Pérec : « Donner des responsabilités aux Guadeloupéens »

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Quel est votre sentiment sur la situation aux Antilles ?
On a le sentiment d'être laissé de côté. On se sent largué. Ca fait quatre semaines que ça dure. Pendant deux semaines, on n'a pas du tout parlé de ce qui se passait à la Guadeloupe. Ensuite, le Président a pris la parole, mais il n'a rien dit sur la Guadeloupe. Les Guadeloupéens attendaient quelque chose. Ils étaient suspendus à leurs postes de télévision.
Que demandent les Guadeloupéens ?
Lorsqu'on voit que le kilo de banane en provenance de Guadeloupe coûte beaucoup plus cher qu'en métropole, c'est qu'il y a un problème. Il faut régler ce problème assez rapidement. Il y a déjà eu un mort. On ne peut pas laisser la situation se dégrader comme ça. La Guadeloupe a des voisins. Pourquoi ne nous laisse-t-on pas nous ouvrir vers eux ? On pourrait faire du commerce dans les Caraïbes. Il y a beaucoup de choses à développer. Il ne faut pas nous forcer à regarder toujours vers la France. Il faut donner des responsabilités aux Guadeloupéens. Là-bas, tous les postes importants sont occupés par des gens en provenance de métropole. Où sont nos cadres, nos penseurs ? Il y a du monde. Les gens sont compétents.
La situation s'est-elle beaucoup dégradée ces dernières années ?
Ça a toujours été comme ça. Aujourd'hui, c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. 1% de la population de békés contrôle toute l'économie de la Guadeloupe et de la Martinique. On ne peut pas continuer comme ça. Je suis très remontée. J'ai été trois fois championne olympique, parce que j'avais envie qu'on nous regarde autrement, qu'on sache qu'on est là et qu'on est capable de faire quelque chose.
Sur place, les Guadeloupéens ont-ils peur de la situation ?
Il y a des tensions extrêmes. Les gens veulent trouver un terrain d'entente assez rapidement sinon, ça va exploser. Ca va être la guerre civile et on n'a pas besoin de ça. Comme tous les Guadeloupéens, j'ai envie que ça s'arrête et qu'on trouve une solution.
La Guadeloupe attend beaucoup du gouvernement...
Ca fait quand même un mois... Pendant les deux premières semaines, les Antillais de métropole étaient au courant de ce qui se passait, par le biais de leurs familles. Mais la presse ne s'en est jamais préoccupée. C'est malheureux. On est un département français. Il y a souvent eu des grèves en Guadeloupe, mais elles n'ont jamais été prises au sérieux. On a l'impression d'être méprisé. Les revendications sont justes. On demande que les choses soient correctes, que les gens puissent s'acheter une baguette de pain, vivre correctement. Lorsqu'un fonctionnaire est muté en Guadeloupe, son salaire augmente de 40 %. Les gens savent que la vie est beaucoup plus chère là-bas.