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Comment Donald Trump défend sa légende

Donald Trump est-il un génie du business? (cérémonie d'ouverture du casino Taj Mahal à Atlantic City)

Donald Trump est-il un génie du business? (cérémonie d'ouverture du casino Taj Mahal à Atlantic City) - Bill Swersey - AFP

Ses pressions sur les journalistes, les doutes sur le montant réel de sa fortune, les échecs spectaculaires de certains de ses projets: les équipes de Grand Angle ont enquêté sur la face cachée de l'empire Trump.

Donald Trump a fait de sa réputation de winner son principal slogan de campagne. Mais si le milliardaire de 69 ans aime parler de sa fortune, il n'apprécie pas que les autres s'y intéressent de trop près et mettent à mal la légende.

À la fin des années 1980, Libby Handros a enquêté sur le sujet. 25 ans plus tard, son film sur Donald Trump n’a toujours pas trouvé de diffuseur.

"À chaque personne interviewée, on finissait par cette question: quelle est la réelle fortune de Trump. Ça lui est revenu aux oreilles et il est devenu furax. Donald Trump est allé voir toutes les chaînes, tous les distributeurs, les réseaux indépendants et il leur a dit: 'ce film là, si vous l’achetez, je vous colle un procès'", explique à BFMTV la productrice de Trump: what's the deal.

Dans le film, désormais visible sur internet, l’équipe de Libby Handros a entre autres révélé les conditions dans lesquelles la Trump Tower, a été construite. Plus de 200 travailleurs sans papiers ont été embauchés, payés un tiers du salaire minimum, et travaillant dans des conditions difficiles pour élever cette tour au sommet de laquelle s'élève le penthouse où il vit désormais en plein coeur de Manhattan.

L’équipe de Libby Handros a entre autres révélé les conditions dans lesquelles a été construite la Trump Tower.
L’équipe de Libby Handros a entre autres révélé les conditions dans lesquelles a été construite la Trump Tower. © BFMTV

La fortune du paternel mise de côté

Mais surtout, le film démonte le mythe que Donald Trump entretient: celui d’un brillant self made man ne devant sa fortune qu’à son flair et à son talent.

"Son père avait énormément d’argent et son père avait énormément de liens politiques. Et donc il n’est que la seconde génération, il s’est appuyé sur ce que son père avait déjà fait et les portes étaient déjà ouvertes pour lui, et ce n’est pas du tout un self made man parti de rien, il a commencé complètement privilégié!", raconte Libby Handros.

Les yeux plus gros que le ventre

Donald Trump est devenu milliardaire en profitant du boom de l’immobilier dans les années 1970 et 1980. Mais l’ampleur réelle de sa fortune fait débat. Dans un communiqué publié au lancement de sa campagne, il revendique, en lettres capitales, une fortune supérieure à dix milliards de dollars.

Le très sérieux magazine Forbes a passé au peigne fin 168 sources de revenus, plus de 30 biens immobiliers ou parcours de golf. Résultat: ils évaluent la fortune de Trump à 4,5 milliards de dollars, moins de la moitié de ce qu’il revendique.

Jennifer Wang et ses collègues du magazine Forbes ont passé au peigne fin 168 sources de revenus.
Jennifer Wang et ses collègues du magazine Forbes ont passé au peigne fin 168 sources de revenus. © BFMTV

"Il croit que ses actifs, ses terrains, ses immeubles, valent davantage. Nous, nous avons parlé avec des experts pour savoir à quel prix des biens similaires se vendaient. C’est là-dessus qu’on se base. Après, s’il croit pouvoir vendre ses biens le double de ce que les experts évaluent, parce ce qu’il pense qu’ils ont quelque chose de spécial, tant mieux pour lui", répond Jennifer Wang, journaliste à Forbes.

Persuadé que son simple nom a une valeur inestimable

Donald Trump est persuadé que son simple nom a une valeur inestimable. Il n’est pourtant pas toujours synonyme de succès. Et ses adversaires politiques ne se privent pas de le rappeler.

"Qu’est-il donc arrivé à Trump Airlines? Et l’université Trump? Et le magazine Trump? Et la vodka Trump? Et les steaks Trump? Et les emprunts Trump? Non, il n’est pas un génie du business!", se délectait le républicain Mitt Romney en mars dernier.

Marvin Roffman avait prédit l’échec de Trump à Atlantic City, il l'a payé cher.
Marvin Roffman avait prédit l’échec de Trump à Atlantic City, il l'a payé cher. © BFTMV

Gros flop à Atlantic City

Toutes ces sociétés ont aujourd’hui disparu. Mais l’échec le plus retentissant de Donald Trump, ce sont ses casinos à Atlantic City. Au milieu des années 1980, Trump et d’autres rêvaient de faire de cette station balnéaire à 3 heures de New York le Las Vegas de la côte est. Aujourd’hui, la ville est au bord du dépôt de bilan et ressemble à une ville fantôme. Inauguré en 1990, le Taj Mahal est alors, selon les mots de Trump, le plus grand casino jamais construit. Mais sa “huitième merveille du monde” est un gouffre financier” qu'il a fini par vendre en 2015.

En avril 1990, Marvin Roffman était l’analyste le plus réputé du monde du jeu. Quand dans une interview au Wall Street Journal, il prédit l’échec de Trump à Atlantic City, le milliardaire est furieux. Il envoie immédiatement une lettre à l’employeur de Marvin et demande sa tête. Sinon, il attaquera violemment en justice. L’employeur cède devant les avocats de Trump.

"Trump se moque de savoir s’il gagne ou s'il perd, mais ses menaces découragent beaucoup de monde de le critiquer. Parce que aller au combat contre quelqu’un qui a les poches si profondes ça peut facilement vous coûter un million de dollars", explique Marvin Roffman à BFMTV devant le casino de Trump, désert.

Le boulet de la Trump University

Une affaire pourrait bien perturber sa course vers la nomination : celle de la Trump University.
Une affaire pourrait bien perturber sa course vers la nomination : celle de la Trump University. © BFMTV

Si Trump menace souvent de poursuites ceux qui s’opposent à lui, il n’est pas lui-même à l’abri de la justice. Et il y a une affaire qui pourrait bien perturber sa course vers l'investiture: celle de la Trump University. Lancée en 2004, elle promettait à quiconque de connaître le succès et la réussite grâce à ses bons conseils.

Gary Smith rêvait de devenir le futur Donald Trump en apprenant à investir dans l’immobilier. Après avoir suivi un séminaire de trois jours pour 1.500$, il se laisse convaincre par le programme gold. 35.000$ pour bénéficier des conseils d’un investisseur choisi par Trump.

"Avec le label Trump, ils vous promettaient qu’en 90 jours, vous alliez faire un retour sur investissement de 205%, ça me paraissait crédible, je ne pensais pas que c’était une arnaque, à ce moment-là, regrette Gary Smith. Le mentoring, en fait c’était juste un appel téléphonique par semaine, le formateur gérait des centaines d’autres étudiants, et il ne se souvenait pas de ce que vous vous étiez dit la semaine précédente."

Le procès pour tromperie pourrait bien se tenir avant l’été et venir perturber la fin de campagne de Donald Trump. Mais en attendant, ces affaires ne semblent pas vraiment nuire à son image: il est toujours en tête des sondages dans les primaires décisives du mois à venir.
Gary Spith a déboursé 35.000 dollars pour bénéficier des conseils d’un investisseur choisi par Trump.
Gary Spith a déboursé 35.000 dollars pour bénéficier des conseils d’un investisseur choisi par Trump. © BFMTV
K. L avec Quentin Baulier et Sophie Herbé