Coronavirus: depuis la fermeture des établissements scolaires, les élèves sont à l'école "de la débrouille"

Olivier Véran - BFMTV
Ils sont plus de 300.000 élèves à être privés d’école. De l’Oise à la Corse en passant par le Haut-Rhin et le Morbihan, les fermetures d'établissements scolaires liées à l'épidémie de coronavirus affectent les études des Français, de la maternelle au lycée. Pour assurer la continuité pédagogique, le ministère de l'Education a mis à disposition les ressources du Cned (Centre national d'enseignement à distance) avec la plateforme "Ma classe à la maison" qui permet de faire des exercices en ligne et de suivre des "classes virtuelles".
Un autre outil est également à disponibilité: l’ENT (Espaces numériques de travail), un intranet propre à chaque établissement du second degré, mais peu répandu dans le premier. Elèves et enseignants peuvent y échanger cours, exercices et messages. Et chacun tente tant bien que mal de s’adapter à ces méthodes d’apprentissage temporaires.
"Au début c’était le chaos"
"Pour le moment, je n'ai reçu dans l'ENT (espace numérique de travail) qu'un seul devoir en biologie. Je dois le rendre par mail à ma prof, qui va le corriger. J'attends d'autres cours, mais je n'ai encore rien reçu, les profs n'ont pas eu le temps", expliquait lundi matin à l'AFP Elisa, élève en première dans un lycée de Noyon, dans l’Oise, où 165.000 enfants et adolescents sont privés de cours pendant au moins deux semaines.
"Au début c’était le chaos", commente auprès de BFMTV.com Florence Claudepierre, présidente de la Fédération des conseils de parents d'élèves (FCPE) dans le Haut-Rhin, où 127.000 élèves sont concernés par les fermetures d’écoles.
"Depuis lundi, ça tâtonne un peu mais ça se met en place petit à petit, les parents d’élèves ont reçu des mails de la part des professeurs avec des devoirs, des indications sur les chapitres à réviser, d’autres ont eu des contacts téléphoniques", explique-t-elle.
Pour Rémy Sirvent, instituteur et secrétaire national du syndicat Unsa, ces modalités d’enseignement ne posent pas de problème majeur dans le secondaire. "On est habitué à travailler sur des supports numériques. C’est plus problématique en ce qui concerne les élèves de primaire car les enfants ont besoin d’un encadrement pour travailler sur ordinateur. Or les parents n’ont pas tous la possibilité de rester à la maison", explique-t-il à BFMTV.com.
"C’est un rythme à prendre"
"Cela nécessite un accompagnement qu’on ne peut pas demander aux familles car elles n’ont pas la même approche pédagogique que les profs, la patience ou la disponibilité. Or, on ne peut pas perdre 15 jours de classe. Il va donc falloir trouver d’autres solutions", prévient Florence Claudepierre.
Malgré les difficultés, la situation ne doit pas déboucher sur "le décrochage scolaire. Donc on essaye de trouver des astuces, c’est de la débrouille", réagit Michel Deniot, président départemental de la FCPE dans l’Oise. Père d’une petite fille de 10 ans en CM2, il a "la chance de pouvoir s’occuper des cours à distance. La maîtresse nous envoie des devoirs chaque jour par mail. On y consacre deux heures le matin, deux heures l’après-midi. C’est un rythme à prendre, un peu sur le modèle des devoirs à faire le soir à la maison après l’école", nous raconte-t-il.
Michel Deniot a également créé un compte sur la plateforme du Cned "Ma classe à la maison". Il y a découvert des "sujets de révisions" et des "cours de langues avec des supports audio. C’est une bonne surprise, les cours sont assez ludiques. Et ça permet aussi aux enfants de découvrir l’informatique, ça leur fait travailler d’autres compétences", dit-il, optimiste. Pour l’instant, ce président départemental de la FCPE n’a pas reçu de retour négatif de la pédagogie à distance dans l’Oise.
"On n’a pas remarqué de cas désespéré, ça a l’air de plutôt bien se passer", affirme-t-il.
Fracture numérique
Mais un écueil de taille subsiste et concerne les familles qui n’ont pas d’accès à Internet. "Cela creuse les inégalités avec les familles qui n’ont pas d’ordinateur ou d’imprimante. Comment peuvent-elles faire alors pour garantir à leurs enfants la continuité de leur scolarité?", observe Sophie Vénétitay, secrétaire générale du Syndicat national des enseignements de second degré (SNES), contactée par BFMTV.com. "Les parents peuvent toujours venir à l’école récupérer des polycopiés d’exercices", répond Michel Deniot. En effet, si les écoles sont fermées aux élèves, cela ne fait pas obstacle à la continuité de l’activité des établissements scolaires.
Le gouvernement précise d’ailleurs qu’il maintient "la tenue de réunions internes, y compris avec les professeurs, notamment pour organiser la continuité pédagogique, le suivi des élèves et les relations avec les responsables légaux des élèves".
Reste que ces méthodes de substitution "ne remplaceront jamais l’efficacité d’une classe d’école", commente Michel Deniot. "Il ne faut pas que ça dure trop longtemps, surtout pour les classes qui ont des examens en fin d'année, qui ne peuvent se permettre de prendre trop de retard", souligne à l’AFP Frédérique Rolet, co-secrétaire générale du SNES. Le ministère le concède: "Si les fermetures d'établissements sont amenées à durer, il faudra réfléchir à d'autres solutions."