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"Traités comme des animaux": la colère d'un survivant du pire naufrage de migrants en Manche

Des membres d'associations de défense des migrants se rassemblent à côté d'une pancarte indiquant « 30 ans d'annonces, de traitements inhumains et dégradants » le 24 novembre 2021 à Calais, dans le nord de la France, suite au naufrage d'un bateau de migrants traversant la Manche vers l'Angleterre. (Photo d'illustration)

Des membres d'associations de défense des migrants se rassemblent à côté d'une pancarte indiquant « 30 ans d'annonces, de traitements inhumains et dégradants » le 24 novembre 2021 à Calais, dans le nord de la France, suite au naufrage d'un bateau de migrants traversant la Manche vers l'Angleterre. (Photo d'illustration) - FRANCOIS LO PRESTI / AFP

Issa Mohamed Omar, l'un des deux survivants d'un naufrage dans la Manche en novembre 2021, a témoigné, ce mardi 4 mars, devant une commission d'enquête britannique. Le trentenaire a notamment accusé les secours anglais de ne pas avoir répondu aux appels à l'aide de son embarcation.

Un Somalien, survivant du pire naufrage de bateau de migrants dans la Manche avec au moins 27 morts en novembre 2021, a accusé mardi devant une commission d'enquête britannique les secours de ne pas les avoir sauvés parce qu'ils étaient des "réfugiés".

Auditionné pendant près de trois heures, Issa Mohamed Omar a raconté cette nuit du 23 au 24 novembre 2021. Il était interrogé par vidéo par les responsables d'une enquête publique sur le naufrage, qui a démarré ses auditions ce lundi 3 mars à Londres (Royaume-Uni).

"Traités comme des animaux"

"Si les secours étaient arrivés rapidement, la moitié (des victimes) serait encore en vie aujourd'hui", a-t-il notamment déclaré.

"Nous avons été considérés comme des réfugiés, c'est la raison pour laquelle je crois que les secours ne sont pas venus du tout", estime cet homme de 31 ans.

Il ajoute avoir eu l'impression que lui et les autres passagers du bateau avaient "été traités comme des animaux".

Ce naufrage avait aiguisé les tensions entre Paris et Londres qui se sont rejetés mutuellement la responsabilité du drame.

L'enquête publique britannique, qui se concentre sur le rôle des autorités britanniques et devrait aboutir à des recommandations, se déroule en parallèle des procédures judiciaires de Paris. Dans l'enquête pénale française, sept militaires ont été mis en examen pour non-assistance à personne en danger. Onze passeurs présumés sont également poursuivis.

Au total, vingt-sept corps ont été retrouvés après ce naufrage, principalement des Kurdes d'Irak. Parmi les victimes, on compte sept femmes et une fillette de sept ans. Quatre personnes sont toujours portées disparues.

Une embarcation surchargée

Selon plusieurs sources, ils étaient 33 à bord de l'embarcation de fortune. Mais Issa Mohamed Omar est "100% sûr" qu'ils étaient davantage. "Des enfants n'ont pas été comptés", a-t-il affirmé. "Le bateau était très chargé". Il y avait ainsi, selon lui, 14 adultes de chaque côté de l'embarcation, et les familles avec enfants au milieu.

Pendant environ une heure et demie, un bateau des garde-côtes français les a "suivis", sans engager de dialogue, a-t-il raconté. Ils ont commencé à couler plus tard, "aux alentours de deux heures", estime Issa Mohamed Omar. Au téléphone, les passeurs assuraient aux migrants qu'ils n'étaient plus qu'à 2 ou 3 kilomètres de Douvre, en Angleterre, se souvient-il.

Issa Mohamed Omar évoque de nombreux appels passés aux secours britanniques, en vain. "La plupart du temps", personne ne répondait. Il a raconté "les cris" dans l'obscurité. "Plusieurs personnes se sont noyées très rapidement une fois que nous avons chaviré".

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Quand le soleil s'est levé, une dizaine de migrants étaient encore en vie, selon lui. Il a été secouru par des pêcheurs français après plus de dix heures dans l'eau. Seulement deux passagers ont survécu, lui et un autre homme.

C.D. avec AFP