Gers: des habitants privés d'eau courante depuis un an en raison d'un gaz cancérogène

L'eau du robinet est considérée comme impropre à la consommation depuis environ un an, dans plusieurs communes du Gers (photo d'illustration) - Anne-Chrisitine Poujoulat - AFP
Une situation qui perdure et agace les habitants. Dans le Gers, l'eau courante est interdite de consommation dans plusieurs communes en raison de la présence d'un gaz cancérogène, rapporte La Dépêche dimanche 1er septembre.
Selon le journal régional, qui suit le dossier depuis plusieurs mois, des habitants de plusieurs communes du Gers, dont Saint-Antonin et Sérempuy, constatent en août 2023 que l'eau du robinet a pris une couleur marron.
Si le phénomène ne dure pas, des dizaines de foyers situés à Saint-Augustin reçoivent quelque temps plus tard un courrier de la Saur, leur fournisseur d'eau, indiquant avoir détecté "une teneur (en chlorure de vinyle monomère) supérieure à la limite de qualité".
Il est fortement recommandé aux habitants de ne pas boire l'eau courante et de ne pas l'utiliser pour cuisiner sans avoir été bouilli. Aucune interdiction ne concerne en revanche l'utilisation de l'eau pour la toilette ou le lavage des aliments. Les restrictions s'étendent ensuite à plusieurs communes dans les semaines qui suivent.
Les canalisations en PVC pointées du doigt
En cause, la présence de chlorure de vinyle monomère (CVM) dans l'eau qui s'écoule du robinet. Le CVM est un produit chimique classé comme "agent cancérogène certain pour l'Homme" depuis 1987, selon le ministère de la Santé. Il peut être à l'origine de cancers du foie.
"La limite de qualité pour l’eau du robinet est fixée à 0,5 µg/L", selon cette même source. Or, selon la responsable de territoire pour la Saur Pauline Marsaleix, dans certaines communes testées, un "taux supérieur à 0,5 µg/L" a été détecté à l'été 2023.
"La présence de CVM dans l’eau du robinet peut résulter d’une pollution de la ressource en eau, principalement du fait de rejets d’industries du PVC", précise le ministère. Selon La Dépêche, dans le cas de ces communes du sud-ouest, la pollution provient des canalisations en PVC qui étaient monnaie courante, avant d'être interdites à partir des années 1980.
"Pas du ressort" de l'ARS
Les semaines s'écoulent et la colère monte dans la région. En novembre 2023, une réunion publique est organisée à Saint-Antonin pour répondre aux questions des habitants.
La vice-présidente du département Céline Salles assure vouloir travailler "collectivement" pour "trouver des solutions", alors que des tests doivent être effectués plusieurs fois par an par la Saur.
Interpellée, l'Agence régionale de santé du Gers assure de son côté que "le changement des conduits n'est pas de son ressort, mais bien de celui des syndicats et des élus".
Des distributions d'eau en bouteille
Pour lutter contre cette pollution, des purges sont menées, mais ne suffisent pas. Les habitants de plusieurs communes sont donc contraints d'utiliser uniquement de l'eau en bouteille.
Et "cela fait plus d'un an que la situation est la même", dénonce le maire de Sérempuy, Serge Diana, auprès de La Dépêche.
Dans son village d'une trentaine d'habitants, des bouteilles d'eau sont distribuées par la Saur toutes les semaines.
À Bars, village situé à une soixantaine de kilomètres plus au sud, le maire Régis Balech déplore "ne pas avoir eu d'informations particulières sur la qualité de l'eau ces derniers mois".
Ses habitants sont donc toujours contraints de se rendre dans une commune à proximité pour trouver un robinet avec une eau potable ou de boire uniquement de l'eau en bouteille. L'élu indique au quotidien régional que des travaux ont été lancés début juillet pour changer une partie du réseau de canalisations.
Un coût trop élevé pour un syndicat local
Le syndicat intercommunal de l'eau Sideau confirme de son côté que l'eau est toujours considérée comme impropre à la consommation dans la région. Environ 240 personnes sont concernées dans son réseau.
Le directeur du Sideau, Xavier Husson, tempère cependant l'inquiétude, rappelant que toutes les études menées sur le sujet ont été faites en milieu professionnel. De fait, "l’exposition aux CVM par la consommation d’eau du robinet est faible et aucun lien certain n’a été établi à ce jour entre les cas d’angiosarcome et d’hépatocarcinome et la consommation de l’eau du robinet", indique le ministère de la Santé.
Pour autant, des travaux sont bien en cours. Selon Xavier Husson, "89 km" de canalisations sur 700 km "ont été identifiés comme problématiques". Si une partie sera changée, la totalité du réseau ne pourra pas être modifiée pour des raisons financières. "Il faudrait 10 millions d'euros, c'est impossible pour un petit syndicat", justifie-t-il. Le réseau Sideau dit malgré tout espérer un retour à la normale d'ici fin septembre pour les habitants.