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Etats-Unis: hausse de la mortalité chez les Blancs d'âge moyen

La mortalité chez les Américains blancs d'âge moyen a largement augmenté ces quinze dernières années. (photo d'illustration)

La mortalité chez les Américains blancs d'âge moyen a largement augmenté ces quinze dernières années. (photo d'illustration) - Spencer Platt - Getty Images North America - AFP

Une étude américaine publiée lundi, et co-signée par le prix Nobel d'économie, pointe une forte hausse de la mortalité chez les Américains blancs d'âge moyen, ces quinze dernières années, principalement liée à un bond du taux de suicide, et à une augmentation de la consommation d'alcool et de drogue.

L'alcool, la drogue et les suicides font des ravages chez les Américains blancs d'âge moyen. Selon une étude publiée lundi par l'Académie américaine des Sciences (PNAS), relayée par Le Monde, la mortalité au sein de la population blanche la moins éduquée est en hausse outre-Atlantique. 

Un phénomène purement américain

Les auteurs de l'étude, deux économistes de l'université de Princeton, Angus Deaton, le prix Nobel d'économie 2015, et son épouse Anne Case, pointent que la mortalité au sein de la population américaine blanche et âgée de 45 à 55 ans connaît une ascension depuis 15 ans, alors même qu'elle était en déclin entre 1978 et 1998. 

La raison de cette inversion des courbes, qui s'observe surtout au sein des populations défavorisées? Essentiellement les abus d'alcool et de drogue, et les suicides. Une tendance propre aux Etats-Unis, qui ne s'observe pas dans d'autres pays occidentaux riches, comme la France ou l'Allemagne.

Un bilan comparable à l'hécatombe du sida

Les chiffres de cette mortalité sont d'ailleurs impressionnants. Selon les auteurs, il s'agit d'une véritable "hécatombe" avec un bilan comparable au nombre d'Américains qui ont succombé au sida, soit 658.000 au total depuis l'apparition de l'infection au début des années 1980.

Ainsi, entre 1999 et 2013, le nombre de décès chez les Blancs n'ayant pas fait d'études supérieures a connu une augmentation de 134 morts pour 100.000 individus. Si le taux des décès avait continué à diminuer ces quinze dernières années, il y aurait eu 488.500 décès de moins dans ce groupe de population, ont calculé les chercheurs.

Parallèlement, ce même taux de mortalité a baissé chez les populations du même âge au sein des minorités noires et hispaniques aux Etats-Unis. Toutefois, malgré cette hausse inédite, le taux de mortalité au sein de la population blanche, qui est actuellement de 415 décès pour 100.000 personnes, reste inférieur à celui de la population noire (581 décès pour 100.000 personnes), mais est très supérieur à celui de la population hispanique (262 décès pour 100.000 personnes). 

Drogue et alcool en première ligne

Bien que les taux de mortalité liés à la drogue, à l'alcool et aux suicides aient augmenté chez tous les Blancs d'âge moyen, l'accroissement le plus important a été constaté parmi ceux avec les niveaux d'études les moins élevés. 

Chez les individus blancs ayant seulement le baccalauréat ou moins, le taux de mortalité lié à la drogue et à l'alcool a quadruplé depuis quinze ans, allant jusqu'à dépasser ce même taux chez les Noirs, tandis que les suicides ont augmenté de 81%. Les décès provoqués par une maladie du foie et la cirrhose se sont accrus de 50% sur cette même période. Ainsi, la mortalité de toutes causes a grimpé de 22% depuis 1998 chez les Blancs d'âge moyen avec les niveaux d'étude les moins avancés et donc les plus vulnérables économiquement.

Dans ce groupe de population, les individus ayant fait un peu études supérieures, les taux de mortalité ont peu varié tandis que chez ceux avec un niveau licence ou davantage, la mortalité a poursuivi son recul.

Pourquoi une telle inversion des courbes?

Reste à savoir pourquoi le taux de suicide a bondi, et pourquoi la consommation d'alcool et de drogue, et les pathologies qu'elle entraîne, a augmenté chez les Américains blancs de 45-55 ans. 

Selon les chercheurs, les difficultés économiques et financières font partie des principaux facteurs explicatifs. Le revenu moyen des ménages parmi les Américains blancs d'âge moyen a commencé à nettement baisser à partir de la fin des années 1990. La stagnation des salaires qui a débuté avec le ralentissement économique des années 1970 a continué à frapper le plus durement les Américains qui n'ont pas fait d'études supérieures.

A cela s'ajoute l'incertitude grandissante quant aux retraites, de plus en plus soumises aux aléas des marchés financiers, et le fait que les Américains n'épargnent pas suffisamment.

Cette plus grande mortalité coïncide aussi avec des enquêtes auprès du public dans lesquelles depuis une quinzaine d'années les personnes interrogées font part d'un déclin de leur santé physique et mentale ainsi que de leurs difficultés grandissantes à faire face à la vie, surtout chez les Blancs d'âge moyen. L'étude constate également que deux fois plus de personnes en 2013 dans ce groupe de la population américaine disaient souffrir de douleurs chroniques et de dysfonctionnement hépatique, par rapport à 1999.

Adrienne Sigel, avec AFP