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J'ARRÊTE LE SUCRE #7 - Deuxième semaine: comment j'ai craqué (et je me suis reprise)

(Photo d'illustration)

(Photo d'illustration) - Joël Saget-AFP

J'ARRÊTE LE SUCRE #7 - Bilan de cette deuxième semaine sans sucre: j'ai craqué deux fois (une tranche de cake au citron et un tiramisu maison) mais je commence à m'habituer à la saveur du café sans sucre et je n'ai pas touché aux chocolats de Pâques.

>> Cet article est l'épisode 7 de notre série "J'arrête le sucre"

Ma deuxième semaine de désintoxication a mal commencé: j'ai craqué. Cela faisait plusieurs jours qu'une image de religieuse me trottait dans la tête. Et puis il y a eu un déjeuner un peu trop léger -une salade composée sans vinaigrette, ayant découvert in extremis qu'il y avait du sucre dans la sauce.

J'ai en effet décidé de ne plus consommer de sucres ajoutés, mis en cause dans le développement du diabète, de l'obésité et des maladies cardiovasculaires. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande pour sa part de réduire drastiquement la proportion de ces sucres, parfois cachés, qui se dissimulent dans notre alimentation. Selon l'OMS, cet apport ne doit pas dépasser 5% de la ration énergétique totale, soit quatre sucres. Mais il n'est pas pour autant question de supprimer les fruits, les céréales (complètes de préférence) ou les légumineuses, riches en glucides nécessaires à la vie et à notre corps.

Alors voilà, j'ai craqué sur une généreuse part de cake au citron (ou peut-être deux). Je dois avouer que cette première tranche de gâteau m'a paru exquise, sorte de madeleine des goûters et desserts que je ne m'accorde plus.

L'impression de croquer dans un morceau de sucre

Mais au cours de la deuxième part, j'ai eu comme une désagréable sensation proche de l'écœurement. Pas écœurée, mais pas loin. C'est bien la première fois qu'une tranche de cake me semble trop sucrée. Et puis là, comme la fugace impression de croquer dans un morceau de sucre. Pas franchement agréable. L'image de religieuse qui me poursuivait me quitte. C'est décidé, je me reprends en main. Plus question de fléchir pour une part de cake.

Au milieu de cette deuxième semaine, je me retrouve sur une aire d'autoroute à l'heure du dîner. Quasiment tous les produits contiennent du sucre ajouté. J'opte pour un sandwich tomate-mozzarella et croise les doigts pour que la sauce au pesto n'en contienne pas. Au rayon des desserts, je me tourne vers un immense pot de yaourt à la grecque nature (tous les autres sont sucrés, la belle excuse) et des fruits frais. Le yaourt à la grecque est une révélation. Mais il est surtout l'illustration d'un nouveau phénomène alimentaire: à défaut de sucre, je me tourne vers le gras.

J'ai rarement autant mangé de fromages. Au moment des courses, je compense allègrement sur les reblochon, tomme de Savoie, bûche de chèvre, brebis et comté. Impossible de m'en priver. En principe, notre alimentation doit se composer d'un tiers de lipides, c'est-à-dire de matières grasses, comme le rappelle l'Anses. De manière générale, les acides gras saturés -issus des produits animaliers comme le lait, le beurre ou la viande mais aussi l'huile de palme- sont moins bons pour la santé que les acides gras insaturés. Consommés en excès, Ils favorisent le mauvais cholestérol, mais aussi le risque de diabète et les maladies cardiovasculaires.

Pas plus de 15g de sucre pour 100g

Il est ainsi recommandé de privilégier les acides gras monoinsaturés (les oméga-9 contenus dans l'huile d'olive, de sésame, de noix, l'avocat et les arachides) excellents pour la santé cardiovasculaire, et les acides gras polyinsaturés (préférer en majorité les oméga-3 présents dans l'huile de colza, de lin, de soja, les noix et poissons gras et en minorité les oméga-6 que l'on retrouve dans la viande, les produits laitiers, les œufs, l'huile de maïs, de pépin de raisin et de tournesol).

Quant aux acides gras trans, issus d'un procédé d'hydrogénation afin de les rendre solides, ils sont tout bonnement à bannir. Ils se trouvent dans les produits transformés comme la margarine, les viennoiseries industrielles, les biscuits sucrés comme salés, les pâtes feuilletée ou brisée et dans de nombreux plats préparés.

Pour vous donner un repère, un plat comportant plus de 10% de lipides -c'est-à-dire 10 g de graisses pour 100 g de produit- est considéré comme trop gras, indique le programme national nutrition santé (PNNS). Quant au sucre, à partir de 15g pour 100g, le produit est à éviter. A contrario, s'il contient moins de 5g pour 100g, vous pouvez y aller.

