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"Nous commettons une erreur": des désaccords entre Vance et Trump révélés par la faille sur les frappes au Yémen

Donald Trump et JD Vance  à l'occasion du 23e anniversaire des attaques terroristes du 11 septembre 2001, au World Trade Center, le 11 septembre 2024 à New York.

Donald Trump et JD Vance à l'occasion du 23e anniversaire des attaques terroristes du 11 septembre 2001, au World Trade Center, le 11 septembre 2024 à New York. - Michael M. Santiago / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / Getty Images via AFP

Inclu dans une discussion menée par les principaux membres de l'administration Trump, le rédacteur en chef du magazine The Atlantic a pu constater qu'il existait bel et bien des divergences de vue entre le président et son numéro 2.

En étant ajouté par erreur à un groupe sur la messagerie Signal, le rédacteur en chef du magazine The Atlantic n'a pas seulement eu accès à des informations hautement confidentielles sur les frappes aériennes menées par les Américains et visant les Houthis au Yémen. Il a aussi pu constater que, derrière la façade publique de l'entente parfaite, il existait bel et bien des sujets de désaccord entre Donald Trump et son vice-président, J.D. Vance.

Comme Jeffrey Goldberg l'a raconté dans un article publié ce lundi 24 mars, l'histoire de cette incroyable faille de sécurité a commencé le 11 mars dernier par une prise de contact sur Signal de Mike Waltz, conseiller à la sécurité nationale de la Maison Blanche. Deux jours plus tard, le journaliste a été invité à rejoindre le groupe "Houthi PC small group'" (littéralement "Petit groupe PC Houthi") au sein duquel figuraient notamment le secrétaire d'État, Marco Rubio, le secrétaire à la Défense, Pete Hegseth, le patron de la CIA, John Ratcliffe, ou le vice-président, J.D. Vance.

Vance pointe "l'incohérence" de Trump

Le 15 mars, c'est ainsi que Jeffrey Goldberg a pu prendre connaissance du "plan d'attaque" des États-Unis contre les Houthis deux heures avant le déclenchement des frappes. Armes, cibles, horaires: Pete Hegseth n'est pas avare en détails.

Les messages échangés la veille dans le groupe de discussion sont tout aussi instructifs. À 8h16 ce matin-là, le compte "JD Vance" écrit ceci: "Je pense que nous faisons une erreur". L'erreur en question étant de frapper les Houthis du Yémen, groupe armé soutenu par l'Iran qui vise ici par des missiles Israël et qui s'efforce d'entraver le commerce maritime en mer Rouge en s'attaquant aux navires.

"3% du commerce américain passe par le canal de Suez. 40% du commerce européen y transite", souligne le vice-président. "Il existe un risque réel que l'opinion publique ne comprenne pas pourquoi (ces frappes) sont nécessaires. La principale raison de cette démarche est, comme l'a dit le président des États-Unis, d'envoyer un message."

Loin de s'arrêter à cette critique, J.D. Vance enfonce un peu plus le clou avec ce que Jeffrey Goldberg décrit comme une "déclaration remarquable". "Remarquable" compte tenu du fait qu'il n'a jamais publiquement remis en doute une prise de position du locataire du Bureau ovale depuis l'arrivée du duo il y a deux mois.

"Je ne suis pas sûr que le président soit conscient de l'incohérence (de ces frappes) avec son message actuel sur l'Europe", ajoute Vance. "Il existe un risque supplémentaire d'une flambée modérée à conséquente des prix du pétrole. Je suis prêt à soutenir le consensus de l'équipe et à garder ces inquiétudes pour moi. Mais il existe de solides arguments pour retarder cette décision d'un mois, pour faire le point sur l'importance de cette question, pour suivre l'évolution de l'économie."

"Je déteste tirer l'Europe d'affaire une fois de plus"

Quelques minutes plus tard, Pete Hegseth dit "comprendre les inquiétudes" de J.D. Vance et assure qu'il "soutient complètement" le fait de les évoquer avec POTUS (le président des États-Unis, ndlr). Tout en justifiant les frappes en préparation. "À la demande du président, nous travaillons avec le département de la Défense et le département d’État pour déterminer comment compiler les coûts associés (à l'intervention des Etats-Unis) et les facturer aux Européens", embraie Mike Waltz.

J.D. Vance se résigne à 8h45 avec un message adressé à Pete Hegseth: "Si tu penses que nous devrions le faire, allons-y. C'est simplement que je déteste tirer l'Europe d'affaire une fois de plus." Pete Hegseth ne saurait être plus en accord sur ce point avec le vice-président. Il écrit "partager sa répugnance pour le parasitisme des Européens", qu'il juge "PATHÉTIQUE". "Mais Mike a raison", poursuit-il immédiatement. "Nous sommes les seuls sur cette planète à pouvoir (rétablir la navigation en mer Rouge)."

Très critique de Donald Trump pendant des années avant de s'inscrire complètement dans son sillage, J.D. Vance aurait donc de réelles divergences de vue avec le président. Selon son porte-parole, il ne faudrait toutefois pas monter en épingle les révélations de The Atlantic. "Le vice-président Vance soutient sans aucune équivoque la politique étrangère de cette administration", a indiqué au magazine William Martin. "Le président et le vice-président ont eu des échanges ultérieurs sur cette question et sont en parfait accord."

Vincent Gautier