Un pape jésuite, une première au Vatican

Le pape François est un jésuite. Une grande première au Vatican, qui pourrait bouleverser la Curie romaine.

Pour la première fois de l’histoire, le pape est un jésuite. Un choix fort en symboles pour l’Eglise catholique.

Pour Jorge Mario Bergoglio, être jésuite est d'abord d'un choix de jeunesse: c'est en 1958, à l’âge de 22 ans, qu'il s’engage dans la Compagnie de Jésus. Mais tout son parcours s'articule autour des grands principes de cet ordre, fondé en 1534 par Ignace de Loyola. Un pape jésuite, qu'est-ce que cela change? Eléments de réponses.

> Un érudit

Les jésuites se caractérisent par leur formation intellectuelle poussée. L’enseignement joue d’ailleurs un rôle très important: depuis la création de l'ordre, ses membres ont produit un important travail de formation dans leurs collèges. Ils sont également à l’origine de nombreux écrits. "Beaucoup de jésuites ont été de grands scientifiques", explique Frédéric Lenoir, historien des religions et directeur du Monde des religions.

Jorge Mario Bergoglio n’a d’ailleurs pas échappé à la règle: pendant près de dix ans, il a étudié la philosophie, mais aussi la psychologie et la théologie.

> Un profil austère

Le nouveau pape François est connu pour son silence et sa vie très modeste: il vit dans un petit appartement à Buenos Aires, se déplace en transport en commun, se lève à 4h30 tous les matins. C’est un trait typique des jésuites, qui mènent une vie ascétique. "C’est le cas de tous les religieux, mais les jésuites ont particulièrement cette réputation. Ils mènent un apprentissage de l’effacement, de la modestie", explique à BFMTV.com Frédéric Lenoir.

Et cette modestie s’est remarquée dès ses premiers gestes en tant que pape: "il s’est incliné devant le peuple. Une façon de montrer qu’il est à son service: c'est une vraie marque d'humilité", souligne l'historien.

> Un missionnaire

La mission est au cœur de la vie du jésuite. "C’est un ordre à dimension intellectuelle avec un but d’évangélisation, rappelle Frédéric Lenoir. Le choix du prénom François fait d’ailleurs référence non seulement à Saint-François d’Assise, mais également à Saint-François-Xavier, un évangéliste et missionnaire dont le rôle a été déterminant en Asie".

Contrairement aux moines qui vivent isolés, le jésuite vit en ville pour rester proche de la population, et est attentif aux problèmes sociaux de ceux qui l'entourent. Il se mèle à la vie civile, pour porter la voix du Christ.

> Un proche du Vatican, mais...

Dès l’origine, Ignace de Loyola a souhaité qu’en plus des vœux traditionnels de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, les membres de la Compagnie de Jésus prononcent un quatrième vœu d’obéissance et d’engagement auprès du pape. "Au départ, ils sont une milice du Christ au service du pape", rappelle Frédéric Lenoir. Leur siège se trouve d’ailleurs à Rome, près du Vatican.

Pourtant, les relations avec le Vatican n’ont pas toujours été au beau fixe. "Il est arrivé que les jésuites, notamment au début, deviennent si puissant que le pape s’en méfie, précise Frédéric Lenoir. Les évèques aussi se sont souvent méfiés des jésuites, plus cultivés et plus austères qu’eux."

Et l’arrivée de Jorge Mario Bergoglio à la tête de l’Eglise pourrait bien changer beaucoup de choses, selon le directeur du Monde des religions. "Les cardinaux ont choisi un homme de foi. Ce n’est pas un membre du clergé, un ancien évèque ou un prêtre, c’est un religieux. Cela apporte une dimension spirituelle importante à l'élection. Mais surtout, le nouveau pape n’est pas attaché à la bureaucratie du Vatican, il n’a jamais eu l’intention d’y faire carrière: il pourra donc la bousculer".

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Ariane Kujawski