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"J'ai si peur": une femme de 37 ans, arrivée bébé aux États-Unis, expulsée au Laos, pays où elle n'a jamais vécu

Ma Yang, expulsée au Laos par les États-Unis, ici avec son compagnon Michael Bub, publié le 31 octobre 2014

Ma Yang, expulsée au Laos par les États-Unis, ici avec son compagnon Michael Bub, publié le 31 octobre 2014 - Facebook - michael.bub.7528

Ma Yang, une femme de 37 ans, mère de 5 enfants, a été expulsée au Laos, pays de ses parents et dont elle possède la nationalité, mais dans lequel elle n'est jamais allée.

Expulsée dans un pays où elle n'a jamais mis les pieds. Ma Yang, une femme de 37 ans mère de 5 enfants, a été expulsée au Laos, le pays de ses parents et dont elle possède la nationalité, après une condamnation dans une affaire de trafic de drogues. Un pays où elle n'a cependant jamais vécu.

"J'ai si peur", confie-t-elle à la chaîne de télévision américaine locale TMJ4 News, assurant "prier chaque jour pour pouvoir rentrer (aux États-Unis)".

Son histoire illustre le durcissement de la politique menée par l'administration de Donald Trump à l'égard de la population immigrée aux États-Unis.

Ma Yang naît dans un camp de réfugiés en Thaïlande, où avaient fui ses parents, membres du peuple Hmong, en raison de la guerre au Vietnam. Elle arrive avec sa famille sur le territoire américain alors qu'elle n'est âgée que de 8 mois, raconte le Milwaukee Journal Sentinel.

Aux États-Unis, elle construit sa vie, devient prothésiste ongulaire et réceptionniste dans un salon de manucure, et a 5 enfants, aujourd'hui âgés de 6 à 22 ans. Avec son compagnon de longue date, elle est par ailleurs propriétaire d'une maison à Milwaukee.

Condamnée dans une affaire de trafic de drogue

Si elle n'a pas la nationalité américaine, Ma Yang obtient une carte de résidente permanente à l'âge de 7 ans. Celle-ci est cependant révoquée lorsque la trentenaire plaide coupable pour trafic de drogue en 2022.

Inculpée, avec une vingtaine d'autres personnes, dans une affaire de trafic de marijuana, Ma Yang est suspectée d'avoir participer au décompte et à l'emballage d'argent liquide reçu dans le cadre de ces ventes.

Lors du procès, la mère de famille décide de plaider coupable et purge deux ans et demi de prison. Après coup, elle explique que son avocat lui avait assuré que plaider coupable ne risquait pas d'avoir de conséquences sur son statut de résidente aux États-Unis, mais l'inverse s'est produit.

Transférée ensuite dans un autre centre de détention, elle signe cette fois un document, sur les conseils d'un autre avocat, donnant son accord pour une expulsion des États-Unis. Elle assure cependant qu'elle ne croit pas à ce moment-là qu'elle sera véritablement envoyée au Laos.

Ses papiers confisqués

Mais en février dernier, Ma Yang est interpellée, après sa libération, lors d'un rendez-vous de routine. Elle est ensuite envoyée au Laos, où elle arrive le 6 mars. "Elle n'a pu prévenir personne avant de partir", dénonce sa fille de 22 ans, Azia.

Seul son compagnon a eu le droit de lui apporter quelques affaires essentielles et un peu d'argent avant qu'elle ne prenne l'avion. "J'ai crié dans la voiture pendant une demi-heure" au retour, a-t-il confié.

Interrogée par des responsables militaires à son arrivée au Laos, Ma Yang dit avoir ensuite été envoyée dans une résidence surveillée par des gardes. Elle n'a pas pu sortir ou contacter qui que ce soit durant 5 jours. Ses documents d'identité lui ont également été confisqués.

Diabétique et souffrant d'hypertension, elle n'a en plus pas accès à ses médicaments. Après presqu'une semaine passée cloîtrée dans la résidence, elle a simplement eu le droit d'acheter un téléphone pour parler à ses proches.

Pas de famille sur place

Ne possédant pas de famille ou d'amis sur place et ne parlant pas la langue, elle confie à la chaîne TMJ4 News être confrontée à "de nombreuses inconnues".

"Je ne sais pas ce que je vais faire (...). Je ne suis jamais venue dans ce pays", se désole-t-elle.

Si elle reconnaît sa culpabilité dans l'affaire de trafic de drogues, la trentenaire estime que la sanction qu'elle a subie est disproportionnée. "J'ai commis un crime. Je suis désolée. J'en ai payé le prix, mais n'oubliez pas que je suis toujours un être humain", clame-t-elle.

Juliette Desmonceaux