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Brésil: Bolsonaro et l'extrême droite aux portes du pouvoir 

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A quatre jours du second tour de l'élection présidentielle au Brésil, Jair Bolsonaro est plus que jamais favori. Les sondages créditent le candidat d'extrême droite de 59% des intentions de vote.

Il est d'extrême droite, militariste, misogyne et homophobe, mais a su se présenter comme l'homme providentiel capable de sortir le Brésil de son marasme, face au candidat de gauche Fernando Haddad. Jair Bolsonaro est le grandissime favori de la présidentielle. Les derniers sondages lui prédisent un mandat clair pour le second tour, ce dimanche, avec 59% des voix contre 41% à Haddad.

La campagne s'est vite polarisée, poussant les 147 millions d'électeurs vers les extrêmes. Le premier tour, couplé à des législatives, a marqué la plongée dans le coma des grands partis traditionnels du centre et de la droite. Jair Bolsonaro, 63 ans, a renversé la table avec son minuscule Parti social libéral (PSL). Il a manqué de peu d'être élu dès le 1er tour (46%) en réussissant à se faire passer pour un candidat antisystème alors qu'il est député depuis 27 ans.

L'ancien parachutiste, chantre d'une dictature (1964-85) qui a commis selon lui "l'erreur de torturer sans tuer", a séduit des Brésiliens excédés par la corruption, la violence et le chômage en leur promettant de remettre de l'ordre dans le pays.

"Nettoyer le pays"

Cet admirateur de Donald Trump a surfé sur la vague de dégagisme et "a su reconnaître l'exigence de changement au Brésil", relève Paulo Sotero, directeur du Brazil Institute du Wilson Center, à Washington. Bolsonaro a attisé chez des millions de Brésiliens une haine farouche du Parti des Travailleurs (PT) de l'ex-président Lula, dont la gestion, de 2003 à 2016, serait selon lui à l'origine de toutes les crises d'aujourd'hui. "Le système politique brésilien s'est épuisé. Les gens sont fatigués", explique Paulo Sotero.

Ainsi, le populiste Bolsonaro a promis de "nettoyer le pays" de ses élites corrompues avec un gouvernement resserré, composé pour un tiers de généraux, d'éradiquer la violence en libéralisant le port d'arme, et de protéger la famille traditionnelle. Avec un discours outrancier, voire de haine, il s'est attiré le soutien crucial des très conservatrices églises évangéliques, comme des lobbies pro-armes et de l'agro-business.

Sur le plan économique, cet ancien défenseur du secteur étatique s'est reconverti en ultra-libéral pour relancer une économie aux 13 millions de chômeurs. En dépit du flou entourant son programme sur des questions cruciales comme les réformes fiscale ou des retraites, la Bourse a déjà voté pour lui. "Les investisseurs semblent rester optimistes quant au potentiel de réformes sous Bolsonaro", notent les consultants de Capital Economics.

Machine de guerre 

Avec le PT, Fernando Haddad, 55 ans, veut "rendre le Brésil heureux à nouveau" comme sous les deux mandats de croissance de son mentor Luiz Inacio Lula da Silva (2003-2010), par des politiques sociales, la fin du gel des dépenses publiques et un contrôle des armes à feu. Il s'est posé en défenseur des minorités et de la démocratie. Une démocratie en grand danger, 50% des Brésiliens estimant qu'il y a un risque de retour de la dictature au Brésil, selon un sondage publié vendredi dernier.

Haddad est entré tardivement en campagne, se substituant à Lula, emprisonné pour corruption et inéligible. Puis il a manqué d'agressivité face au rouleau compresseur Bolsonaro. Pour le second tour, il n'a pas pu obtenir le ralliement du centre gauche ni des centristes afin de faire barrage à l'extrême droite dans un "front républicain". Haddad a porté comme un fardeau la figure tutélaire de Lula, dont il a fini par enlever la photo sur ses spots de campagne. "Lula est devenu toxique", dit Paulo Sotero.

Son adversaire a, quant à lui, mené l'essentiel de sa campagne sur les réseaux sociaux, sa machine de guerre. Fort de ses 14 millions d'abonnés sur Facebook, Intagram et Twitter (contre 2,8 millions pour Haddad), il avait d'ailleurs déclaré: "Si nous perdons les réseaux sociaux, c'est terminé."

A.L. avec AFP