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Rébellion de Wagner: les États-Unis au courant depuis deux semaines, selon des médias américains

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Les services de renseignement américains et occidentaux avaient identifié des "signaux" indiquant qu'une possible mutinerie était en préparation, depuis deux semaines, selon le Washington Post et CNN.

Washington était-il au courant? Les médias américains The Washington Post et CNN, réputés pour leur sérieux, assurent, dans des articles parus samedi, que les renseignements américains étaient informés depuis deux semaines de la mutinerie en préparation du groupe Wagner, débutée vendredi soir. Des informations transmises à la Maison Blanche, au Pentagone, au département d'État et au Congrès américain.

Accumulation d'armes et de munitions

Selon le Washington Post, les États-Unis ont vent de "signaux" indiquant qu'une possible rébellion est en préparation du côté du groupe Wagner dès la mi-juin, rapporte un responsable sous couvert d'anonymat. CNN assure que la milice stockait notamment des armes et des munitions ces derniers temps, semblant prévoir une action d'ampleur.

Pour autant, les renseignements américains ne savent alors pas encore exactement ce que prévoit Evguéni Prigojine dans le détail et quand il peut passer à l'action, selon le journal.

Tout au long de ces préparations, les Occidentaux choisissent de ne pas agir, afin d'éviter toute escalade du conflit avec l'intervention de puissances étrangères, selon CNN.

Une "grande inquiétude"

La perspective d'une mutinerie avait en amont de quoi susciter une "grande inquiétude" chez les Américains, selon le Washington Post. Parmi les scénarios les plus pessimistes, une rébellion entraînant une "guerre civile" en Russie fait partie des options sérieusement envisagées.

Finalement, la rébellion débute "très rapidement", confie à CNN une source proche des services de renseignement.

Difficile de savoir exactement depuis quand le patron de Wagner préparait son action, selon CNN. Si une source proche des services de renseignement occidentaux parle de plusieurs jours, une source indépendante pense que Prigojine a pu prendre sa décision au dernier moment, la ville de Rostov étant proche du front.

Un ordre de la Défense russe à l'origine de la rébellion?

D'après les Américains, la mutinerie menée par Wagner serait notamment nourrie par une annonce faite le 10 juin dernier par le Kremlin. À cette date, le ministère de la Défense russe ordonne à tous les volontaires mobilisés pour défendre Moscou de signer un contrat avec le gouvernement.

La décision vise, sans la nommer, la milice Wagner, ce groupe de mercenaires mobilisés pour défendre le Kremlin sans faire partie de l'armée régulière. Une façon donc de reprendre la main sur ces hommes, selon le quotidien. De quoi agacer Evguéni Prigojine, dont les troupes ont constitué une aide importante pour l'armée russe régulièrement victime de revers sur le front.

Déjà auteur de nombreuses sorties virulentes ces derniers mois visant le maître du Kremlin, le patron de Wagner suscitait déjà l'inquiétude à Moscou pour son franc-parler. Selon le Washington Post, des documents montrent que plusieurs hauts responsables russes évoquent clairement la question en privé.

"Les tensions entre le groupe Wagner et le ministère russe de la Défense ne sont pas un secret", déclare de son côté un haut responsable américain.

Poutine lui aussi au courant?

Le journal va même plus loin. Il affirme que Vladimir Poutine était potentiellement lui aussi au courant de la mutinerie en préparation et ce, "certainement" au moins "24 heures" avant qu'Evguéni Prigojine n'envoie ses hommes, d'après les renseignements américains.

Cette hypothèse expliquerait l'absence de réaction de la part de l'armée régulière russe lors de l'avancée des combattants de Wagner, prenant le contrôle de la ville de Rostov-sur-le-Don, puis gagnant Voronej, pour se diriger vers Moscou sans difficulté apparente.

Plusieurs membres des renseignements américains et d'autres pays occidentaux estiment également que le chef de Wagner pourrait par ailleurs avoir bénéfié du soutien de certains responsables au sein de l'armée et des services de sécurité russes, qui lui auraient permis d'avancer relativement librement.

Un échec pour Wagner?

Vingt-quatre heures après avoir débuté, l'opération lancée par Prigojine s'apparente à "un échec" pour un haut responsable des renseignements occidentaux. Pour autant, Vladimir pourrait sortir affaibli de cet épisode.

"Cela a probablement fait peur aux Russes ordinaires", estime un haut responsable américain.

Après s'être montré ferme lors de son allocution télévisée, accusant Evguéni Progojine de "trahison" et promettant une réponse "implacable", Vladimir Poutine a décidé samedi soir d'abandonner toute poursuite visant celui qu'on surnomme son "cuisinier", à condition qu'il s'exile en Biélorussie.

Juliette Desmonceaux