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Fécondation in vitro: les problèmes de fertilité transmis de père en fils?

Dès qu’il y a des problèmes notables de sperme, une FIV dite ICSI (pour intra cytoplasmic sperm injection) est préférée à la FIV classique.

Dès qu’il y a des problèmes notables de sperme, une FIV dite ICSI (pour intra cytoplasmic sperm injection) est préférée à la FIV classique. - iStock - gpointstudio

L'injection intracytoplasmique de spermatozoïdes est utilisée chez les hommes qui présentent des problèmes pour concevoir un enfant. Des chercheurs viennent de découvrir que les fils nés de cette procédure présentent eux-aussi les mêmes caractéristiques d'une fertilité faible: une moins bonne quantité et qualité du sperme.

Les couples qui rencontrent des problèmes pour concevoir un enfant peuvent avoir recours à une fécondation in vitro (FIV), et plus particulièrement via une injection intracytoplasmique de spermatozoïdes en cas de stérilité masculine (ICSI). Cette technique consiste à choisir un spermatozoïde et à l'injecter dans l'ovocyte, à un endroit précis, au moyen d'une microinjection pour induire la fécondation.

Cette procédure est notamment destinée aux hommes qui ont très peu de spermatozoïdes viables et le premier bébé né de cette façon remonte à l'année 1992. Mais les scientifiques spécialisés dans ce domaine craignaient que les problèmes qui ont causé l'infertilité des pères ayant eu recours à cette procédure, généralement d'origine génétique, ne se retrouvent aussi chez leur fils.

Jusqu'à présent, les questions sur la fertilité de cette première génération de descendances demeuraient sans réponse, en raison du jeune âge des hommes nés de cette façon. Une étude menée par des chercheurs de l'université d'Oxford sur les hommes les plus âgés conçus par ICSI dans le monde entier vient pour la première fois confirmer ces doutes.

Une concentration de sperme moins importante que la normale

Les résultats ont en effet révélé que ces garçons présentent eux aussi les caractéristiques d'un sperme avec facultés affaiblies. L'étude a été réalisée à Bruxelles entre 2013 et 2016. Sur un total de 215 hommes nés via une injection intracytoplasmique de spermatozoïdes, 54 ont accepté d'y participer. Ces derniers ont été jumelés avec un groupe d'hommes du même âge qui ont été conçus naturellement.

On leur a demandé de fournir un échantillon de sperme et un échantillon de sang pour une analyse et des tests génétiques ont été effectués, dans le but de connaître leur concentration de sperme. Après un ajustement des facteurs de risque (âge, poids, période d'abstinence), les conclusions montrent que les hommes "ICSI" présentaient une concentration de sperme deux fois moins importante. 

Autre caractéristique, ils présentaient un nombre total de spermatozoïdes mobiles deux fois plus faible par rapport aux hommes du même âge conçus naturellement. Par ailleurs, ces derniers étaient trois fois plus susceptibles d'avoir des concentrations de sperme en dessous des 15 millions par millilitre de sperme, un seuil considéré comme "normal" par l'Organisation Mondiale de la Santé.

L'ICSI est-elle trop utilisée?

"Ces résultats ne sont pas surprenants, a déclaré le Pr Van Steirteghem, pionnier de la procédure et coauteur de l'étude. Avant que l'ICSI ne soit effectuée, les futurs parents ont été informés qu'il se pourrait bien que le sperme de leur fils puisse être altéré comme celui de leur père. Mais pour eux, ce ne fut pas une raison de reculer car ils se sont tous dit: si cela se produit, l'ICSI peut aussi être une solution pour nos fils".

Cependant, les chercheurs ont constaté que la concentration de sperme de ces hommes n'est pas forcément aussi basse ou d'aussi moins bonne qualité que celle relevée chez leur père.

"Il est bien établi que les facteurs génétiques jouent un rôle dans l'infertilité masculine, mais de nombreux autres facteurs peuvent également intervenir. De plus, la corrélation n'est pas la même chose que le lien de causalité", précise le Pr Professeur Van Steirteghem.

Les chercheurs invitent à poursuivre les travaux sur un plus grand nombre de participants et avertissent que leurs résultats ne peuvent être extrapolée à tous les descendants. Car l'ICSI est de plus en plus utilisée dans le cadre de la FIV, même quand il n'y a aucune preuve que l'infertilité d'un couple est causée par un sperme anormal chez l'homme.

Alexandra Bresson