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À Mayotte, Emmanuel Macron attendu sur l'immigration clandestine

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Les Mahorais attendent des mesures fortes de la part du gouvernement afin d'endiguer l'immigration clandestine, importante sur cette île de l'océan Indien.

Ce mardi, Emmanuel Macron est en déplacement à Mayotte où il est notamment attendu de pied ferme sur la lutte contre l'immigration clandestine et le développement économique, avant de poursuivre son déplacement de quatre jours à La Réunion où un appel à la "grève générale" a été lancé.

A Mayotte, 48% des habitants sont des étrangers

Le chef de l'Etat, qui est arrivé aux alentours de 9h30 à l'aéroport de Dzaoudzi, en Petite terre, veut faire de sa visite sur le sol mahorais l'illustration du "deuxième pilier" de sa politique sur l'immigration : "la fermeté" (le premier pilier étant l'humanité), selon l'Elysée.

A peine descendu de l'avion, Emmanuel Macron a indique que sa volonté était de "passer en revue l'opération 'Shikandra' pour lutter contre l’immigration clandestine et illégale. Nous avons mis en place un dispositif civilo-militaire qui engage plusieurs forces de notre armée, mais aussi la police et la gendarmerie. Nous allons avec les ministres les passer en revue et vérifier leur efficacité. Leur objectif est de procéder à 25.000 retours de clandestins qui sont sur les îles."

Dans cet archipel de 374 km², devenu département français en 2011, 48% des 256.000 habitants sont des étrangers, dont 95% de Comoriens, selon l'Insee. Situé à 70 km de l'île comorienne d'Anjouan, Mayotte fait figure d'eldorado pour les Comoriens, qui tentent, souvent au péril de leur vie, la traversée. En juillet, le corps d'un enfant de 5 à 6 ans a été retrouvé sur les côtes, soulevant une vive émotion. 

250 embarcations interceptées en 2019

En plein milieu de l'océan Indien, BFMTV a pu embarquer avec une brigade nautique de la gendarmerie française faisant partie de l'opération "Shikandra", chargée de prévenir de l'arrivée des kwassas kwassas, ces embarcations de pêcheurs comoriens qui transportent des migrants clandestins. Depuis Mayotte, l'île d'Anjouan, la plus au sud des Comores, n'est qu'à 70 kilomètres des côtes françaises. 

Interrogé, Benjamin Dumont, de la Brigade nautique de la gendarmerie nationale, assure que leur rôle est "la mise en sécurité des personnes, qui sont sur des embarcations précaires, et les ramener à quai. "Là, il y a une étude de leur dossier, la préfecture décide de leur expulsion ou pas", explique de son côté Thierry Defer, chef d’équipage. En moyenne, l'expulsion prend 17 heures.

"Notre présence est dissuasive et efficace", reprend Benjamin Dumont. De fait, depuis le début de l'année, 250 embarcations ont été interceptées, soit une par jour.

Les Mahorais attendent plus 

Sur place, associations et collectifs de citoyens de l'île se mobilisent et attendent "des gestes forts(...), un vrai plan de lutte contre l'immigration clandestine, pas seulement de faire du chiffre en faisant des reconduites", explique Estelle Youssouffa, présidente d'un Collectif des citoyens de Mayotte, à l'origine du mouvement social qui avait paralysé l'île au printemps 2018, pour dénoncer notamment l'insécurité et l'immigration clandestine.

On attend par exemple que l'Etat mette fin aux permis de séjour spécifiques qui fixent la population comorienne à Mayotte" car ils ne donnent pas accès à la métropole, insiste la jeune femme. Et pour accentuer la pression, le collectif appelle "la population à porter du blanc en signe de protestation contre le traitement qui est fait à Mayotte".

A peine arrivé, le chef de l'Etat doit embarquer à bord d'un navire intercepteur de la police aux frontières, dont le rôle est d'empêcher les kwassas kwassas d'accoster sur le sol mahorais.

Cet intercepteur (qui emprunte le nom d'un poisson débonnaire qui mord quand on s'approche de son nid) fait partie de l'opération "Shikandra" contre l'immigration clandestine lancée en août à Mayotte. A son arrivée à Mamoudzou (chef lieu), Emmanuel Macron rencontrera les forces engagées dans cette opération civilo-militaire,avant de s'adresser à la population. 

"Piste longue"

"Shikandra" vise à atteindre 25.000 reconduites à la frontière fin 2019. Au 1er octobre, leur nombre s'établissait à 22.000, selon l'Elysée.

Toujours sur le même thème, le chef de l'Etat se rendra dans l'après-midi à Hamjago, dans la commune de M'tsamboro, au nord-ouest de Mayotte, là où débarquent massivement les Comoriens. C'est là, non loin d'un fief du Rassemblement national, M'tsahara, que le chef de l'Etat doit rencontrer la population et s'exprimer en fin de journée.

Auparavant Emmanuel Macron rencontrera les maires de Mayotte pour évoquer le développement économique du territoire et le "contrat de convergence", signé en juillet à Paris, qui prévoit 1,6 mds d'euros notamment pour la construction d'infrastructures scolaires et routières, l'accès à l'eau et à la Santé. 

L'économie au centre des discussions

Un montant nettement insuffisant selon le collectif de Citoyens et le député Mansour Kamardine (LR), qui réclament notamment plus d'efforts pour une égalité des prestations sociales avec celles de métropole (aujourd'hui inférieures de moitié) et une "piste longue pour l'aéroport", afin de désenclaver le territoire.

Cette "piste longue" est aussi réclamée par les pompiers de l'aéroport de Mayotte, qui ont annoncé qu'ils n'assureraient pas la sécurité à l'arrivée de l'avion présidentiel, marquant aussi leur solidarité envers leurs collègues de métropole, dont une récente manifestation à Paris s'est conclue par des heurts avec les forces de l'ordre. 

Hugo Septier avec AFP