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Société

Franchises médicales : La taxe santé

les franchises médicales, une mesure phare pour la santé en 2008

les franchises médicales, une mesure phare pour la santé en 2008 - -

Mesures phares de la politique de santé pour 2008, les franchises médicales mobilisent l’énergie du gouvernement. Et concentrent les critiques.

Axe majeur du Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS 2008), le principe d’une taxe plafonnée sur les médicaments, les actes paramédicaux et les transports sanitaires est actuellement au cœur des débats. Dans l’esprit de Nicolas Sarkozy et de Roselyne Bachelot, ministre de la Santé, cette mesure doit permettre de réduire le trou de la Sécu, de financer la recherche contre Alzheimer, le cancer ou encore d’améliorer la prise en charge des soins palliatifs. La mise en place est prévue pour 2008… si le gouvernement évite les écueils contestataires. Car du côté des médecins et du grand public, l’opposition s’organise. Roselyne Bachelot, a déjà reçu une lettre pétition signée d’un millier de médecins hospitaliers. Christian Lehmann, membre du collectif « Appel contre la Franchise Sarkozy » qui organise ce week-end des réunions d’information dans 45 villes en France, nous donne ici son point de vue.

1. L’origine : une volonté du candidat Sarkozy
Conformément aux orientations du président de la République lors de sa campagne, les franchises sont inscrites dans le projet de loi de financement de la Sécurité Sociale de 2008. Elles ont vocation, selon la Ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, « à protéger les plus malades » et à financer les investissements consacrés à la lutte contre la maladie d’Alzheimer, le développement des soins palliatifs et la recherche contre le cancer.
L’avis de Christian Lehmann : « Les franchises médicales, cest une proposition de Nicolas Sarkozy qu’il porte depuis très longtemps, depuis 2000. Dans son livre Libre, il considère la franchise médicale comme un moyen indispensable d’assurer l’absence de déficit de l’assurance maladie. Mais le but n’est pas d’apurer les comptes de la Sécurité Sociale, c’est de marteler dans l’esprit des gens, jusqu’à ce que ça rentre vraiment, que le système d’assurance maladie solidaire né de la résistance de 1945, n’est plus vivable aujourd’hui. »

2. Le principe : Un effort de solidarité
Selon le gouvernement, l’effort de solidarité sera de 50 centimes d’euros par boite de médicament et par acte paramédical et de 2 euros par transport sanitaire. Le montant des franchises ne pourra excéder un plafond global de 50 euros par an. Les assurances complémentaires pourront prendre en charge le montant de la franchise. Afin de préserver la situation des plus fragiles, cette mesure prévoit que : en sont exonérés, les bénéficiaires de la couverture maladie universelle complémentaire (CMU), les enfants mineurs et les femmes enceintes dont la situation reste ainsi inchangée. Au total, selon la Ministre « 15 millions de nos concitoyens en seront exonérés ! »
L’avis de Christian Lehmann : « Les franchises seront plafonnées dans un premier temps, à 50 euros par an et par assuré. Mais à terme, elles augmenteront. Sarkozy l’avait annoncé d’emblée, il avait dit cela pendant la campagne électorale. Ces franchises, une fois mises en place, pourraient avoir vocation à grandir, pour combler le trou de la Sécurité Sociale s’il persistait. Si on accepte le principe des franchises, on commence par 50 euros. Mais ensuite ça ira en augmentant ! »

3. Les chiffres : un gain de 850 millions d’euros
Un tel effort de la part des malades devraient rapporter près de 850 millions d’euros à l’Etat. Une manne conséquente pour lutter comme annoncé contre la Maladie d’Alzheimer, le Cancer et le développement des soins palliatifs.
L’avis de Christian Lehmann : « Le gain « avancé » de 850 millions d’euros est selon moi utopique. Il y a déjà eu un forfait de 18 euros pour tout acte médical de plus de 91 euros (fibroscopie, IRM, examens radiologiques…) et jusqu’à présent la Sécurité Sociale n’a pas été capable de les récupérer. Ils ont été prélevés, mais ils ne sont pas encore arrivés dans les caisses de la Sécu. Parce que le programme informatique ne suit pas. »

