"Je veux pouvoir continuer mes études": leur master est supprimé cinq jours avant la rentrée universitaire

Un amphithéâtre de l'Université de Rouen-Normandie à Mont-Saint-Aignan en octobre 2017 (photo d'illustration) - Charly Triballeau-AFP
"On est mi-septembre et je suis sans formation pour la rentrée qui est déjà bien entamée." Rose* était pourtant admise dans un master 1 droit du tourisme et des transports à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Mais le 27 août dernier, soit cinq jours avant la pré-rentrée, elle apprend par mail que le master est supprimé.
La jeune femme de 21 ans, qui veut devenir avocate, est désespérée. "C'est la fin de mon monde", s'alarme-t-elle auprès de BFMTV. "Je viens d'avoir ma licence, j'ai un projet professionnel et tout s'arrête d'un coup parce qu'on me refuse une place en master. C'est très dur."
"Jamais je n'aurai pensé que ce serait possible de se retrouver sans rien en septembre."
Comme Rose, une vingtaine d'étudiants et d'étudiantes ont découvert fin août que le master dans lequel ils et elles pensaient être admis n'existait plus. Le nœud de l'affaire: la procédure de recrutement et d'admission des candidats et candidates pour ce master qui s'est faite par mail et non via Mon master, la plateforme nationale qui permet de candidater aux formations qui conduisent à ce diplôme.
"Dans le mail, l'université nous écrit que comme tout s'est fait par mail, nos admissions sont 'nulles et non avenues'", cite Sohane, une autre étudiante dans la même situation.
"Ça ne tient pas"
Le master 1 droit du tourisme et des transports "n'a pas été fermé", assure l'université à BFMTV. "Il devait ouvrir pour la première fois à la rentrée universitaire 2025 et n'a pas pu l'être en raison du nombre insuffisant d'étudiants valablement admis après avoir candidaté sur la plateforme Mon master."
À l'issue de la phase principale (le 13 juin), la formation a reçu un nombre "a priori" suffisant de candidatures, explique l'université. Elle n'a donc pas été ouverte en phase complémentaire (du 17 juin au 17 juillet). "C'est lors de la vérification du respect des critères administratifs et des prérequis académiques en juillet, après la clôture des différentes phases de candidatures sur Mon master et selon la procédure habituelle, que le nombre d'inscrits s'est révélé insuffisant puisque six candidats seulement étaient inscrits."
Pourtant, courant août, deux annonces ont été publiées sur la page Linkedin du master signalant qu'il restait encore des places et appelant les étudiants et étudiantes à envoyer leur candidature par mail. Les annonces étaient encore en ligne ce mardi.

"Si la formation était complète en phase principale, pourquoi la directrice du master a publié des annonces sur Linkedin pour inviter les étudiants à postuler?" s'interroge pour BFMTV Lenna, co-secrétaire générale du Sap1, un syndicat étudiant de Paris 1 membre de l'Union étudiante. La jeune femme n'est pas convaincue par la réponse de l'université.
"Et quelques jours avant la rentrée, l'université aurait découvert que 14 étudiants n'avaient pas validé leur licence ou avaient un problème administratif? Ça ne tient pas."
"Je n'ai pas de solution"
L'université ajoute que "des réorientations ont évidemment été proposées aux étudiants concernés". Mais pas à tous. Sohane, qui témoignait plus haut, s'est ainsi vue refuser un reclassement. "C'était le plan A, je n'ai pas de solution." La jeune femme a perdu ses droits étudiants et a dû prendre un travail à plein temps comme assistante d'éducation dans un collège. "Mais je ne vais pas perdre un an, s'affole-t-elle. Je veux pouvoir continuer mes études."
Car cette étudiante francilienne de 22 ans souhaite devenir avocate en droit des affaires internationales. "C'était le master parfait", explique la jeune femme. "Il touchait à toutes les spécialités qui me plaisent: le droit international, le droit public et le droit des affaires." Mais faute de master, son avenir est en suspens. Elle a formulé plusieurs recours, notamment auprès du recteur, pour l'heure restés vains.
"Les explications qu'on nous donne sont contradictoires", déplore encore Lenna, du Sap1. "On n'arrive pas à comprendre ce qui a motivé cette non-ouverture. Mais le résultat, c'est qu'on a des milliers d'étudiants et d'étudiantes qui n'ont pas de place en master."
L'année dernière, près de 15% des candidats et candidates n'ont pas reçu de proposition de formation via la plateforme Mon master. Ce qui représente 27.000 étudiants et étudiantes.
"Qu'est-ce que je vais faire?"
Naya* est elle aussi une des déçues de ce master, elle qui avait repris espoir après avoir vu ses 15 vœux en phase principale et dix vœux en phase complémentaire refusés. Elle n'a pas non plus reçu de proposition de réorientation de la part de l'université.
"L'administration a refusé de nous reclasser parce qu'on n'était pas passé par Mon master, mais on nous a demandé de postuler par mail", se désespère-t-elle. "J'ai essayé de trouver un autre master dans une autre université, mais je ne me prends que des refus."
"Qu'est-ce que je vais faire? Je ne peux même pas faire de stage pendant l'année à venir puisque je n'ai pas d'université."
Sans compter qu'elle a dû affronter une déconvenue supplémentaire: la jeune femme a perdu sa bourse, n'ayant pu s'inscrire et fournir de preuve de son inscription administrative.
Toutes vivent très mal l'idée de devoir perdre un an. Mais elles s'y préparent et sont d'ores-et-déjà inquiètes. "Je vais reformuler des vœux pour un master l'année prochaine", se résigne Rose, interrogée au début de l'article. "Mais je ne serai plus étudiante, donc je ne serai pas prioritaire. Et je n'ai déjà pas eu l'impression d'avoir été prioritaire cette année."
*Le prénom a été changé à la demande du témoin.