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Société

Vers la création d'un fichier national des emprunteurs

Le montant moyen d’un dossier de surendettement en France s’élève à plus de 40 000 euros.

Le montant moyen d’un dossier de surendettement en France s’élève à plus de 40 000 euros. - -

Le ministère de l'Economie a lancé mardi une consultation publique sur la création en France d'un "fichier positif" des emprunteurs, un outil controversé dont les partisans estiment qu'il sera utile pour la lutte contre le surendettement.

Ce mardi, le ministre de l'Economie, François Baroin, a lancé une consultation publique sur la création en France d'un fichier dans lequel les organismes financier pourraient avoir accès au détail du ou des différents emprunts contractés par chaque particulier. Un outil controversé dont les partisans estiment qu'il sera utile pour la lutte contre le surendettement.

Cette consultation sera ouverte jusqu'au 15 septembre. 

25 millions de Français détenteurs d'un ou plusieurs crédits

Le rapport estime que la création de ce nouveau fichier, qui recenserait les quelque 25 millions de Français détenteurs d'un ou plusieurs crédits (prêt immobilier, crédit à la consommation, crédit auto...). ainsi que les montants de ceux-ci, devra passer par la loi et que, techniquement, sa mise en place prendra deux ans.

Ce répertoire des emprunteurs existe déjà dans de très nombreux pays (Belgique, Allemagne, Pays-Bas...) Pour l'instant, en France, les banques ou les établissements de crédits n'ont accès qu'au Fichier de la Banque de France qui regroupe les particuliers ayant eu des problèmes de remboursements de leurs crédits ou ceux qui ont déposé un dossier de surendettement.

Si ce fichier est mis en place, le changement, ce sera au moment de contracter un nouveau prêt. Le banquier ou l'organisme de crédit demandera la fiche individuelle de l'emprunteur à la Banque de France et il saura si ce dernier a déjà d'autres prêts à rembourser.

Chacun aura également accès à ces données personnelles, c'est d'ailleurs la crainte de certaines associations de consommateurs. Par exemple, l'UFC Que Choisir a peur que les propriétaires nous demandent ces informations pour pouvoir louer un logement, même si c'est illégal.

« Cela éviterait qu’on tombe dans la spirale du crédit »

Maëlle Bernier est directrice de la communication d'Empruntis.com (Empruntis fait l'intermédiaire entre les emprunteurs et les organismes financiers, pour tous types de crédits - Ndlr). Pour elle, ce fichier « c'est la seule et unique arme qu'on a pour lutter efficacement contre le surendettement. Aujourd'hui, Sofinco ne peut pas vérifier que vous n'avez pas de crédit chez Cetelem. Ce fichier, il inscrirait pour Mr X, le nombre de crédit et ce qui lui reste à rembourser. Et cela éviterait qu'on tombe dans la spirale du crédit qui rembourse un autre crédit et du surendettement. Donc effectivement on peut discuter sans cesse de la liberté individuelle et d'être ficher dans un fichier sur ses crédits. Mais la vraie question c'est : est-ce qu'on va au-delà de cela et est-ce qu'on protège les gens, en fait un peu contre eux-mêmes ».

« Les données seront très partielles »

Pierre-Alexandre Teulié est secrétaire général de Carrefour et membre du Comité qui vient de remettre ce rapport (il représentait la Fédération du Commerce et de la Distribution au sein du Comité - Ndlr). Carrefour propose des crédits à la consommation à ses clients, pourtant, Pierre-Alexandre Teulié est pour ce fichier parce que « quand quelqu'un tombe dans le surendettement, dans tous les cas ce serait un client perdu pour tout le monde. Soyons clairs, les données seront très partielles. Ça vous donnera le nombre de crédit et l'endettement de cette personne. Ça veut dire que si vous, parce que votre crédit immobilier est très important, parce qu'en plus vous vous êtes endetté pour votre voiture, parce que vous vous êtes déjà endettés pour acheter un salon, je crois que vous seriez content que votre commerçant vous demande si vous êtes vraiment sûr que c'est une très bonne idée de pousser plus loin l'endettement ».

« Il n’y a que l’Afghanistan et l’Ouzbékistan qui n’en n’ont pas »

Jean-Louis Kiehl est président de la Fédération Crésus, une association qui accompagne les ménages surendettés. Pour lui, ce fichier qui existe déjà dans de nombreux pays, apporte des résultats : « Ça marche partout, il n'y a que l'Afghanistan et l'Ouzbékistan qui n'enont pas. Le montant moyen d'un dossier de surendettement, vous connaissez ce montant ? En France, plus de 40 000 euros, il n'est que de 15 000 euros en Belgique. Grâce au registre des crédits, ce scandale peut être mis en analogie avec le Mediator qui est un médicament dangereux sur lequel tout le monde a fermé les yeux. Eh bien le rapport c'est que l'on sait que l'absence de registre des crédits est dangereuse. On connait le drame, vous savez qu'il y a eu des suicides et on ne fait rien pour empêcher ça. Je mettrai un cierge à la cathédrale de Strasbourg pour que cette fois-ci on y arrive ».

La Rédaction avec Yann Abback