BFMTV
Société

Un an après, la baisse de la tva dans la restauration passe mal

Un an après sa coûteuse mise en oeuvre, la baisse de la TVA à 5,5% dans la restauration, plus efficace sur l'emploi que sur l'addition, suscite la controverse jusqu'au sein du gouvernement en ces temps de disette budgétaire. /Photo d'archives/REUTERS/Jack

Un an après sa coûteuse mise en oeuvre, la baisse de la TVA à 5,5% dans la restauration, plus efficace sur l'emploi que sur l'addition, suscite la controverse jusqu'au sein du gouvernement en ces temps de disette budgétaire. /Photo d'archives/REUTERS/Jack - -

par Elizabeth Pineau PARIS (Reuters) - Les restaurateurs français ont-ils tenu leurs promesses ? Un an après sa coûteuse mise en oeuvre, la baisse de...

par Elizabeth Pineau

PARIS (Reuters) - Les restaurateurs français ont-ils tenu leurs promesses ?

Un an après sa coûteuse mise en oeuvre, la baisse de la TVA à 5,5% dans la restauration, plus efficace sur l'emploi que sur l'addition, suscite la controverse jusqu'au sein du gouvernement en ces temps de disette budgétaire.

Mesure promise par Jacques Chirac puis Nicolas Sarkozy, obtenue après sept années de négociations auprès de la Commission européenne, elle n'a cessé de faire polémique depuis sa mise en place, le 1er juillet 2009.

Défendue bec et ongles par les professionnels et le secrétaire d'Etat au Commerce, Hervé Novelli, qui mettent en avant un "bon bilan" en terme d'emploi, elle est jugée trop chère pour ses détracteurs - 2,4 milliards d'euros par an.

La dernière critique d'importance est venue du ministre du Budget lui-même.

"C'est une très très grosse niche fiscale (...) Si on me laissait faire, je la mettrais sous le coup de rabot", a dit François Baroin dimanche.

Il modère toutefois ses propos mercredi dans Le Parisien-Aujourd'hui en France, renvoyant à la prochaine campagne présidentielle le débat sur son éventuelle remise en cause. La baisse est jugée "légitime sur le fond" par la ministre de l'Economie, Christine Lagarde.

"NE PAS CHANGER LES RÈGLES EN COURS DE MATCH"

Didier Chenet, président du Syndicat national des hôteliers, restaurateurs, cafetiers et traiteurs (Synhorcat) "n'imagine pas un seul instant qu'on puisse changer les règles en cours de match".

"Qu'on nous juge à la fin", a-t-il dit à Reuters, ajoutant qu'il comprenait les doutes des consommateurs "dans la mesure où nous avons mal expliqué les limites de la baisse des prix".

Moins d'un restaurateur sur deux a, en effet, joué le jeu d'une baisse des tarifs d'au moins 11,8% sur une partie de la carte, qui devait se traduire au total par une baisse de 3%.

Au final, selon l'Insee, la baisse toutes prestations confondues a été de 1,41% dans les restaurants et de 0,95% dans les cafés depuis un an.

Une tendance confirmée par une enquête de l'UFC-Que Choisir portant sur 1.544 lieux de restauration dans 62 départements.

"En règle générale, la moitié des établissements n'ont pas modifié leurs prix, un tiers a appliqué une baisse et les autres ont augmenté leurs prix", notent les auteurs du rapport.

Selon le secrétariat d'Etat au Commerce, l'impact réel de la baisse de la TVA a été de 2,5% "en tenant compte de la baisse des prix et de l'absence d'augmentation des prix qui aurait dû se produire".

"Au total, ce sont près de 875 millions d'euros qui auront été rétrocédés au consommateur", a fait valoir Hervé Novelli.

L'opinion n'a retenu, elle, que des additions toujours aussi salées.

Selon un sondage publié début juin dans La Tribune, 61% des Français sont favorables au retour au taux de TVA de 19,6% dans un contexte d'économies budgétaires.

"HOLD-UP ANNUEL DE TROIS MILLIARDS"

Xavier Denamur, un restaurateur parisien très mobilisé contre la baisse de la TVA, dénonce dans un communiqué un "hold-up annuel à trois milliards d'euros".

"Allez-vous au restaurant pour un écart de prix de 1% ? Pensez-vous que le débat sur les retraites a un sens quand on retire trois milliards d'euros par an aux ressources de l'Etat?", s'interroge ce professionnel, qui déplore que rien n'ait été prévu pour améliorer la qualité des produits servis.

Pour la CGT, "les résultats liés à la baisse de la TVA sont pour le moins contestables". "Ce n'est pas d'un coup de rabot mais d'une meilleure gestion et d'une véritable analyse des résultats dont cette mesure devrait faire l'objet", écrit le syndicat dans un communiqué.

Outre une baisse des prix, la profession avait pris l'engagement de créer 40.000 emplois en deux ans, dont 20.000 pérennes, tout en améliorant la situation des salariés.

Sur ces deux points, le contrat est rempli, a assuré mercredi Hervé Novelli.

Au total, 21.700 emplois ont été créés entre juillet 2009 et fin mars 2010. L'"effet TVA" a aussi fait reculer de 17% le nombre de défaillances d'entreprises dans ce secteur touché de plein fouet par la crise.

Hervé Novelli a en outre salué la signature, en décembre dernier, d'un accord permettant de redistribuer un milliard d'euros aux salariés sous forme de hausses de salaires, de primes et de jours de congés supplémentaires.

"Il n'y a plus de smicard dans le secteur. C'est comme ça qu'il est attractif", dit Didier Chenet à propos d'une profession toujours en déficit de main-d'oeuvre, premier recruteur national en 2010 selon Pôle Emploi.

Selon le baromètre Atout France publié le 13 avril, 34% des restaurateurs envisagent de recruter du personnel permanent dans les 12 prochains mois, contre 22% l'an dernier à la même époque.

Edité par Sophie Louet