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"Un niveau critique": pourquoi la liberté de la presse recule encore aux États-Unis

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La liberté de la presse continue de reculer aux États-Unis, le pays passant de la 55e place à la 57e. La faute aux attaques de son nouveau président Donald Trump, mais pas seulement.

La liberté de la presse en recul aux États-Unis. Le pays est à la 57e place du classement de la liberté de la presse établi chaque année par l'ONG Reporters sans frontières (RSF) et dévoilée ce vendredi 2 mai pour son édition 2025.

Le pays recule de 2 places par rapport à l'année dernière et atteint son plus bas niveau depuis que RSF réalise ce classement. Par comparaison, la France se classe cette année 25e (-4 places).

Clayton Weimers, directeur du bureau américain de RSF, pointe une "longue dégringolade depuis dix ans", rappelant qu'en 2002, les États-Unis étaient classés 17e. "Nous avons vu un déclin sur tous nos indicateurs: contexte politique, cadre légal, contexte économique, contexte socioculturel et sécurité", indique-t-il à BFMTV.

Influenceurs à la Maison Blanche

Si le classement reflète la situation de 2024, l'entrée en fonction cette année de Donald Trump, qui qualifie les médias traditionnels de "fake news" (fausses nouvelles), risque d'aggraver la tendance.

"Les attaques politiques, en particulier venant du président Trump, ont atteint un niveau critique pour la liberté de la presse dans un pays où beaucoup d'Américains la considèrent comme acquis en raison du Premier amendement de la Constitution", poursuit Clayton Weimers.

En février, la Maison Blanche a restreint ses accès à l'Associated Press (AP), car la prestigieuse agence de presse américaine continue d'utiliser le terme Golfe du Mexique et non, comme l'exige le vocabulaire trumpien, celui de "Golfe de l'Amérique".

La présidence a, à l'inverse, invité au cœur du pouvoir les "nouveaux médias": des influenceurs pro-Trump qui ont désormais droit à leur propre briefing de presse.

"Il n'y aucun mal pour la Maison Blanche d'ouvrir ses conférences de presse à des voix plus diverses, mais ce n'est pas ce qui se passe. Ce qui se passe, c'est qu'ils amènent des commentateurs de droite radicale qui ne font pas du journalisme", dénonce Clayton Weimers.

"La tendance est à punir les médias qui posent des questions difficiles et qui refusent de suivre leur ligne et à récompenser ceux qui ne font qu'acquiescer à ce que dit la présidence", résume le directeur de RSF États-Unis.

Donald Trump a également lancé des attaques judiciaires contre la chaîne privée CBS (groupe Paramount) et fait plier ABC (groupe Disney), qui a versé 15 millions de dollars sous la menace d'un procès en diffamation.

"Ce sont des grands groupes qui ont des gros intérêts au-delà des médias et qui ont davantage tendance à plier face à Donald Trump car les médias ne sont pas leur secteur le plus rentable", pointe Clayton Weimers.

"Déserts de l'information"

Mais les assauts de Donald Trump contre les journalistes ne sont pas la seule raison du déclassement des États-Unis par RSF. L'ONG pointe aussi un climat de "récession économique" qui pèse sur la presse, notamment locale.

Du fait du déclin de la publicité sur papier et de la concurrence des informations en ligne et sur les réseaux sociaux, "on estime que deux journaux locaux ferment chaque semaine aux États-Unis", souligne Clayton Weimers.

"La disparition des titres locaux laisse derrière elle de vastes 'déserts de l’information'", déplore le directeur du bureau américain de RSF, qui y voit "un danger pour la démocratie".

L'administration Trump menace par ailleurs le financement des radios et télévisions publiques NPR et PBS, et veut mettre au silence les "voix" de l'Amérique à l'étranger, comme Voice of America, Radio Free Europe/Radio Liberty, ou Radio Free Asia.

François Blanchard