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Inde: la police accusée d'avoir abattu "de sang froid" quatre suspects d'un viol collectif

Manifestation suite au viol collectif  et du meurtre d'une vétérinaire en Inde, le 6 décembre 2019

Manifestation suite au viol collectif et du meurtre d'une vétérinaire en Inde, le 6 décembre 2019 - MANJUNATH KIRAN / AFP

La police est suspectée d'avoir abattu les quatre suspects du viol collectif et du meurtre d'une vétérinaire de 27 ans. Si la nouvelle a provoqué des scènes de liesse dans tout le pays, la justice et les organisations de défense des droits de l'homme demandent à ce que toute la lumière soit faite sur ces événements.

L'affaire du viol collectif et du meurtre d'une jeune vétérinaire qui avait ému l'Inde a connu un nouveau rebondissement vendredi 6 décembre: la police locale est soupçonnée d'avoir abattu de "sang froid" quatre suspects sur le lieu de la reconstitution du crime.

Selon un haut responsable de la police de Hyderabad, dans le sud de l'Inde, les quatre hommes qui avaient avoué le viol et le meurtre de la jeune femme de 27 ans au moment de leur interrogatoire, se seraient emparés des armes des policiers et avaient tenté de s’enfuir.

"Les policiers leur ont demandé de se rendre, mais ils ont continué à tirer. Ensuite nous avons ouvert le feu, et ils ont été tués ", a détaillé le commissaire V.C. Sajjanar. 

Un policier impliqué dans deux affaires similaires

La reconstitution de la scène du viol était supervisée par un officier de police impliqué dans deux incidents semblables, a rappelé le quotidien Indian Express. Ainsi, en 2008, trois personnes soupçonnées d'avoir commis des attaques à l'acide avait été tuées dans une forêt.

L'annonce de la mort des suspects a occasionné des scènes de liesse dans tout le pays et satisfait le père de la victime, ce dernier estimant que "justice est faite." Très vite, des centaines de personnes ont afflué sur les lieux pour couvrir les policiers de pétales de fleurs, des politiques et personnalités, notamment sportives, ont salué le travail des forces de l'ordre sur les réseaux sociaux. 

Lors de l'arrestation des quatre hommes, vendredi de la semaine dernière, des centaines de personnes avaient fait le siège du commissariat où ils étaient détenus. Un député avait appelé devant le parlement à ce qu'ils soient "lynchés".

Vive inquiétude du côté des organisations de défense des droits de l'homme

Les circonstances de la mort des quatre suspects lors de la reconstitution de la scène de viol suscitent d'un autre côté, une vive inquiétude de la part des organisations de défense des droits de l'être humain et de la justice. Un avocat de la Cour suprême s'est même indigné, parlant de "meurtre de sang froid".

Une équipe de la Commission nationale des droits de l'Homme qui a déclaré dans un communiqué que la mort des suspects était susceptible de "transmettre un mauvais message à la société" était attendue sur les lieux de l'incident ce samedi.

"Si les personnes arrêtées étaient effectivement coupables, elles devaient être condamnées selon la loi et conformément aux instructions du tribunal compétent", a-t-elle souligné. 

Amnesty International demande également à ce que toute la lumière soit faite sur cette "exécution arbitraire".

"Dans une société moderne qui respecte le droit, le recours aux exécutions extrajudiciaires pour rendre justice aux victimes de viol est non seulement inconstitutionnel, mais il contourne le système juridique indien et crée un précédent regrettable", écrit l'organisation dans un communiqué. 

La Haute Cour de l'État de Telangana, où s'est produit l'incident, a ordonné la conservation des corps jusqu'à lundi afin de procéder à une autopsie filmée. "Pourquoi les ont-ils punis avant même de terminer la procédure légale ?", a déclaré le père d'un suspect abattus.

Le pays de nouveau secoué par la mort d'une femme brûlée vive 

Cette affaire intervient alors que le pays est de nouveau secoué par la mort ce vendredi d'une femme brûlée vive par des hommes qu'elle accusait de l'avoir violée, dans l'État de l'Uttar Pradesh dans le nord de l'Inde.

La femme qui a succombé à ses blessures a été brûlée vive jeudi alors qu'elle se rendait à une audition devant un tribunal. Elle avait expliqué aux policiers qu'elle avait été agressée par deux hommes qui l'avaient violée, ainsi que par trois autres.

"En dépit de tous nos efforts, elle n'a pas survécu", a déclaré le responsable des grands brûlés à l'hôpital de Safdarjung, à New Delhi, cité par l'agence PTI.

Cinq suspects ont été arrêtés et sont interrogés, a détaillé un porte-parole de la police, Suvendra Kumar Bhagat.

Les violences sexuelles font régulièrement la "une" en Inde depuis le viol collectif d'une étudiante à bord d'un autobus à New Delhi en 2012. De nombreux indiens considèrent que la justice échoue encore trop souvent à condamner les violeurs.

R.Ga avec AFP