Aluisio, arrivé en France à 14 ans et menacé d'expulsion faute de pouvoir faire reconnaître son identité

Aluisio CUnda Quindai vient de fêter ses 18 ans. - Capture Facebook
Le week-end dernier, Aluisio Cunda Quindai fêtait, dans la joie, son 18e anniversaire avec ses deux familles d'accueil. Le jeune homme est né le 15 novembre 2015 en Angola, comme en atteste son acte de naissance. Un moment de bonheur vite effacé par la décision du tribunal administratif de Marseille qui a prononcé la semaine passée une obligation de quitter le territoire français (OQTF) à son encontre. Une situation ubuesque pour ses proches, tant le jeune homme est un modèle d'intégration.
"Aluisio ne va pas très bien, s'inquiète Hélène Nicolas, la mère d'une famille d'accueil. Il a pris un gros coup. Je crains pour sa santé."
Aluisio Cunda Quindai a quitté son pays natal d'Afrique de l'Ouest, l'Angola, en mai 2005. A cette époque, ses parents l'envoient en France pour le sauver d'une vendetta dans laquelle ont été tuée son frère et sa soeur. Afin de lui éviter une fin tragique, on fournit à l'adolescent de 14 ans un passeport au nom d'une personne majeure. Arrivé à Lyon, puis à Saint-Etienne, il devait être pris en charge par une connaissance de la famille, payée semble-t-il, mais l'enfant se retrouve seul.
Scolarisé au collège
Ses premiers ennuis avec l'administration et la justice vont alors débuter. De bonne foi, Aluisio Cunda Quindai se rend dans un commissariat. Présentant alors son acte de naissance datée du 15 novembre 2005, il est placé dans un foyer d'aide à l'enfance à Marseille, puis dans un autre près de Arles, où il est scolarisé en classe de 4e dans une section pour les étrangers. Mais un an après son arrivée en France, la police aux frontières, à la recherche d'un Domingo NGunza, du nom inscrit sur le passeport avec lequel est entré sur le territoire l'adolescent.
Placé en garde à vue, la justice le déclare majeur à la suite de tests osseux et prononce une première OQTF. On le condamne également à 49.000 euros d'amende et une peine de prison de deux mois avec sursis pour usurpation d'identité. Alertées par le Réseau éducation sans frontières (RESF), deux familles vont se mobiliser. Ces deux couples de professeurs vont l'accueillir et l'accompagner pour qu'Aluisio Cunda Quindai reste en France. "On a appris à l'aimer, à l'apprécier, on se considère comme sa famille", insiste Hélène Nicolas. Il faut dire que le jeune homme a réussi à s'intégrer.
Rencontre avec le ministre de l'Education
"Dès sa première année au collège, il a été récompensé pour ses résultats", note la professeure. Au fil des ans, Aluisio Cunda Quindai a appris à maîtriser parfaitement le Français. L'an dernier, il est élu délégué de classe, cette année, il est désigné par ses camarades pour représenter l'ensemble des élèves au conseil de discipline du collège. Ses notes sont brillantes. C'est d'ailleurs ce qui est inscrit sur ses bulletins scolaires. Croyant, l'adolescent s'implique également dans des oeuvres sociales et devient bénévole pour la Croix-Rouge. Le 5 novembre dernier, le ministre de l'Education nationale, Jean-Michel Blanquer, lui remet d'ailleurs en main propre un diplôme de premiers secours pour saluer son engagement.
Ce joli parcours, qu'Aluisio Cunda Quindai rêve de voir couronné par l'obtention du Bac, est pourtant lourdement ébranlé par un contrôle de police qui remonte au mois d'août dernier. "Aluisio aidait la mère d'une amie à déménager, quand des policiers l'ont contrôlé, raconte Hélène Nicolas. Ce contrôle n'avait rien à voir avec l'immigration clandestine mais il a été placé en centre de rétention." Mais le jeune homme, qui n'arrive pas à faire reconnaître son acte de naissance angolais, est toujours sous le coup d'une OQTF. Cette dernière est invalidée une première fois par la justice.
La préfecture des Bouches-du-Rhône doit revoir son dossier. Aluisio, soutenu par ses familles et le corps professoral, fourni une multitude de documents, prouvant sa bonne intégration et son parcours scolaire. L'administration fournit un document d'identité provisoire mais au nom du passeport utilisé pour entrer sur le territoire. La semaine dernière, la justice a une nouvelle fois tranché: Aluisio Cunda Quindai a fraudé l'Etat et n'a pas donné de preuves d'intégration.
Preuve de l'incohérence de la situation: l'ambassade d'Angola en France a conseillé au jeune homme d'accepter l'identité inscrite sur le passeport, afin de faire une demande d'asile. Problème, ce dernier est poursuivi par la justice pour d'autres faits. L'avocate d'Aluisio va porter un recours d'ici un délai d'un mois.