4. Les objectifs : ordonnances en baisse, qualité des soins en hausse
90 % des consultations se terminent par une ordonnance, soit le double du taux observé chez certains de nos voisins européens. Constat que Roselyne Bachelot souhaite voir changer : « je souhaite que la prescription soit plus efficace et que les soins gagnent en qualité. »
L’avis de Christian Lehmann : « Oui, il y a un problème de prescription mais le problème c’est que le gouvernement a, vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique, un double discours constant et très ambiguë. Le gouvernement n’a rien fait pour aider à la formation indépendante des médecins. On a détruit tout ce qui pouvait aider les médecins à améliorer leurs prescriptions. On voulait une information indépendante. On a cassé un fond qui se nommait le FOPIM (Fonds de Promotion de l’Information Médicale). Aujourd’hui rien n’est mis en place pour former les médecins. »

5. Le point sensible : les laboratoires pharmaceutiques
Après un fort ralentissement en 2006, les dépenses de médicaments sont reparties assez fortement à la hausse cette année. Elles devraient croître d’environ 3,5 % en 2007. Cette évolution justifie une prolongation de « la responsabilisation de l’industrie des produits de santé ». En clair, la taxe sur le chiffre d’affaire des laboratoires va passer à 1% à partir de 2008 (soir environ 230 millions d’euros). Créée en 2004, cette taxe est collectée au profit de l’assurance maladie.
L’avis de Christian Lehmann : « Les firmes pharmaceutiques représentent des sommes colossales aux niveaux des investissements. Pour la France, c’est un partenaire financier énorme. On sait très bien que l’information (ndlr : sur les produits) qu’ils délivrent aux médecins n’est pas toujours de qualité optimale et encore je suis poli quand je dis ça. Dans le même temps, on n’ose pas trop les frapper. Il y a toujours ce double jeu. Si le gouvernement taxe les industries pharmaceutiques, c’est qu’il sait quelque part que le jeu est faussé. »

6. La prochaine étape : réforme de la Santé
La solution pour le Gouvernement, en plus de responsabiliser tous les acteurs de la Santé (malades, médecins et entreprises pharmaceutiques s’inscrit dans le long terme). Il faut à terme réduire le trou de la Sécurité Sociale. La franchise s’inscrit dans une logique de stabilisation les finances d’un tel pôle. Ensuite viendra la question d’une réforme en profondeur de l’organisation de la Santé en France.
L’avis Christian Lehmann : « La solution passerait par une vraie refonte du système de santé, comme dans certains pays, avec un investissement massif sur les soins de premiers recours, ne serait ce que pour délester l’hôpital. 80% des personnes qui arrivent aux urgences ne sont pas de vraies urgences. A un moment, les malades ne savent plus où aller. Il y a des refus de soins aux plus faibles surtout ceux qui ont la CMU. Les urgences croulent sous les appels car l’hôpital semble être le dernier recours. En Angleterre, les médecins généralistes ne travaillent pas du tout comme en France, (individuellement) mais en clinique de plusieurs médecins avec du personnel administratif et infirmiers. Au final la santé coûte moins cher.

La conclusion de Christian Lehmann 

« C’est une entourloupe. Ces franchises sont injustes socialement parce qu’elles pénalisent ceux qui sont déjà malades, accidentés, ou handicapés. Une réorganisation est encore possible à condition que le pouvoir politique ne soit pas seulement dans des effets d’annonces volontaristes, mais avec une réelle envie de sauvegarder un système social français. Récemment par exemple Philippe Seguin, qui n’est pourtant pas un proche de José Bové, expliquait que si on taxait les stocks options comme on taxe le salaire de tout à chacun, on gagnerait 3.5 milliards ! »

Journée contre la Franchise Médicale, samedi 29 Septembre.

A Paris, gymnase Japy de 13h à 18h.

Des réunions dans 45 autres villes en France

Tous le programme :

www.appelcontrelafranchise.org/signer.php

Stanislas Bertin