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Lutte antijihadiste: "Les moyens ne sont pas suffisants", prévient l'avocat Daniel Fellous

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Maître Daniel Fellous, avocat spécialisé sur la question du jihad, a détaillé lundi sur BFMTV les causes qui mènent à la matérialisation de la menace jihadiste en France: manque de moyens alloués à la police et à la justice, isolement social de certains jeunes des banlieues, et freins juridiques.

De nombreux terroristes étaient connus des services antiterroristes mais étaient à chaque fois parvenus à passer entre les mailles du filet. L'arsenal législatif en France est-il insuffisant pour lutter contre le jihadisme ?

Ce n'est pas qu'il est insuffisant, c'est que les moyens donnés à la justice ou à la police ne sont pas suffisants par rapport à l'ampleur du nombre de potentiels jihadistes. J'ai déjà évoqué le chiffre de 20.000 jihadistes potentiels, alors qu'il n'y a pas suffisamment d'informateurs, pas suffisamment de policiers pour aller véritablement en profondeur et arrêter, appréhender les candidats au jihad.

Selon les témoignages que l'on a de l'entourage des terroristes, c'étaient des jeunes qui, avant, avaient une vie tout à fait normale. Pourquoi tout à coup détestent-ils à ce point notre civilisation, et tout simplement le fait de sortir un vendredi soir pour voir un spectacle?

Il y a d'abord un conditionnement mis en place par certains imams radicaux, qui vont pousser leur emprise sur ces jeunes. Au fur et à mesure, ils vont commencer par détester l'ordre, d'une manière générale. Puis ils vont détester la société française dans son ensemble, avec la composante laïque. Et évidemment l'autre versant: certains n'ont souvent pas de travail, d'autres, un petit passé judiciaire, ce qui fait qu'il est de plus en plus difficile pour eux de trouver un travail. Et c'est cet isolement qui entraîne les conséquences que l'on a, de plus en plus, aujourd'hui.

On voit prospérer les salafistes dans les quartiers, Malek Boutih lui-même tirait la sonnette d'alarme dans un rapport remis avant l'été à Manuel Valls, rapport qui a été enterré. Aujourd'hui Bernard Cazeneuve dit vouloir fermer les mosquées salafistes les plus radicales. Pourquoi avoir autant tardé à agir?

D'abord, nous sommes dans un pays démocratique, où les cultes sont tout à fait permis. Il est difficile de pouvoir interdire une action qui serait susceptible d'entraîner des infractions, de fermer préalablement, comme une fermeture administrative. C'est assez difficile d'un point de vue juridique. J'ai eu à défendre un imam qui parlait de lapidation. Il a été interpellé et expulsé, simplement la cour d'appel a infirmé ce qui avait été décidé en première instance et il a pu revenir sur le territoire français.