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Société

Feu vert sous conditions pour les crèches de Noël dans les mairies

Scène de la Nativité à Luceram, dans le sud-est de la France, le 21 décembre 2015

Scène de la Nativité à Luceram, dans le sud-est de la France, le 21 décembre 2015 - Jean-Christophe Magnenet - AFP

Le Conseil d'État a tranché: les crèches de Noël pourront être installées dans les bâtiments publics. Mais à conditions. La plus haute juridiction administrative avait été saisie après plusieurs polémiques et des décisions de justice contradictoires sur le sujet.

Feu vert pour les crèches de Noël. Le Conseil d'État a tranché ce mercredi et a mis fin à la polémique sur la présence de scènes de la Nativité dans les bâtiments publics. Cette autorisation de la plus haute juridiction administrative reste cependant soumise à plusieurs conditions, comme le recommandait le rapporteur public.

"Un caractère culturel, artistique ou festif"

"En raison de la pluralité de significations des crèches de Noël, qui présentent un caractère religieux mais sont aussi des éléments des décorations profanes installées pour les fêtes de fin d'année, le Conseil d'État juge que leur installation temporaire à l'initiative d'une personne publique, dans un emplacement public, est légale si elle présente un caractère culturel, artistique ou festif", déclarent les sages.

Le Conseil d'État fait la distinction entre bâtiments et emplacements publics. Pour une installation dans l'enceinte des bâtiments, "une crèche de Noël ne peut pas être installée, sauf si des circonstances particulières montrent que cette installation présente un caractère culturel, artistique ou festif" et répond à une coutume locale. Concernant les lieux publics, "l'installation d'une crèche de Noël est légale, sauf si elle constitue un acte de prosélytisme ou de revendication d'une opinion religieuse". Ce qui implique un règlement au cas par cas.

La plus haute juridiction administrative devait répondre à cette question:

"Une crèche de Noël est-elle un signe ou emblème religieux dont l'installation dans un bâtiment ou emplacement public est systématiquement interdite par les dispositions de la loi du 9 décembre 1905 garantissant le respect du principe de laïcité?"

Un "élément du décorum" de Noël

"Non, mais..." avait déjà répondu le 21 octobre le rapporteur publique Aurélie Bretonneau devant l'assemblée du contentieux, la plus prestigieuse formation du Conseil d'État. Elle avait rejeté toute "interdiction systématique" des crèches au nom de la neutralité s'imposant aux pouvoirs publics. Pour elle, ces représentations de la Nativité ont connu une "déconnexion progressive" de leur "substrat religieux" pour devenir un "élément du décorum" de Noël.

Mais elle avait souligné qu'en aucun cas l'installation d'une crèche ne pouvait être "un geste de reconnaissance d'un culte", accompagné de prières ou de discours des élus locaux "prônant la réinscription de Noël dans la tradition catholique". Consciente que "le fait religieux suscite de nouvelles crispations" dans un pays confronté à une menace jihadiste maximale, elle avait aussi averti: "à vouloir trop scrupuleusement traquer le religieux derrière la tradition festive ou le folklore", le Conseil d'État risque "d'attiser des soupçons ou des controverses" qu'il lui "appartient plutôt d'apaiser".

Un coup d'arrêt aux arrêtés anti-burkini

Sur un plan strictement juridique, la plus haute juridiction administrative a cassé les deux arrêts contradictoires dont elle était saisie. La cour d'appel administrative de Paris avait interdit l'installation d'une crèche dans la mairie de Melun en Seine-et-Marne et la cour d'appel administrative de Nantes avait quant à elle autorisé le conseil général de Vendée à en monter une.

"Dans la première affaire, il juge que l'installation de crèche litigieuse méconnaissait le principe de neutralité. Il renvoie la seconde affaire à la cour administrative d'appel de Nantes, afin qu'elle se prononce sur l'ensemble des éléments à prendre en compte."

C'est la deuxième fois depuis l'été que l'institution doit trancher une question touchant à la laïcité. Fin août, elle avait mis un coup d'arrêt aux arrêtés anti-burkini pris par plusieurs communes de bord de mer. Dans une décision saluée par les associations de défense des droits de l'homme, il avait estimé que les maires ne pouvaient interdire ces tenues de bain couvrantes portées par certaines femmes musulmanes, sauf en cas de risques "avérés" pour l'ordre public.

Céline Hussonnois-Alaya avec AFP et Cécile Danré