de la politique extérieure, il faut noter que cette opération s’inscrit aussi au moment où la Palestine se présente pour demander un statut de pays observateur à l’ONU. 

Donc c’est peut-être aussi pour Israël une façon de dire : "regardez comme ils ne sont pas sérieux" et décrédibiliser la candidature palestinienne en stigmatisant le fait qu’ils attaquent de façon inconsidérée.

Mettre en garde ses voisins

La situation au Proche-Orient est explosive depuis plusieurs mois, faut-il voir cette opération comme une démonstration de force à destination de ses voisins ?
Entre la tension sur le plateau du Golan, en Syrie et au Liban... Israël se méfie et envoie un message clair : "tout dérapage sera immédiatement sanctionné de façon brutale".

>> A lire également : Pourquoi le plateau du Golan est stratégique ?

On pourrait aussi se demander s’il ne s’agit pas de dire aux Qataris (qui ont récemment investi 400 millions de dollars dans la bande de Gaza) : "mêlez-vous de ce qui vous regarde".

Dernier point, la nécessité d’envoyer aussi un message à l’Egypte en disant : "faites le ménage de votre côté" (l’Egypte partage sa frontière nord-est avec la Bande de Gaza, ndlr)."

Forcer la main aux Etats-Unis

D'un point de vue plus international, qu'est-ce qu'Israël peut espèrer obtenir avec ces raids ?

Il a bien sûr la relation avec les Etats-Unis. L’élection de Barack Obama, et c’est un euphémisme, n’est pas une bonne nouvelle pour Benjamin Netanyahu. Les relations entre les deux hommes sont détestables. Là aussi, l’idée d’emballer la machine pour obliger les Américains à se déterminer est peut-être un élément à prendre en compte.

Si vous deviez réduire cette intervention à une seule raison, quelle serait-elle ?

Je pense que c’est le sentiment de sécurité générale qui prévaut en Israël... face à une situation de déstabilisation que le pays n’a pas connu depuis 1977.

Victor Garcia