Grève des médecins libéraux: comment faire pour consulter en cas de besoin le 13 octobre?

Ils prédisent un "vendredi noir". Une intersyndicale de douze syndicats de médecins libéraux et étudiants a lancé un appel à la grève pour ce vendredi 13 octobre, afin de demander une revalorisation "conséquente" de la médecine de ville et une modification de la proposition de loi Valletoux, jugée trop contraignante par les médecins, entre autres.
"À partir du vendredi 13 octobre, la médecine libérale va s'arrêter pour donner un signal fort aux pouvoirs publics. Indiscutablement c'est un vendredi noir, et il sera reconductible", a déclaré Philippe Cuq, président du Bloc (syndicat des chirurgiens) et porte-parole de l'intersyndicale, lors d'une conférence de presse ce mardi.
"Toutes les activités de consultation, d'actes techniques, sont déprogrammées", a-t-il également dit. Selon une étude de la Drees, la direction des études du ministère de la Santé, en 2021, 56% des médecins en exercice ont une activité libérale. Que doivent faire les personnes qui, malgré cette grève, ont besoin de consulter un médecin hors du système public ce vendredi - et possiblement après?
"Transférer vers l'hôpital public"
En premier lieu, même si l'intersyndicale anticipe que de nombreux médecins libéraux vont suivre cette grève, il est recommandé d'appeler son médecin pour vérifier s'il pourra honorer son rendez-vous. S'il est en grève, la consigne de l'intersyndicale est de "transférer vers l'hôpital public", explique à BFMTV.com la présidente du Syndicat des médecins libéraux, Sophie Bauer.
"Notre but, c'est justement de montrer qu'on a du mal à faire sans nous", souligne la chirurgienne.
Concrètement, il sera recommandé de "composer le 15 en cas de besoin", où des médecins régulateurs pourront orienter le patient, selon Soline Guillaumin, porte-parole du collectif Médecins pour demain. À noter que les services d'urgences de nombreux hôpitaux sont également débordés: "trouver un médecin sera très compliqué", anticipe la médecin généraliste.
SOS Médecins également en grève?
Le docteur Guillaumin déconseille par ailleurs d'aller voir un pharmacien pour compenser l'absence de son médecin: "un médecin, il fait un diagnostic, il palpe le patient, l'examine et l'interroge. Le pharmacien ne palpe pas, n'examine pas et n'a pas été formé pour faire un diagnostic", développe-t-elle.
"Un nez qui coule, un mal de gorge, on peut penser que c'est une pharyngite, mais peut-être que c'est une thyroïdite par exemple", déclare-t-elle.
Il ne sera peut-être pas non plus aisé d'appeler SOS Médecins, dont certains praticiens pourraient aussi se mettre en grève, selon l'intersyndicale. Les modalités exactes de grèves seront dévoilées ce jeudi.
Une grève pour demander des "mesures politiques fortes"
Les futurs grévistes tiennent à faire comprendre que ce mode d'action est rendu nécessaire par la situation actuelle. "Faire grève, pour un médecin, ce n'est pas banal. Médecin, c'est une vocation et faire grève, c'est compliqué", appuie auprès de BFMTV.com Franck Devulder, président de la Confédération des syndicats médicaux français.
"Simplement, il faut que nos concitoyens entendent et comprennent que (...) si nous voulons un système de santé qui nous permette à tous d'avoir un médecin, il faut que des mesures politiques fortes soient prises", ajoute-t-il.
"On cotise selon ses moyens et on reçoit selon son réseau"
Selon une étude de la Drees de mars 2021, les effectifs de médecins devraient diminuer jusqu'en 2024, un "reflet des numerus clausus faibles des années 1990 et des cessations d’activité de générations nombreuses". Ces effectifs ne devraient retrouver leur niveau de 2021 qu'à "horizon 2030".
En parallèle, les effectifs de médecins libéraux tendent à décliner au profit des salariés. "Or, les médecins libéraux effectuent un nombre d’heures de consultation plus important que celui des médecins salariés" et "ils constituent la principale offre de soins de premier recours, et un maillon essentiel du parcours de soin des patients", explique vie-publique.fr, un site d'informations dépendant des services du Premier ministre.
"Ce qu'il va se passer à partir du 13 octobre, c'est ce que les patients risquent de vivre de manière quasi-quotidienne dans les années futures", alerte aussi Soline Guillaumin.
"Les principes de la sécurité sociale en France, c'est 'je cotise selon mes moyens et je reçois selon mes besoins'. Mais aujourd'hui, on cotise selon ses moyens et on reçoit selon son réseau, ses connaissances", déplore de son côté Franck Devulder, gastro-entérologue.
"On fait ça pour améliorer nos conditions de travail"
Les négociations conventionnelles avec l'Assurance maladie avaient été rompues l'an dernier, donnant lieu à un règlement arbitral, avec une revalorisation du tarif des consultations de seulement 1,50 euro par rapport aux précédents tarifs datant de 2017. "Il faut les moyens suffisants pour soutenir la médecine libérale", a souligné mardi le représentant de l'intersyndicale, Philippe Cuq, ajoutant que la nouvelle convention devra "redonner de l'attractivité au métier" auprès des jeunes, qui hésitent à s'installer selon lui.
"À un moment, il faut qu'on montre qu'il faut des moyens sur la médecine de ville", estime la chirurgienne Sophie Bauer, présidente du Syndicat des médecins libéraux.
"Ce n'est pas pour être riche, c'est pour pouvoir investir dans nos cabinets, on a besoin de certains équipements, de les agrandir", explique-t-elle. "On ne fait pas ça pour augmenter notre niveau de vie, on fait ça pour améliorer nos conditions de travail qui nous permet de mieux prendre en charge les patients".