Pédophilie: l'ONU épingle l'inaction du Vatican qui nie faire obstacle à la justice

Un comité de l'ONU a épinglé l'inaction du Vatican qui, de son côté, nie avoir fait obstacle à la justice pour étouffer un scandale. (siège de l'ONU, illustration). - -
Le Vatican est-il pénalement responsable des actes pédophiles commis au sein de ses diocèses? Et comment sa lutte contre la pédophilie avance-t-elle? Le Comité de l'ONU pour les droits des enfants a demandé jeudi au Vatican d'expliquer les mesures prises pour lutter contre la pédophilie dans l'Eglise. Le Saint-Siège est accusé d'avoir cherché à étouffer et minimiser un énorme scandale.
"Quels changements ont été apportés au code de conduite pour prévenir ces abus sexuels? Quelles sanctions ont été prises contre les clercs ayant eu une conduite inappropriée?", a demandé une des expertes du Comité, Sara Oviedo.
"Nous savons que des progrès ont été faits", mais "est-ce que les enfants (...) ont la possibilité d'être entendus, surtout s'il s'agit de victimes?", a-t-elle ajouté.
"L'Eglise veut devenir un exemple"
Le Vatican, qui a pris la parole en premier lors de la session, a pour sa part défendu sa propre action. "Ceux qui commettent des abus se trouvent parmi les membres des professions les plus respectées, et malheureusement, y compris par les membres du clergé et parmi d'autres représentants de l'Eglise", a déclaré le représentant du Vatican auprès des Nations unies à Genève, Silvano Tomasi.
"L'Eglise catholique veut devenir un exemple de bonne conduite", a-t-il assuré. "Il n'y a aucune excuse pour toute forme de violence ou d'exploitation des enfants", a-t-il dit, soulignant que selon l'Organisation mondiale de la santé (OMS), 150 millions de filles et 73 millions de garçons avaient été victimes de violences sexuelles (statistiques de 2006).
Il a rappelé que le Vatican avait ratifié la Convention des droits de l'enfant en 1990, et ses protocoles - dont l'un concerne la pornographie infantile - en 2000.
Il a également souligné, sans les détailler, que le Saint-Siège avait formulé des "directives" en la matière pour faciliter localement le travail des ecclésiastiques.
Le pape François fustige "la honte de l'Eglise"
De son côté, le pape François a exprimé "la honte de l'Eglise". "Avons-nous honte? Tant de scandales que je ne veux pas mentionner individuellement, mais que tout le monde connaît!", s'est exclamé le pape François lors de la messe matinale à la résidence Sainte-Marthe.
"Ces scandales, certains qui nous ont fait verser tant d'argent: Et c'est bien ainsi, on devait le faire...", s'est-il exclamé, évoquant implicitement les indemnisations versées aux victimes de ces crimes par certains diocèses, américains notamment.
Divergences de vues ou obstruction?
La session de Genève survient à un moment où la pédophilie dans l'Eglise fait encore la une dans plusieurs affaires et notamment celle mettant en cause le père mexicain Marcial Maciel, du mouvement conservateur des Légionnaires du Christ, en pleine refonte.
Le Saint-Siège a notamment refusé en décembre au Comité de l'ONU de répondre à un questionnaire envoyé en juillet concernant les dossiers de pédophilie sur lesquels enquête la Congrégation vaticane pour la doctrine de la foi (CDF, ancien Saint-Office).
Le Vatican estime que son enquête ecclésiastique doit être tenue secrète pour protéger témoins et victimes, et qu'il n'est pas compétent pour la collaboration entre Eglise et justices nationales.
Deux conceptions s'opposent: celle des associations de victimes qui considèrent que le Vatican devrait être tenu pénalement responsable des crimes de ses évêques et de ses prêtres. Celle du Vatican qui juge qu'il n'est pas responsable d'actes commis dans les diocèses.