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Santé

Les cas d'intoxication au gaz hilarant en forte hausse en 2020

Le protoxyde d'azote est un gaz utilisé notamment dans les siphons de cuisine. Image d'illustration

Le protoxyde d'azote est un gaz utilisé notamment dans les siphons de cuisine. Image d'illustration - AFP

Le protoxyde d'azote, souvent appelé "gaz hilarant" ou "proto", est un gaz de plus en plus utilisé de façon récréative par un jeune public. Dans un rapport, l'Anses alerte sur les risques de cette pratique.

Les cas d'intoxication au protoxyde d'azote, parfois appelé "gaz hilarant" ou "proto", ont largement augmenté en 2020, selon un rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) publié le 16 novembre. Pour arriver à ce constat, le document se base sur le nombre d'appels reçus par les centres antipoison (CAP) en lien avec l'inhalation de ce gaz: "entre le 1er janvier et le 31 décembre 2020, 134 cas ont été rapportés aux CAP, contre 46 en 2019 et 10 en 2017 et 2018 respectivement".

Cette hausse a eu lieu alors même que certains mois de confinement (mars, avril, mai, notamment) ont été marqués par une chute des appels. En mars 2020, aucun cas n'a été rapporté au CAP, par exemple. Et encore, les auteurs du rapport estiment que leur étude sous-estime l'ampleur du phénomène.

D'autres faits, plus anecdotiques, permettent également aux auteurs du rapport de conclure à une augmentation de la consommation récréative de ce gaz: il arrive de plus en plus souvent que le reliquat de gaz contenu dans les bonbonnes et les cartouches jetées provoque des explosions dans les fours dans les usines de traitement des déchets et d'incinération des ordures ménagères.

Le gaz vient majoritairement de cartouches pour crème chantilly

Depuis quelques années, certains utilisent ce gaz hilarant pour un usage récréatif et euphorisant. Ils inhalent ce gaz normalement utilisé dans des produits de consommation courante et notamment dans les cartouches pour siphon culinaire. Pour 50% des cas rapportés aux centres antipoison, le protoxyde d'azote venait de cartouches pour siphon à crème chantilly.

Le profil des utilisateurs a également été cerné par le rapport de l'Anses: il s'agit généralement d'hommes jeunes, dont l'âge médian est de 20 ans. Généralement, la consommation a lieu dans le domicile du consommateur ou dans celui d'un membre de son entourage. En 2020, les bars et les lieux festifs ont été épargnés, notamment à cause de leur longue fermeture liée au Covid et à la plus grande disponibilité du produit. Les deux régions les plus concernées par la consommation de ce gaz sont l'Ile-de-France et les Hauts-de-France (plus de 30 cas chacune sur 134 cas rapportés).

Risques de troubles neurologiques et neuromusculaires

Au-delà du simple constat sur l'augmentation de la consommation, l'Anses alerte sur les conséquences que cette pratique a sur la santé. Sur les 134 cas étudiés par les CAP, 126 sont des personnes qui ont présenté des symptômes à la suite de la consommation de "proto". "Au moins un symptôme neurologique et neuromusculaire était signalé pour 96 cas", écrivent les experts, qui en font la liste plus loin: "atteintes invalidantes de la sensibilité ou de la marche, troubles vésico-sphinctériens, nécessité d’une prise en charge en service de rééducation, persistance de troubles moteurs nécessitant une canne ou des béquilles malgré cette prise en charge."

Un quart des 134 cas souffraient également de nausées et de vomissements. Un autre quart faisait état d'anxiété et d'agitation. Plus rarement (7%), des symptômes respiratoires et cardio-vasculaires étaient signalés. Aucun décès n'a été rapporté, précise l'Anses.

Quatre cas ont également présenté un syndrome de manque: "ce syndrome de manque a rendu impossible l’arrêt de la consommation de protoxyde d’azote par ces patients à la sortie de l’hôpital et ce malgré la survenue de troubles neurologiques handicapants", est-il écrit dans le rapport.

Devant cette substance qui semble provoquer "des atteintes neurologiques graves et durables", l'Anses recommande de renforcer l'information et les alertes sur les risques encourus par la consommation de protoxyde d'azote. Depuis juin 2021, une loi interdit la vente de protoxyde d’azote aux mineurs dans les commerces et sur Internet.

Martin Fort