Je flanche sur un tiramisu maison

Voici venu Pâques, avec sa cohorte de fritures, poules en chocolat et petits animaux pralinés. Cette année, il faudra s'en priver. Lors d'un déjeuner en famille, je les vois passer sans y toucher. À l'apéritif, je m'accorde un verre de jus d'orange pur jus et sans sucre ajouté.

Inutile de préciser que certains alcools sont particulièrement sucrés: quatre sucres pour un verre de vin liquoreux, près de deux morceaux pour une bolée de cidre doux (un seul s'il s'agit de brut) ou une bière, et tout autant pour du vin cuit. Vins blanc, rouge et Champagne (à boire avec modération bien entendu) sont quant à eux largement moins sucrés, tout comme les alcools forts comme le whisky, la vodka ou les eaux de vie. Du côté des biscuits apéritifs, je passe mon tour: quasiment tous contiennent du sucre.

En revanche, ma résolution de ne plus craquer cette semaine n'aura pas fait long feu. Je cède allègrement au moment du dessert et engloutis avec voracité le fameux tiramisu maison maternel, qui a tout de même été concocté dans une version allégée en sucre pour l'occasion. Inconcevable d'y résister. 

"Abaisser le seuil de sucre dans le cerveau"

Malgré ces coups de canif dans le contrat, j'ai tout de même l'impression inattendue que je commence à m'habituer à cette absence de sucre. Bizarrement, je me fais au café amer et une simple soupe de carottes me paraît trop sucrée. C'est bon signe. Frédéric Saldmann, médecin cardiologue et nutritionniste à l'hôpital européen Georges-Pompidou à Paris, m'en avait parlé.

"L'idée, c'est de modifier et d'abaisser le seuil de sucre dans le cerveau. Car il est conditionné: plus on mange de sucre, plus on en a envie. Mais si l'on se coupe du sucre, en trois semaines, vous vous reformatez."

Selon ce professionnel également auteur de Votre santé sans risque, le sucre agit de la même manière que la cocaïne sur notre unité centrale. "Il stimule la même zone, déclenchant un phénomène d'addiction, avec des conséquences graves sur la santé."

"Comme si des parents donnaient du cannabis à leurs enfants"

Ce n'est pas Serge Ahmed, directeur de recherches au CNRS à l'Université de Bordeaux, qui dira le contraire. Il a piloté en 2007 une étude sur le potentiel addictif du sucre chez le rat

"Certaines substances ont un potentiel addictif nul, comme l'eau. L'héroïne est la substance la plus addictive: entre 25 et 50% des personnes qui en consomment deviennent accros, indique-t-il à BFMTV. Dans le cas du sucre, tout le monde ne va pas devenir addict. Nous estimons que pour des personnes avec un indice de masse corporelle normal, entre 5 et 10% des individus développent une addiction alimentaire. Et lorsque l'on regarde dans le détail, la plupart des objets de ces addictions contiennent des sucres ajoutés. Chez les personnes en surpoids ou obèse, cette addiction est multipliée par trois ou quatre."

Selon lui, le potentiel addictif du sucre a été trop longtemps négligé. "Or, les industriels n'ont pas cessé d'en ajouter. Et on se retrouve dans une situation grotesque où la plupart des produits transformés contiennent du sucre. Les consommateurs ne le savent même pas." Pour Serge Ahmed, "c'est comme si des parents donnaient du cannabis à leurs enfants. Ils prennent de mauvaises habitudes alimentaires dès le plus jeune âge".

Les muffins de ma voisine et les éclairs caramel-beurre salé

C'est également le point de vue de Frédéric Saldmann. "Aujourd'hui, un enfant de 7 ans a consommé autant de sucre que son grand-père durant toute sa vie." Pas étonnant ainsi que des cas de diabètes de type 2 apparaissent avant même l'adolescence. Mais pour ce médecin, "il ne s'agit pas simplement de vivre plus longtemps, mais de vivre plus longtemps en bonne santé", ajoute Frédéric Saldmann. "Encore faut-il prendre sa santé en main. Et cela passe par l'alimentation."

D'accord. Mais bon, on ne va pas se mentir, les muffins de ma voisine de bureau me font toujours autant rêver et je n'ai pas arrêté, du jour au lendemain, de baver devant les éclairs caramel-beurre salé ou passion-framboise d'un pâtissier parisien difficile à oublier.
https://twitter.com/chussonnois Céline Hussonnois-Alaya Journaliste BFMTV