Où en est la situation à Fukushima?

A Fukushima, la radioactivité peut varier très fortement - -
A chaque jour son lot de mauvaises nouvelles à Fukushima. De l’eau contaminée continue de se déverser dans le Pacifique. La situation s’améliore-t-elle? Que peuvent faire les autorités japonaises? Le retour des habitants sur place est-il possible? BFMTV.com revient sur les événements récents à Fukushima.
> 300 tonnes d'eau radioactive ont fui
"La situation sur place est difficile", assure Jérôme Joly, directeur général adjoint à l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) Depuis les événements du 11 mars 2011 et la catastrophe nucléaire de Fukushima, les autorités japonaises et Tepco (la compagnie qui gère la centrale) tentent de réduire au maximum leurs effets sur l’environnement.
Seulement, les nouvelles inquiétantes semblent se multiplier ces derniers jours. Le 19 août, un réservoir a laissé s’échapper 300 tonnes d’eau radioactive, de l'eau qui s'est répandue en flaques et dans le sol de la centrale japonaise accidentée.
Selon Tepco, 30.000 milliards de becquerels de césium et strontium radioactifs auraient coulé dans l’océan Pacifique depuis mai 2011 avec l’eau souterraine contaminée enfouie au pied des réacteurs.
> Tepco vérifie la fiabilité des réservoirs
L'eau qui s'échappe sert à l’origine au refroidissement des réacteurs endommagés, explique Jérôme Joly. Dans un document, l’IRSN explique que "cette eau s’écoule ensuite dans les sous-sols des bâtiments d’où elle est reprise pour être traitée et réutilisée pour le refroidissement des cœurs".
L’eau traitée, qui est partiellement débarrassée de certains éléments radioactifs, n’est cependant pas toujours réutilisée. "Chaque jour, Tepco pompe 700 tonnes d’eau. 400 sont réinjectées dans les réacteurs, 300 sont stockées", explique le directeur général.
C’est un des réservoirs nécessaires à ce stockage qui a laissé s’échapper l’eau découverte le 19 août dernier. En tout, estime Jérôme Joly, un "petit millier de réservoirs de ce type" sont présents à Fukushima.
Selon l’IRSN, "le contexte particulièrement difficile n’a pas permis à Tepco d’installer et d’exploiter ces entreposages d’eaux sans rencontrer ponctuellement des problèmes d’étanchéité". Ces doutes ont été confirmés par Tepco, qui a annoncé jeudi vérifier leur fiabilité.
> Ce que les autorités doivent améliorer
"Tepco a besoin de mettre en place une station de traitement des effluents avec de meilleures pratiques d’épuration", estime Jérôme Joly. Les Japonais doivent pouvoir, une fois l’eau décontaminée, pouvoir la rejeter en milieu naturel. "Tant qu’ils n’auront pas ça, cela ne marchera pas", estime le directeur général.
Selon lui, les autorités nippones ont une deuxième obligation. Elles doivent limiter la "pénétration des nappes phréatiques – qui sont comme un fleuve sous terre - dans les bâtiments". L’eau qui pénètre dans les bâtiments pollués est à son tour contaminée. Pour lutter contre ce phénomène, il faut pomper l’eau des nappes phréatiques. "Il faut donc obtenir des autorisations de rejet, mais il y a des oppositions locales."
Enfin, il faut que Tepco rende à nouveau étanches les bâtiments: "Il faut trouver les fuites, mais cela est très dur. L’accès aux lieux concernés n’est possible que pour les robots, en raison de la trop grande radioactivité."
> La pêche à nouveau arrêtée
Devant l’ampleur des nouvelles annonces de rejet dans l’océan, les pêcheurs de la préfecture de Fukushima ont annoncé mercredi que la pêche au large de la ville japonaise sera de nouveau arrêtée début septembre. Celle-ci avait pourtant été relancée partiellement début juin.
Malgré cette décision, il est difficile d'affirmer que la situation s'est détériorée ces derniers mois. "Depuis le début des rejets, en avril 2011, ceux-ci sont tellement importants qu’en comparaison les nouveaux incidents sont limités", déclare Jérôme Joly. Tepco a cependant trouvé en juillet une zone très radioactive en bordure de mer (plus d’informations dans ce document).
> Pas de retour prévu dans la zone la plus sinistrée avant longtemps
Le gouvernement japonais envisage de rendre possible le retour des populations dans les zones les moins touchées. "La radioactivité y est plus élevée par rapport à d’autres endroits, mais elle reste comparable à l’irradiation naturelle que l’on peut rencontrer à Madagascar ou [dans certaines régions de]Chine", assure Jérôme Joly.
Cette décision, qui revient aux habitants, n’est plus seulement scientifique, selon le directeur général adjoint. Elle est aussi sociétale: "Les jeunes en provenance de zones rurales ont déjà refait leur vie dans les villes où ils ont été déplacés." Seules les personnes âgées semblent vouloir retourner dans leurs régions d’origine. Pour cela, il faut reconstruire un "tissu médical et économique": "les acteurs de ces secteurs ne reviendront que s’ils trouvent un marché prêt à les accueillir", analyse Jérôme Joly.
Concernant les zones les plus polluées, les plus "proches du site" sinistré, "un retour des habitants semble impossible à court terme", conclut le membre de l’IRSN.