Ecosse: la Première ministre Nicola Sturgeon annonce sa démission

"Je suis un être humain" : à la surprise générale, la Première ministre écossaise Nicola Sturgeon a annoncé mercredi sa démission après huit ans au pouvoir, un départ qui porte un coup aux velléités d'indépendance de la nation britannique. Tout en faisant de l'indépendance écossaise le combat d'une vie, qu'elle portait avec détermination sans arriver à surmonter l'opposition de Londres, elle a décidé de jeter l'éponge.
Visiblement émue, parfois au bord des larmes, la dirigeante de 52 ans a indiqué devant la presse à Edimbourg qu'elle céderait son poste dès que le Parti national écossais (SNP) aurait désigné son successeur. "Ce travail est un privilège, mais aussi très difficile", a-t-elle souligné.
"Je suis un être humain", a expliqué celle qui disait encore en janvier, après la démission de la Première ministre néo-zélandaise Jacinda Ardern, avoir "plein d'énergie". "J'aurais pu faire quelques mois de plus, peut-être six mois, un an", a-t-elle estimé. "Mais avec le temps j'aurais eu de moins en moins d'énergie pour mon travail et je ne peux le faire qu'à 100%, c'est ce que le pays mérite".
"Trois décennies en première ligne"
Elle avait d'abord tenu à réfuter une quelconque volonté d'échapper à ses responsabilités:
"Bien que je sache pertinemment qu'il sera tentant de voir dans ma démission une réaction à des difficultés immédiates, ce n'est pas le cas. Bien sûr, le gouvernement fait face à des problèmes difficiles en ce moment-même... Mais quand en est-il autrement? J'ai passé près de trois décennies en première ligne du monde politique, dont une décennie à sa tête ou dans une position de numéro 2. Pour ce qui est de naviguer par gros temps, de résoudre des problèmes apparemment inextricables, ou de faire face quand se détourner serait la solution de facilité, j'ai une grande expérience. Donc s'il s'agissait seulement de ma capacité, de ma résilience au moment de traverser ces dernières périodes de pression, je ne serais pas là devant vous".
"Mais il ne s'agit pas de ça", a-t-elle repris: "Ma décision découle d'un constat plus profond et remontant à plus loin. Si comme je l'imagine, elle paraît soudaine, je me débats avec cette idée depuis longtemps."
Expliquant que sa réflexion s'était articulée autour de deux questions, elle a développé:
"J'ai principalement cherché à répondre à deux questions: continuer est-elle la bonne chose à faire pour moi? Et, plus important encore, est-ce que mon maintien au pouvoir est la bonne chose à faire pour mon pays, mon parti et pour la cause de l'indépendance à laquelle j'ai voué ma vie? Je comprends pourquoi certains répondraient automatiquement 'oui' mais la vérité c'est que j'ai dû me faire violence ces derniers temps pour me convaincre qu'il me fallait bien continuer".
"J'ai atteint la conclusion pénible qu'il me fallait arrêter", a-t-elle posé.
Désillusion pour le camp indépendantiste
Assurant avoir longuement mûri sa décision, elle a cité les changements dans sa famille et les obsèques d'un proche, la difficulté de pouvoir "prendre un café avec un ami, ou sortir, seule, pour une marche". Son départ, sans successeur évident (elle a refusé d'apporter un soutien à quelqu'un), porte un coup à la cause indépendantiste, dont elle était une figure incontestée, déterminée et appréciée du public, et qu'elle soutenait depuis son adolescence.
Née dans la ville industrielle d'Irvine, au sud-ouest de Glasgow, Nicola Sturgeon a rejoint le SNP à l'âge de 16 ans. Peter Murrell, son mari, est directeur général du parti. Elle a pris la tête du SNP et du gouvernement écossais - première femme à ce poste - après la démission en 2014 de son prédécesseur Alex Salmond. Les Ecossais avaient alors voté à 55% en faveur d'un maintien au sein du Royaume-Uni.