Montpellier: la mémoire de 19 travailleurs indochinois sortie de l'oubli

Devoir de mémoire au nom des combattants indochinois. Une plaque à la mémoire de 19 travailleurs indochinois, dont les corps avaient été enterrés anonymement en 1947 à Montpellier, sous un monument aux combattants indochinois de la Première Guerre mondiale, a été dévoilée ce lundi matin. Cette plaque, portant 19 noms, est un moyen de "reconnaître et rendre hommage à leur engagement au service de la France", a déclaré Lorraine Acquier, adjointe du maire de Montpellier Philippe Saurel, lors d'une cérémonie au cimetière Saint-Lazare.
Des hommes enfin sortis de l'oubli
"C'est un jour important", a déclaré Juliette, âgée de 88 ans, veuve de Tan Nguyen, né en 1920 et venu travailler en métropole. "Mon mari, décédé il y a trois ans, a longtemps milité pour que ces hommes soient sortis de l'oubli. Je suis ici pour eux et pour lui." Leurs corps ont été enterrés collectivement sous ce monument en 1947", a expliqué Pierre Daum, auteur d'un livre de référence sur le sujet ("Immigrés de force, les travailleurs indochinois en France 1939-52", Actes Sud, 2009).
Bloqués en France par le blocus maritime britannique
En septembre 1939, les autorités françaises avaient recruté, souvent de force, quelque 20.000 paysans d'Indochine (alors territoire colonisé par les Français) pour les faire travailler en métropole dans les usines d'armement. Si quelque 4.500 d'entre eux sont renvoyés en Indochine après la défaite de juin 1940, la plupart de ces travailleurs devront rester en métropole, coincés par le blocus maritime britannique qui interdit le passage des bateaux français vers l'Orient.
Une main d'oeuvre exploitée dans des camps de travail
Quelque 15.000 de ces Indochinois seront donc envoyés en zone sud et internés dans une dizaine de "camps de travailleurs indochinois", notamment à Marseille, Agde ou Toulouse. Ces camps étaient dirigés par des officiers français de l'armée coloniale. Les internés y subissaient brimades, coups et racisme. Ils dépendaient également du service de la Main d'oeuvre indigène du ministère du Travail qui, jusqu'en 1948, en pleine guerre d'Indochine (1946-1954) loue la force de travail de ces Indochinois à des sociétés publiques et privées, en touchant l'argent lié à ces transactions, tandis que ces ouvriers ne toucheront jamais un quelconque salaire.
En 1942, environ 500 d'entre eux furent notamment employés en Camargue pour y relancer, avec succès, la riziculture.