Passage à l'heure d'été: pourquoi n'a-t-on toujours pas supprimé le changement d'heure?

Un drapeau de l'UE flotte au vent devant la Tour Elizabeth et le Palais de Westminster, les Chambres du Parlement, dans le centre de Londres, le 1er mars 2023. - Justin TALLIS / AFP
Ce week-end, dans la nuit du samedi 29 au dimanche 30 mars, les Français ont dû avancer leur montre d'une heure pour passer à l'heure d'été. Instauré en 1975, ce traditionnel changement d'heure, qui survient toujours le dernier dimanche de mars, fait suite au choc pétrolier de 1973-1974.
Les pays européens, confrontés à la flambée des prix du pétrole, ont trouvé une solution simple pour faire des économies: avancer ou reculer l'horloge d'une heure suivant la saison. De cette façon, les heures d’activités quotidiennes pouvaient correspondre aux heures d’ensoleillement et les Français utilisaient, de fait, moins l'éclairage artificiel.
Un dispositif obsolète?
Un demi-siècle plus tard, les habitudes de consommation des Français ont considérablement changé, notamment avec l'arrivée de l'éclairage basse consommation. En 2017, le Service de recherche du Parlement européen (EPRS) jugeait d'ailleurs marginales les économies d’énergie réalisées grâce au changement d'heure. Si bien que la pratique est de plus en plus contestée.
Selon le résultat de la consultation publique lancée par la Commission européenne en 2018, concernant l'avenir du changement d'heure dans l'Union européenne, 84% des Européens sont favorables à sa suppression.
L'année suivante, en 2019, c'était au tour de l'Assemblée nationale de consulter l'avis des Français. Sur 2 millions de votants, 83,71% s'étaient prononcés pour mettre fin au changement d’heure. 36,97% des répondants avaient choisi de toujours rester à l’heure d’hiver, tandis que 59,17% préféraient rester à l’heure d’été. Mais alors, pourquoi ne l'a-t-on toujours pas supprimé?
Un projet présenté par la Commission européenne
En septembre 2018, la Commission européenne avait proposé une directive devant mettre fin aux changements d’heure saisonniers. Le texte prévoyait que chaque État membre de l'Union européenne décide s'il veut rester de façon permanente à l'heure d'été ou à l'heure d'hiver.
La Commission avait invité toutefois les États à prendre leur décision "avec intelligence" afin d'éviter un "patchwork" d'horaires, précise le gouvernement. L'important était que l'application de l'heure d'été dans certains pays ou de l'heure d'hiver dans d'autres ne perturbe pas le fonctionnement du marché intérieur.
Pour que la directive de la Commission soit adoptée, elle devait encore passer devant le Parlement, puis le Conseil européens. En mars 2019, une première étape avait été franchie puisque le Parlement s'était bien prononcé en faveur de la fin du changement d'heure, avec 410 voix pour et 192 contre, mais pour une application en 2021.
Seul problème, depuis le 2 décembre 2019, la directive de la Commission est toujours bloquée au Conseil, indique le groupement d’intérêt économique, "Toute l’Europe". Si le texte devait être adopté fin 2020, puis transposé par les États membres, la crise du Covid-19 et les négociations sur le Brexit ont considérablement chamboulé le planning.
L'examen du texte ajourné
En raison des événements, l'examen de la directive par le Conseil européen avait donc été ajourné. “C’est logique que la question du changement d’heure n’ait pas été une priorité", avait déclaré l’ancien eurodéputé Johan Danielsson, qui avait hérité du dossier au mois de février 2020, au groupe "Toute l’Europe".
Aujourd'hui, le texte sur la fin du changement d'heure ne semble plus être à l’ordre du jour. Si la directive entrait finalement en vigueur, les Européens restent partagés sur l'heure définitive à adopter.
Selon la consultation réalisée par la Commission en 2018, 56% des citoyens européens sont favorables à “l’heure d’été permanente” contre 32% optent pour celle d’hiver (et 12 % se disent “sans opinion”).
Au sein des pays membres, la plus forte proportion de répondants en faveur de l’heure d’été permanente se trouve au Portugal (79 %), à Chypre (73 %) ou en Pologne (72 %), tandis que celle en faveur de l’heure d’hiver permanente se trouve en Finlande (48 %), au Danemark (46 %) et aux Pays-Bas (45 %).