Pourquoi il est toujours difficile de soigner efficacement les allergies aux pollens

Une femme se mouche en lien avec les allergies saisonnières au pollen - Philippe Huguen - AFP
L'arrivée du printemps, synonyme de retour des beaux jours, réjouit en général la majorité de la population. Mais pour une partie d'entre elle, cela signifie aussi retour des éternuements, des yeux larmoyant et du nez bouché en raison des allergies aux pollens.
Ces dernières touchent environ 30% de la population adulte en France et peuvent durer, pour certaines personnes, pendant une bonne partie des phases polléniques, d'avril à octobre en fonction du type de plante concernée. Pourtant, il n'existe pas à ce jour de remède miracle.
Pour tenter de soigner les allergies aux pollens, il faut dans un premier temps établir un diagnostic, souvent avec des tests cutanés avec des extraits de pollens, soit avec un dosage sanguin. Quand le diagnostic est fait, on peut alors chercher à traiter les allergies.
De nombreux allergiques prennent des antihistaminiques, avec ou sans ordonnance, pour atténuer leurs symptômes. Ces médicaments permettent de bloquer la production d'histamine, libérée par l'organisme lorsque le système immunitaire reconnaît un allergène et le considère comme une menace et donc responsable de symptômes de l'allergie.
Ces médicaments ont toutefois quelques effets secondaires "surtout au niveau de l'augmentation de l'appétit ou de la somnolence", prévient l'assurance maladie, qui recommande "de vérifier les précautions liées à leur utilisation par rapport à la conduite de véhicules ou de machines".
L'UFC-Que Choisir pointe également "la fatigue, les vertiges, les tremblements, la confusion, les troubles visuels et la prise de poids par augmentation de l'appétit".
Il existe également les corticoïdes, souvent en spray pour le nez, qui fonctionnent mais "l'effet est fugace et ils ont aussi plus d’effets indésirables, surtout si on en prend souvent: saignements de nez, excitation, insomnie, etc.".
Traitent uniquement les symptômes de l'allergie
"Les antihistaminiques marchent bien mais néanmoins pas assez pour les formes sévères", explique à BFMTV.com Pascal Demoly, pneumologue-allergologue au CHU de Montpellier et président de la Fédération française d'allergologie.
Les antihistaminiques ne fonctionnent toutefois qu'en cas de symptômes allergiques. Or, si la cause de ces symptômes est mal identifiée, notamment si le patient n'a pas effectué de test ou s'il pratique l'auto-médication, ils peuvent être d'une autre nature.
Par exemple, vous pouvez avoir un écoulement nasal ou des éternuements à cause d'un virus ou d'une exposition à une substance comme la fumée de cigarette ou un parfum et penser qu'il s'agit d'une allergie aux pollens. Les antihistaminiques seront ainsi inefficaces.
En outre, certains allergiques tendent à noter une diminution de l'efficacité des antihistaminiques avec le temps. "Il n'y a pas de forme d'accoutumance avec ces médicaments", répond Pascal Demoly, qui explique qu'il peut s'agir d'une "augmentation de l'inflammation" chez le patient. En effet, la sensibilité aux pollens peut évoluer au fil des années.
Les antihistaminiques et les corticoïdes restent néanmoins des "médicaments symptomatiques" qui soulagent, réduisent et bloquent les symptômes mais il ne s'agit pas de traitements curatifs qui soignent l'allergie. "Si le patient les arrête, ça revient rapidement comme avant", commente Pascal Demoly.
La désensibilisation, seul traitement de fond
C'est ici qu'intervient la désensibilisation, ou immunothérapie allergénique. Il s'agit là d'un traitement de fond visant à "réapprendre à tolérer les pollens", explique Pascal Demoly. La désensibilisation est le seul moyen de traiter une allergie au pollen sur le long terme.
"Cela consiste à mettre l'allergène en contact avec votre organisme régulièrement et à faible dose. Ainsi, le corps cessera de reconnaître l’allergène comme un ennemi" détaille l'institut Pasteur de Lille. Ici aussi, il est important de bien cibler l'allergie pour que le traitement soit efficace.
"Si la personne a cinquante allergies, ça peut être plus compliqué", concède Pascal Demoly.
S'il y a quelques contre-indications, en cas de maladie auto-immune, de cancer, d'asthme trop sévère ou de grossesse, les allergologues assurent que la désensibilisation fonctionne. "Il y a des effets dès la première saison", indique Pascal Demoly, qui souligne qu'au moins un quart des patients n'ont plus de symptômes après le traitement.
D'autres ont toujours quelques symptômes lors d'importantes séquences d'allergiques et continuent à prendre parfois des antihistaminiques.
Chaque cas est particulier
En outre, la désensibilisation peut prévenir l'apparition de l'asthme chez un patient allergique et éviter les exacerbations chez un asthmatique. "On est au-dessus des trois-quarts d'efficacité lorsque le traitement est bien pris", résume l'allergologue.
En effet, une désensibilisation dure au minimum trois ans, soit avec une prise quotidienne, en comprimés ou en gouttes, soit par cures réitérées de plusieurs mois. Selon Pascal Demoly, la première cause d'échec de ce traitement est le fait que les patients l'arrêtent avant le terme.
La difficulté de soigner les allergies au pollen réside dans le fait qu'il s'agit d'une médecine "individuelle" et "de précision". Chaque cas est particulier car chaque patient est allergique à différents pollens et d'intensité différente. De plus, la sensibilité peut varier d'une saison à l'autre.