"De la désinvolture": pourquoi Macron veut s'attaquer aux rendez-vous médicaux manqués

"Ce n'est pas possible". Lors de ses vœux aux soignants au Centre hospitalier Sud Francilien de Corbeil-Essonnes, lors desquels il a présenté son plan pour le système de santé, Emmanuel Macron a évoqué vendredi la "désinvolture" de ceux qui n'honorent pas leurs rendez-vous médicaux et "gaspillent" du temps médical.
"Notre système, à force de lever toutes les barrières de l'accès au soin - ce qui est une bonne chose, que nous garderons - a parfois déresponsabilisé beaucoup de nos compatriotes", a déclaré le chef de l'État.
"Comme la santé n'a plus de prix, pour beaucoup de nos compatriotes elle n'a plus de valeur", a-t-il déploré, ajoutant que "trop de temps médical est gaspillé par un excès d'imprévoyance, de la désinvolture, avec en particulier des rendez-vous non honorés".
Le président a ainsi annoncé qu'"un travail sera engagé avec l'Assurance maladie pour responsabiliser les patients" et "supprimer cette perte sèche de temps médical".
Une "problématique majeure" pour les médecins
Ce constat n'est pas nouveau. En juin 2022, le rapport de la Mission flash sur les urgences et les soins non programmés recommandait déjà de "réfléchir aux moyens de lutter résolument contre les rendez-vous non honorés par une responsabilisation du patient" afin de "redonner du temps de soins aux soignants (en ville)".
L'Union régionale des professionnels de santé (URPS) d'Île-de-France, qui représente les médecins libéraux de la région, a mené une enquête en juillet afin de chiffrer le phénomène des rendez-vous non honorés. Les 2000 médecins libéraux franciliens interrogés ont déclaré en moyenne connaître deux rendez-vous non honorés par jour "et des pics pouvant aller jusqu’à 5", selon l'URPS.
"Un médecin sur deux considère que cette tendance est plutôt à la hausse et qu’elle se concentre majoritairement sur des nouveaux patients" et "pour 79% des répondants, les rendez-vous non honorés représentent une problématique majeure dans leur organisation quotidienne", ajoute l'association sur son site.
Un phénomène important à l'hôpital aussi
À l'échelle de la France, un rendez-vous non honoré par jour par médecin représente 27 millions de consultations annuelles, selon l'URPS.
Interrogé sur ce chiffre en septembre sur Franceinfo, le ministre de la Santé, François Braun, rapportait que le phénomène n'était pas cantonné à la médecine de ville: "à l'hôpital, c'est pareil. On a aussi des consultations qui ne viennent pas". Il s'est dit résolu à "résoudre ce problème des 'non-venu-pas prévenu'".
Selon le ministre, un empêchement de dernière minute peut justifier l'annulation d'un rendez-vous médical, mais il est "inadmissible" de ne pas prévenir le spécialiste concerné. "Pendant ce temps-là, le médecin pourrait prendre quelqu'un d'autre!", a déploré François Braun.
Quelles solutions?
Lors de l'enquête de l'URPS, les médecins ont notamment suggéré de mettre en place le prépaiement ou une liste rouge des patients n'honorant pas leurs rendez-vous. De son côté, l'association demandait en juillet "une campagne nationale d’information sur l’accès aux soins" pour "sensibiliser les usagers".
Elle revendiquait aussi de nouvelles fonctionnalités sur les plateformes telles que Doctolib, comme "la systématisation des SMS de rappel de RDV 24 heures en amont" et l'"impossibilité de prendre deux RDV simultanés dans la même spécialité sans avoir au préalable annulé sa première réservation".
Autre solution évoquée par plusieurs acteurs, comme le syndicat de médecins libéraux UFML: une "pénalité financière" en cas de rendez-vous non honoré. Une option que n'exclut pas le ministre de la Santé, comme il l'expliquait en septembre sur Franceinfo:
"Il n'y a pas de tabou. Est-ce que c'est en les facturant, en trouvant une autre solution...", a-t-il déclaré. "Tout est sur la table, je n'aurai jamais de tabous dans les discussions".
L'objectif? "Éviter qu'on prenne trois rendez-vous en même temps chez le même spécialiste et qu'on aille piocher ensuite", a continué François Braun, qui entend faire participer les plateformes de prise de rendez-vous en ligne aux discussions.