Loi Travail et Nuit Debout: qui sont les casseurs en marge des manifestations?

213 interpellations ont donc été réalisées en marge des quelques 210 cortèges ayant défilé le jeudi 28 avril contre la loi travail en France. Dans la soirée, 24 personnes ont été mises en garde à vue pour des violences commises au moment où gendarmes et CRS évacuaient la place de la République conformément à l’expiration de l’autorisation du rassemblement Nuit Debout, fixée à minuit.
Dans les différents cortèges une minorité de casseurs que les forces de l'odre trouvent néanmoins très bien organisés. Lors d’une conférence de presse tenue au soir du 28 avril, Michel Cadot, préfet de police de Paris, a évalué le nombre de "casseurs organisés" à 300 durant les manifestations contre le projet de loi El Khomri.
Et d’après ses déclarations, il s’agit d’un mouvement structuré:
"Ils se sont cagoulés, ils se sont masqués, ils ont revêtus de manière un peu dispersée des k-ways puis ensuite se sont regroupés. Ils ont une technique qui se met au point pour enlever des pavés, pour récupérer du goudron, le stocker dans des sacs à dos, dans des poubelles pour les transporter. Et ensuite attaquer les forces de l'ordre au moment où ils le souhaitent."
Changement de stratégie
Ces militants adoptent aussi des techniques très variées pour se protéger des répliques des forces de l’ordre: certains lèvent à bout de bras des bouches d’égout en guise de bouclier. A Nantes, où 39 personnes ont été interpellées le 28 avril, la police assure que des tentes sont même disposées sur le trajet du défilé, à côté du cortège. Le stratagème est le suivant: les casseurs pénètrent sous la tente pour enlever casque et cagoule, se changer puis se fondre dans la foule.
Un enquêteur, interrogé par Le Parisien, note que leur position au sein des manifestations tend à évoluer à mesure que la contestation contre la réforme, qui entre en discussion à l’Assemblée nationale le 3 mai, s’installe dans la durée:
"Avant, ces casseurs se glissaient en queue de cortège et attendaient la fin de la manifestation pour faire dégénérer les choses. Aujourd’hui, ils se positionnent très rapidement en tête de manifestation pour s’en prendre aux policiers ou aux gendarmes."
Il avance que la raison de ce basculement de l’arrière vers l’avant pourrait s’expliquer par un "essoufflement" du mouvement social en cours.
"Ultragauche", "Black Blocs", "autonomes": un activisme protéiforme
L’identité des auteurs de violences lors des dernières manifestations est compliquée à établir. Cette difficulté provient de la nature informelle des collectifs, sans chef ni structure, dont ils relèvent. Une expression anglaise générique s’est imposée pour évoquer ces groupes activistes: les Black Blocs. Internationaux, ils agrègent souvent des individus venus de pays étrangers, comme le Royaume-Uni ou les Pays-Bas.
Les Black Blocs sont liés à la nébuleuse de l’ultragauche. Pour un haut-fonctionnaire il s'agit surtout de "mouvance contestataire radicale". "Ce vocable, plus juste que celui d’ultragauche dont on ne sait plus vraiment le sens, regroupe aussi bien des membres des anarcho-autonomes, des antifascistes, des libertaires, des zadistes que des précaires, des sympathisants squatteurs", explique-t-il au Parisien.
Paris mais aussi Nantes ou Rennes
L’exemple du 28 avril dans l’ouest de la France montre que ces violences sont loin d’être une particularité parisienne. A Rennes, où 22 interpellations ont été opérées selon les chiffres de la préfecture, des militants autonomes, casqués ou encagoulés, en possession de boucliers en mousse masqués dans des banderoles ont voulu atteindre le centre-ville pourtant interdit au cortège.
A l’aide de grappins, ils ont essayé en vain de passer outre les hautes grilles mises en place ici par la police finissant par jeter des pierres, des bouteilles en verre, des pavés ou encore des bombes agricoles sur les CRS.
Contactée par BFMTV.com, la préfecture d’Ille-et-Vilaine confirme l’ampleur du phénomène dans la cité bretonne.