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"Un résultat tout à fait fantastique": qu’est-ce que cette forme de vie découverte sur Mars et annoncée par la Nasa?

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Le mystère autour des prometteurs rochers martiens prélevés par le rover Perseverance reste entier. En dépit des annonces de la Nasa ce mercredi 10 septembre sur l'hypothèse d'une réaction biologique à l'origine des étranges tâches bleu et vert, il est indispensable de ramener sur Terre pour de plus amples recherches. Il pourrait s'agir d'une preuve de vie microbienne ancienne.

Avec un certain enthousiasme, la Nasa a annoncé ce mercredi 10 septembre lors d'une conférence de presse que les roches prélevées par le rover Perseverance en juillet 2024 pouvaient être "le signe le plus évident jamais trouvé", de vie sur Mars.

Pourtant le suspense reste entier. Dans l'article publié par l'équipe de scientifique chapeauté par l'Agence américaine dans la revue de référence Nature, les experts se montrent précautionneux.

Ils reconnaissent cependant l'intérêt évident de ces échantillons vieux de trois milliards d'années ramassés dans l'ancien delta d'un lac de la planète rouge. Les instruments de Perseverance ont notamment identifié deux minéraux, la vivianite et la greigite, qui donnent à l'échantillon cette forme mouchetée très particulière.

Des taches bleu et vert

"Cette roche s'est formée dans un environnement riche en eaux liquides. On a découvert des tâches et des nodules de l'ordre du millimètre un petit peu plus bleu et vert que l'environnement rouge habituel", décrit auprès de BFMTV Caroline Freissinet, chargée de recherche CNRS en sciences planétaires au Latmos, un laboratoire à Guyancourt (Yvelines). Elle n'a pas travaillé sur cette étude mais a déjà collaboré sur des travaux concernant Curiosity, l'autre véhicule d'exploration martienne.

"Les analyses avec les instruments à bord du rover Perseverance montrent que ces tâches sont moins oxydées que le reste de la roche", poursuit la chercheuse.

Deux hypothèses sont envisagées pour expliquer cette réaction. La première, la moins excitante, est qu'il s'agirait d'un phénomène purement géologique. "Une roche va pouvoir réduire des minéraux et créer ce genre de structure au contact d'une source de chaleur ou de matière organique", illustre-t-elle.

Les limites des outils de Perseverance

L'option qui encourage les scientifiques à y voir une forme de vie ancienne est celle du phénomène biologique. "Sur Terre, des structures similaires ont été trouvées avec ces minéraux. Nous savons que ces tâches se sont formées par des réactions chimiques qui font intervenir la vie dans des environnements où il y a de l'eau et du fer".

Par analogie, les chercheurs estiment que ces minéraux peuvent s'être formés sur Mars comme ils l'ont été sur Terre.

Depuis leur collecte, ces échantillons rocheux se trouvent à l'intérieur de Perseverance où ils ont subi une batterie de tests et d'analyses grâce aux divers outils embarqués au sein du rover qui s'était posé de manière spectaculaire sur Mars en février 2021. La publication de ces résultats témoigne aujourd'hui des limites atteintes par l'analyse sur Mars des roches. La communauté scientifique espère désormais de plus amples études sur Terre.

L'ombre de Donald Trump sur ces roches

"C'est vraiment un résultat tout à fait fantastique du point de vue de la compréhension du passé martien. Seulement, à bord de Persévérance, on a des instruments qui sont limités, il y a une charge utile instrumentale qui est ce qu'elle est, on ne peut pas faire toutes les analyses qu'on pourrait faire en laboratoire", explique Caroline Freissinet.

Impossible donc de trancher entre les deux hypothèse sans retour des échantillons martiens sur Terre. Or, Donald Trump a adopté des coupures budgétaires qui ont fait fondre les moyens de la Nasa pour financer ce programme notamment.

"Si le programme de retour d'échantillons martiens n'est pas maintenu, cet échantillon va rester à bord de persévérance avec ses mystères. Sans un support politique très fort, on va rester dans le flou. On saura qu'on a des formations mystérieuses à la surface de Mars qui ressemblent à des formations biologiques, à l'instar de ce qu'on trouve sur Terre, mais on pourra jamais savoir et déterminer si sur Mars elles sont d'origine géologique ou biologique", se désole-t-elle.

Florent Bascoul