Recherche sur l'embryon humain : vers une légalisation encadrée ?

L'Assemblée examine ce jeudi une proposition de loi qui autorise, de manière encadrée, la recherche sur les embryons et les cellules souches. - -
Ses défenseurs en espèrent des vertus thérapeutiques, ses opposants dénoncent des tripatouillages génétiques. La recherche sur les embryons et les cellules souches va être facilitée. L'Assemblée a débuté ce jeudi l'examen d'une proposition de loi (des Radicaux de gauche) qui autorise, de manière encadrée, la recherche sur les embryons et les cellules souches. Le texte a déjà été adopté au Sénat dans une certaine discrétion, en décembre dernier, et doit maintenant être définitivement validé par les députés.
Depuis 2004, la recherche sur l'embryon et les cellules souches est interdite en France, sauf dérogations. En 2011, à l'occasion de la révision des lois sur la bioéthique, le Parlement a reconduit ce régime d'interdiction. Résultat : grâce aux dérogations, 36 équipes françaises effectuent aujourd’hui des recherches sur les cellules souches embryonnaires humaines.
Mettre fin à « une hypocrisie »
Un système hypocrite, selon le Professeur Philippe Ménasché, chirurgien cardiaque à l’hôpital Georges Pompidou à Paris : « La loi interdit la recherche sur l'embryon et les cellules souches embryonnaires, mais s'empresse de l'autoriser par dérogation. Il y a là une situation complètement incompréhensible, pour ne pas dire effroyablement hypocrite », a-t-il dénoncé jeudi matin à Jean-Jacques Bourdin, sur RMC.
Le nouveau texte présenté à l’Assemblée va donc autoriser la recherche, à quatre conditions : le projet devra être « scientifiquement pertinent », avoir « une finalité médicale », « respecter des garanties éthiques » et « ne pouvoir être conduit qu'avec des embryons humains ».
Un coup des lobbies pharmaceutiques ?
Si le projet de loi vise à clarifier la situation, la recherche sur les embryons humains et les cellules souches continue de diviser. Les élus UMP défendront d’ailleurs en séance près de « 300 amendements », a dit le député de la Manche Philippe Gosselin, pour qui ce texte s'attaque « à des fondements de notre société ». Le député UMP des Alpes Maritimes, Jean Leonetti, également cardiologue de sa profession est l’ancien rapporteur de la loi bioéthique de 2011, voit lui, la main des lobbies pharmaceutiques derrière cette loi : « Si je caricature à peine, ça veut dire que l'embryon peut être objet. Et donc objet de recherche, sans qu'il y ait obligatoirement des précautions. Ce sont les lobbies pharmaceutiques, les laboratoires, qui poussent à la recherche sur l'embryon et qui ont envie d'investir financièrement. Donc on a bien compris, l'autorisation est utile pour que l'embryon soit objet de recherche au niveau industriel, poussé en cela par des lobbies financiers ».
« On ne demande pas à faire n'importe quoi »
« On ne demande pas à faire n'importe quoi, rétorque sur RMC le professeur Jean-Philippe Wolf, chef du service de biologie de la reproduction de l'hôpital Cochin, à Paris. On demande à avoir des protocoles supervisés par l'Agence de biomédecine de manière à ce que les choses se fassent en toute transparence ». Lui est favorable à la recherche sur les embryons et les cellules souches embryonnaires : « Ce qui est valable chez la souris ne sera pas forcément valable chez les humains à un moment donné. Par exemple, il n'y a pas de trisomie 21 chez les souris et si on veut savoir pourquoi il y en a parfois chez l'humain, si on veut savoir comment les prévenir, et bien il faut pouvoir étudier l'embryon humain ».