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Chine

Chine: un auteur de polars soupçonné d'un quadruple meurtre

Salon du livre à Hong Kong. (Photo d'illustration)

Salon du livre à Hong Kong. (Photo d'illustration) - ISAAC LAWRENCE / AFP

Liu Yongbiao était jusqu'ici connu en Chine comme un écrivain, un auteur de polars couronné de succès. Depuis le 11 août et son arrestation, il est surtout soupçonné d'avoir tabassé à mort quatre personnes il y a 22 ans. Une longue impunité qui trouve un écho dans son œuvre.

Emile Zola, écrivain consciencieux, avait pour habitude de ne se mettre à l'écriture d'un roman qu'après une longue phase de recherches. Liu Yongbiao auteur de polars chinois, est soupçonné par la police de s'être inspiré d'une manière bien moins noble dans le cours de l'écriture de son œuvre: il est actuellement en détention pour un quadruple meurtre commis en 1995, signale The Guardian. Il a été arrêté vendredi dernier.

"Je vous ai attendus tout ce temps"

Au moment de son interpellation, Liu Yongbiao était arrivé au comble de la reconnaissance sociale et artistique. Depuis 2013, il faisait partie de la très officielle Association des écrivains chinois. Plus tôt, il avait connu la gloire avec l'adaptation en feuilleton, fort de cinquante épisodes, de son roman historique Un film, précise ici Le Figaro. Peut-être soucieux de soigner sa légende, ou simplement sincère, il a glissé aux policiers venus l'arrêter à l'aube: "Je vous ai attendus tout ce temps". Le reste, c'est à sa femme qu'il l'a confié dans une lettre longue d'une page:

"Maintenant, je peux me libérer du tourment mental que j'endure depuis si longtemps."

Avant ce début de dénouement, il a joué avec la police. Ainsi, dans la préface d'un roman publié en 2010 et par ailleurs intitulé Un secret coupable, il exprimait le désir d'écrire prochainement un roman sur une très belle femme de lettres chinoise coupable de plusieurs crimes atroces et ce, en toute impunité. Il avait même un titre: La belle écrivaine qui tuait.

Matraqués à mort

Liu Yongbiao aura eu moins de chance que son héroïne et les faits qui lui valent aujourd'hui à lui, comme à son complice présumé, de coucher en prison remontent à la nuit du 29 novembre 1995. Ce soir-là, deux hommes, et Liu est fortement soupçonné d'être l'un d'entre eux, s'introduisent dans une maison d'hôtes d'Huzhou, près de Shanghaï. Leur but est simple et tient du délit et non du crime: voler. Mais une victime résiste et leur plan déraille. Ils le tuent d'abord, sous les coups.

Puis, histoire de ne pas être menacés par d'éventuels témoignage, ils décident de faire place nette. C'est d'abord le couple de propriétaires qu'ils matraquent à mort, puis leur petit-fils de 13 ans.

L'enquête s'est alors vie enlisée. Un inspecteur a expliqué joliment à un média de Shanghaï, cité par le Guardian, la raison de cet échec:

"C'était une chose des plus difficiles. On a eu du mal à faire du lien." C'est finalement les recherches ADN, qui ont largement progressé depuis 1995, qui ont eu raison des mystères du dossier. Pour confondre, Liu Yongbiao et son acolyte présumé, les policiers n'ont pas ménagé leur peine, en compulsant 60.000 empreintes génétiques. De quoi peut-être nourrir encore une fois l'imagination fertile de Liu Yongbiao mais cette fois-ci, derrière la tranquillité des barreaux.

Robin Verner