Conférence contre la pauvreté : les principales mesures

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Un grand plan pluriannuel pour lutter contre la pauvreté. Lundi toute la journée, le gouvernement s’est réuni pour réfléchir à une série de mesures permettant d’endiguer la grande pauvreté et de faciliter la cohésion sociale. A l'issue de la rencontre mardi en fin de matinée, Jean-Marc Ayrault a assuré que son gouvernement « n'accepte pas et n'acceptera jamais ni le cynisme, ni la stigmatisation » devant la Conférence nationale contre la pauvreté et pour l'inclusion sociale. « La pauvreté n'est pas une fatalité, la précarité n'est pas un fléau qui s'abat au hasard sur une partie de la population. Ce n'est pas non plus une marque d'infamie ». Le Premier ministre a donc annoncé une série de mesures couvrant aussi bien la jeunesse que le logement ainsi que le surendettement ou encore les minimas sociaux, mesures qui devraient coûter, selon Jean-Marc Ayrault, de 2 à 2,5 milliards d'euros d'ici à 2017.
Une allocation de 450 euros par mois pour les jeunes
Le Premier ministre a ainsi annoncé la création d'une allocation d'environ 450 euros par mois destinée aux jeunes de 18 à 25 ans en difficulté d'insertion professionnelle mais engagés dans un parcours d'accompagnement vers l'emploi. Cette « garantie jeunes », qui sera lancée en septembre 2013 et s'appuiera sur le Civis (Contrat d'insertion dans la vie sociale), pourra concerner jusqu'à 100 000 jeunes par an, ni en emploi ni en formation et en situation de grande précarité. Le montant de l'allocation devrait être basée sur le RSA socle (en moyenne 450 euros par mois pour une personne seule sans emploi). Il s'agira en fait d'un « contrat d'un an renouvelable signé entre le jeune (...) et le service public de l'emploi », a ajouté le Premier ministre, précisant que le jeune « bénéficiera alors, pendant ses périodes d'inactivité d'une garantie de ressources d'un niveau équivalent au RSA » socle.
Une hausse du RSA de 10% sur 5 ans
Par ailleurs, le Premier ministre a dit souhaiter que le RSA socle (de 475 euros par mois, 415 pour celles vivant chez leurs parents) augmente de 10% d'ici 2017, en plus de l'indexation annuelle de l'inflation. La première hausse de 2% devrait intervenir en septembre 2013 afin que le RSA retourne au niveau du RMI au moment de sa création, c'est à dire 50% du SMIC. Les départements, qui versent le RSA, feront l'objet d'une « compensation intégrale ».
Par ailleurs, Jean-Marc Ayrault a annoncé pour le premier trimestre 2013 une réforme du RSA activité « qui n'a pas atteint ses objectifs » et de la prime pour l'emploi puisquils « ont le même objectif », s'engageant à « proposer cette réforme dès le premier trimestre 2013 ». Selon les chiffres officiels, près de 70% des bénéficiaires potentiels du RSA activité, créé en 2009, n'y ont pas recours. Des campagnes d'information seront donc lancées, et les procédures simplifiées.
8 000 places d'hébergement d'urgence supplémentaires
Autre mesure, 100 millions d'euros de plus pour le logement et l'hébergement des personnes démunies, répartis à égalité entre la création de places d’hébergement et des mesures d’aide à location. La première partie de l’argent devrait permettre d’ouvrir 4 000 places d'hébergement d'urgence pour les sans-abri et 4 000 pour les demandeurs d'asile, la seconde financera des mesures d'aide au logement. Il s'agira, selon le Premier ministre, d'un « effort complémentaire pour favoriser le logement durable et le retour au droit commun », avec des mesures destinées à « la prévention des expulsions, l'intermédiation locative, le logement adapté, l'accompagnement vers et dans le logement » ou encore une « garantie universelle des risques locatifs », une demande de longue date des associations d'aide aux mal-logés. L'intermédiation locative permet à des personnes défavorisées d'accéder à un logement via une association qui sert de garantie au bailleur.
Enfin, une réforme des modalités d'attribution des logements sociaux sera engagée.
Lundi, l'entourage de la ministre du Logement Cécile Duflot avait déjà précisé que 4 000 places d'hébergement d'urgence traditionnelles pour les SDF seraient pérennisées parmi les 19 000 places ouvertes temporairement pour la période hivernale, et que 4 000 places seraient créées en centres d'accueil pour demandeurs d'asile (Cada) alors que 1 000 places avaient déjà été annoncées précédemment par le gouvernement, ce qui porte à 9 000 au total le nombre de lits supplémentaires.
500 000 bénéficiaires de la CMU complémentaire de plus
Jean-Marc Ayrault a aussi annoncé une revalorisation du plafond de ressources pour bénéficier de la Couverture maladie universelle complémentaire (CMU-C), ce qui devrait permettre à davantage de personnes d'en profiter. 500 000 personnes de plus entreraient ainsi dans le dispositif, alors que le plafond est actuellement fixé à 7 934 euros par an. 4,3 millions de personnes en bénéficient pour le moment.
Un registre national des crédits aux particuliers
Pour prévenir le surendettement, Jean-Marc Ayrault a aussi dévoilé « la création d'un registre national des crédits aux particuliers, à l'occasion de la prochaine loi sur la consommation ». « La responsabilisation des banques sera désormais renforcée par la loi bancaire, qui intégrera des éléments relatifs au plafonnement des frais pour les publics fragiles », a-t-il précisé.
Ce répertoire, aussi appelé fichier positif, est un serpent de mer qui divise depuis des années au sein de la classe politique comme des associations. Il a fait l'objet d'un rapport rédigé par un comité de préfiguration, né en juillet 2010 dans la foulée du vote de la loi Lagarde sur le crédit à la consommation. Fin 2011, le précédent gouvernement avait repoussé son éventuelle création à après les élections présidentielle et législatives, après que la Commission nationale de l'informatique et des libertés (Cnil) eut émis des réserves sur le sujet, « au regard des libertés publiques ». En septembre, le ministre délégué à la Consommation, Benoît Hamon, avait indiqué qu'il n'était « pas très favorable » à ce fichier. Il avait souligné que les associations qu'il avait consultées, à l'exception d'une d'entre elles, n'y étaient pas favorables non plus. Plus récemment, fin novembre, il avait affirmé que le gouvernement réfléchissait à sa réalisation, alors que la loi sur la consommation qu'il prépare est attendue pour le printemps 2013. Les opposants à ce fichier l'attaquent principalement sur son coût et sur son efficacité pour lutter contre le surendettement, souvent lié à des accidents de la vie, imprévisibles.
Une « personnalité » pour assurer le plan pluriannuel
Ce plan reste maintenant « à finaliser, avant son adoption par le comité interministériel de lutte contre l'exclusion que je réunirai à cet effet le 22 janvier 2013 », a précisé le Premier ministre.
Il comportera en outre des mesures en faveur des « personnes placées sous main de justice », les « travailleurs sociaux », les femmes, les personnes âgées et handicapées ou encore les gens du voyage. Une « personnalité » sera désignée par le Premier ministre pour assurer le plan pluriannuel. Une « réflexion générale sur la politique familiale » sera aussi menée au premier trimestre 2013 pour aboutir à une « amélioration conséquente des aides aux familles monoparentales et nombreuses confrontées à la pauvreté ».