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"Imaginez un immense chaudron": le chef des pompiers raconte l'incendie de Lubrizol à Rouen

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"Un immense chaudron rempli de pétrole qui brûle", l'eau qui vient à manquer, un feu qui "avance comme une coulée de lave": un responsable des pompiers a raconté comment les soldats du feu avaient vécu l'incendie.

Pour lui, la lutte contre ce feu "hors norme" "a dépassé tout ce qu'(il pouvait) imaginer": Jean-Yves Lagalle, directeur du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) de Seine-Maritime a raconté ce mercredi à l'Assemblée nationale, l'incendie du 26 septembre, à l'usine Lubrizol à Rouen.

Les pompiers sont prévenus à 2h39 par une entreprise voisine. Une minute plus tard, l'opérateur appelle la société Lubrizol. "Il a au bout du fil le gardien qui, a priori n'a pas encore idée de ce qui se passe dans l'établissement mais a une alarme déclenchée", a expliqué Jean-Yves Lagalle devant la mission d'information de l'Assemblée nationale sur cette catastrophe.

"Presque comme une coulée de lave"

"Les premiers engins engagés se présentent à 02h52 sur place. Les équipes sont confrontés à un violent feu qui prend très, très vite de l'ampleur. (...) Au départ on est confronté à un feu d'hydrocarbure qui fait énormément de fumée noire", poursuit le colonel. 

"C'est un feu de liquide inflammable mais non contenu c'est-à-dire en circulation libre (...) une sorte de mini vague d'hydrocarbures qui s'avance de proche en proche un peu comme une coulée de lave", précise l'officier.

Des moyens spécialisés sont nécessaires pour endiguer le feu. Cette "difficulté opérationnelle va nécessiter trois replis successifs, parce que la vague, il était impossible de la contenir". En outre "pendant ce temps là aussi il y a d'énormes explosions, des fûts qui explosent", poursuit Jean-Yves Lagalle.

"Imaginez ce feu, c'est un immense chaudron, rempli de pétrole ça brûle, ça fume, les fumées noires montent à 400 m", résume l'officier.

Un feu "hors norme par ses dimensions"

Le feu est également "hors norme par ses dimensions puisque très vite on atteint pratiquement dans l'usine Lubrizol 3 hectares de produits inflammables qui brûlent, 7.000 m2 sur l'usine voisine. On sait qu'au niveau national sur un feu hydrocarbure dans un dépôt au-delà de 5.000 m2 c'est quasi infaisable", ajoute le colonel.

"C'est pour ça que la solidarité nationale a joué. J'ai très rapidement appelé Paris", précise l'officier. "A 4h15 du matin, le réseau incendie interne tombe, y a plus d'eau, il n'y a plus de munitions au bout de nos fusils. Fort heureusement on avait encore des poteaux sur la voie publique", continue Jean-Yves Lagalle. Et la Seine n'était pas loin pour y puiser de l'eau.

"Cette guerre, on a fini par la gagner"

Mais "au départ on est assez démuni" dans un environnement de surcroît "assez compliqué qui aurait pu générer des effets dominos majeurs" sur le site ou les entreprises voisines. "Des actions majeures ont été faites au départ par les employés de Lubrizol qui ont fait évacuer tout le stock de pentasulfure de phosphore, qui l'ont mis à l'abri. Si le feu avait pris dans ce stockage, on avait un drame".

"Cette guerre on a fini par la gagner. Les gens à chaque instant ont risqué leur vie pour sauver la vôtre", rappelé le colonel. Le feu a été maîtrisé le 26 à la mi journée. 800 pompiers auront été mobilisés le jour de l'incendie et les suivants.
M.D. avec AFP