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Deux juges français au rwanda pour élucider le début du génocide

Débris du Falcon 50 du président rwandais Juvénal Habyarimana, près de son ancienne résidence à Kigali. Deux juges d'instruction français se rendent ce samedi au Rwanda pour reprendre l'enquête sur l'attentat qui a coûté la vie au chef d'Etat, événement d

Débris du Falcon 50 du président rwandais Juvénal Habyarimana, près de son ancienne résidence à Kigali. Deux juges d'instruction français se rendent ce samedi au Rwanda pour reprendre l'enquête sur l'attentat qui a coûté la vie au chef d'Etat, événement d - -

par Thierry Lévêque PARIS (Reuters) - Deux juges d'instruction français se rendent ce samedi au Rwanda pour reprendre l'enquête sur l'événement...

par Thierry Lévêque

PARIS (Reuters) - Deux juges d'instruction français se rendent ce samedi au Rwanda pour reprendre l'enquête sur l'événement déclencheur du génocide rwandais de 1994, l'attentat qui a coûté la vie au président Juvénal Habyarimana.

Les juges Marc Trévidic et Nathalie Poux devaient être accompagnés de cinq experts, d'un magistrat du parquet, de deux policiers, des avocats des victimes françaises de l'attentat et des avocats de neuf proches de l'actuel président rwandais Paul Kagamé, poursuivis dans le dossier, dit-on de source judiciaire.

C'est la première fois que des magistrats indépendants vont tenter de faire la lumière sur cet événement toujours mystérieux qui a précédé l'un des plus grands génocides du XXe siècle, le massacre de 800.000 personnes, pour la plupart des Tutsi.

L'avion du président Juvénal Habyarimana, un Hutu, avait été abattu par des missiles sol-air à son atterrissage à Kigali. Onze autres personnes avaient été tuées dans l'attentat, dont quatre membres d'équipage français.

Les massacres avaient commencé juste après, selon un plan organisé. Etats et historiens se divisent toujours sur la question des responsables de l'attentat, d'où pourrait découler celle du génocide.

La délégation française doit rester une semaine sur place, procéder à des investigations et des expertises sur le site de l'attentat ainsi qu'à des auditions de témoins.

"On connaît la localisation des débris de l'avion sur l'aéroport, la trajectoire de l'avion, il sera donc peut-être possible de déterminer la position possible ou probable des tueurs, ce qui validera ou infirmera peut-être les témoignages", a-t-on expliqué de source judiciaire.

Marc Trévidic et Nathalie Poux ont repris le dossier après le départ en retraite de Jean-Louis Bruguière, précédent magistrat chargé de l'enquête.

Ce dernier retenait l'hypothèse d'une responsabilité du Front patriotique rwandais (FPR), dirigé par Paul Kagamé, un Tutsi. Le FPR a pris le pouvoir après le génocide.

Le juge Bruguière avait provoqué la rupture des relations diplomatiques entre Paris et Kigali en 2006 en lançant des mandats d'arrêt contre neuf proches de Paul Kagamé. Ces relations ont été rétablies en 2009.

TÉMOINS ET ÉLÉMENTS CONTESTÉS

L'analyse du juge Bruguière reposait notamment sur deux témoins clés de l'affaire, des réfugiés rwandais qui avaient alimenté dans un premier temps la thèse accusant le parti de Paul Kagamé. Ils disaient avoir fait partie du commando auteur de l'attentat, mais ont déclaré ensuite avoir menti.

Jean-Louis Bruguière estimait aussi que l'origine des missiles de fabrication russe ayant servi à l'attentat, et dont seules des photos ont été versées au dossier, menait forcément à l'Ouganda, base arrière du FPR avant 1994.

Les juges Trévidic et Poux souhaitent revoir ces éléments, notamment par un examen des lieux de l'attentat.

Il prévoient également l'audition des membres d'une commission d'enquête indépendante rwandaise, qui a conclu, en s'appuyant sur des expertises concernant le départ des tirs, à la responsabilité des Forces armées rwandaises (FAR), liées au pouvoir que combattait le parti de Paul Kagamé.

Les magistrats français devront ensuite trancher le sort des neuf personnes placées sous mandats d'arrêt. Une seule d'entre elles est mise en examen dans le dossier.

Arrêtée en Allemagne le 9 novembre 2008 puis extradée vers la France, Rose Kabuye, actuellement chef du protocole du président rwandais, a été mise en examen pour "complicité d'assassinats en relation avec une entreprise terroriste" et laissée en liberté sous contrôle judiciaire.

Les relations se sont réchauffées entre Paris et Kigali. En déplacement au Rwanda en février dernier, le président Nicolas Sarkozy a reconnu des "erreurs" de la France. Paris soutenait le régime Habyarimana, dont sont issus les génocidaires.

Thierry Lévêque, édité par Yves Clarisse