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Société

Cession d’entreprise : Hamon dans le collimateur des patrons

Les patrons devraient avertir leurs salariés deux mois à l'avance.

Les patrons devraient avertir leurs salariés deux mois à l'avance. - -

Benoît Hamon présente ce mercredi son projet de loi sur l’Economie sociale et solidaire et prévoit d’obliger les patrons de petites entreprises saines à prévenir les salariés en avance lorsqu’il veut la céder. Une façon pour ces derniers de faire leurs propositions, mais un handicap pour la transmission, estime le patronat.

Benoît Hamon fait peur aux petits patrons. Le projet de loi sur l'Economie sociale et solidaire est présenté ce mercredi en Conseil des ministres par le ministre de la Consommation et de l’Economie sociale et solidaire.
Parmi les 70 articles du dossier, une disposition en particulier provoque la fureur du patronat : elle instaure un « droit d'information » pour les salariés en cas de cession d'entreprise en bonne santé. Le texte prévoit d'exiger du chef d'entreprise de moins de 250 salariés qu'il les informe de son intention de vendre son entreprise deux mois avant toute transaction afin de leur laisser l’opportunité, s’ils le souhaitent, de se lancer dans la reprise de leur société, par exemple avec une Scop.

« Perturber le processus de transmission »

Mais le patronat ne l'entend pas de cette oreille. Il refuse cette obligation qui « créerait une incertitude de nature à perturber le processus de transmission », alerte la CGPME. Du côté du Medef, on parle d'un mécanisme qui « paralysera la cession pendant deux mois ». Pourtant, chaque année, entre 50 et 200000 emplois sont détruits en France, car des PME en bonne santé ferment faute de repreneur.

« On n’a pas besoin de loi »

Pour Bernard Péraud, boulanger-pâtissier à Enghien-les-bains en région parisienne, l’idée ne serait pas mauvaise… si elle ne venait pas compliquer les choses là où elles sont finalement simples. A 62 ans, il va céder son entreprise qui emploie 12 salariés dès la fin du mois d’août. « J’ai pris la décision, avec mon épouse, de céder l’entreprise, j’en ai informé mes salariés », témoigne-t-il. « C’est normal, on boit le café ensemble, on travaille ensemble, on échange. L’artisanat, ce n’est pas une multinationale où un directeur prend des décisions. Ça se passe de manière familiale, ça se fait automatiquement. On n’a pas besoin de loi, pas besoin d’alourdissement avec un texte qui nous pénaliserait et nous obligerait à faire des choses qu’on fait déjà ».

« On aurait pu se concerter »

Mais tout le monde n’a pas l’honnêteté de Bernard. Nadine, qui travaille depuis 30 ans dans une entreprise qui fabrique des peluches (les peluches Blanchet) à Saint-Marcel, dans l'Indre, a appris du jour au lendemain, il y a 6 ans, que son patron partait à la retraite. S'en sont suivis des mois d'incertitude, avant enfin, de trouver un repreneur. « Disons qu’on aurait été préparées » avec cette loi, pense Nadine. « On aurait pu se concerter avec certaines de nos collègues et reprendre la société. On n’aurait pas eu le coup par coup, quand on a su qu’on allait être licenciées, jusqu’au dernier jour, on n’était pas sûres. Personne ne voulait reprendre la suite de l’entreprise, on ne savait pas trop ce qu’on allait faire ».

Mathias Chaillot avec Juliette Droz