BFMTV
Santé

Coronavirus: les fumeurs moins touchés par le Covid-19?

La nicotine pourrait avoir un effet contre le coronavirus, des études sont encours pour valider cette théorie

La nicotine pourrait avoir un effet contre le coronavirus, des études sont encours pour valider cette théorie - AFP

Plusieurs études notent le faible taux de fumeurs parmi les malades du coronavirus, laissant penser que la nicotine pourrait par exemple avoir un effet contre le Covid-19. Mais trop peu de données sont encore disponibles sur le sujet et les chercheurs appellent à la prudence concernant cette théorie.

Fumer pourrait-il protéger du coronavirus? Les médecins et scientifiques avancent chaque jour dans la connaissance du nouveau coronavirus, découvrant peu à peu ses effets sur différentes parties de la population. Le faible taux de malades parmi les fumeurs, relevé par des études américaines et chinoises, intrigue la communauté scientifique.

"On a quelque-chose de très particulier avec le tabac. On a constaté que l'immense majorité des cas graves ne sont pas des fumeurs, comme si (...) le tabac protégeait contre ce virus, via la nicotine", a déclaré la semaine dernière le directeur du comité scientifique contre le Covid-19 Jean-François Delfraissy.

Cette information semble contre-intuitive, alors que la cigarette est depuis de nombreuses années pointée du doigt pour ses effets nocifs sur la santé. Le Comité national contre le tabagisme fin mars avait d'ailleurs alerté les fumeurs: "Fumer altère les défenses immunitaires et les capacités pulmonaires, et d’autre part, les fumeurs portent régulièrement leurs doigts potentiellement porteurs de virus à la bouche, porte d’entrée fréquente du virus".

Un faible taux de fumeurs parmi les malades

Des données chinoises et américaines ont toutefois relevé un faible taux de fumeurs parmi les malades du Covid-19, comparé au taux de fumeurs habituel dans ces pays.

Ainsi, dans une étude américaine concernant plus de 7000 personnes atteintes du Covid-19, seulement 1,3% sont des fumeurs, soit dix fois moins que le taux de fumeurs de cigarettes en 2018 aux Etats-Unis, précise Bertrand Dautzenberg, ancien pneumologue et président de Paris Sans Tabac, contacté par BFMTV.com. Selon des études chinoises, seulement 12,6% des malades étaient fumeurs, un taux cinq fois moins élevé qu'attendu.

Mais ces chiffres restent pour le moment au stade d'observations intrigantes, "on attend la publication de données exactes", tempère Bertrand Dautzenberg, "est-ce que c'est la fumée, est-ce que c'est la nicotine? On ne sait pas pour le moment, plusieurs études sont en cours pour tenter d'expliquer le phénomène".

"Il faut rester très prudent parce que pour l'instant (...) Il n'y a que quelques études chinoises et quelques études américaines", déclare également sur FranceInfo Marion Adler médecin tabacologue à l'hôpital Antoine Béclère de Clamart (Hauts-de-Seine).

"Le tabac ne sera pas une solution contre le Covid-19"

Quels que soient les résultats de ces études, l'ancien pneumologue précise tout de suite que "le tabac ne sera pas une solution contre le Covid-19, ce serait traiter sa pneumonie à la kalachnikov. La cigarette il faut toujours arrêter, fumer ne sera jamais positif".

De plus si les fumeurs semblent moins touchés pour le moment, ceux qui sont atteints développeraient des formes plus graves de la maladie. "Le tabac serait un facteur plus à risque vis à vis des formes sévères de Covid-19" expliquait début avril sur BFMTV Frédéric Le Guillou, président de l'association Santé Respiratoire France. "Ce tabagisme serait responsable d'une augmentation de sévérité de plus de 50% par rapport à des non-fumeurs".

Selon une étude parue fin mars dans la revue médicale américaine New England Journal of Medecine, la plupart des patients atteints de formes sévères du Covid-19 présentaient les facteurs de gravité suivants: diabète, hypertension, maladie cardiovasculaire, et tabagisme.

La nicotine pourrait avoir un rôle

Une théorie s'intéresse pour le moment à l'effet protecteur que pourrait avoir la nicotine. Dans notre organisme, le récepteur ACE2 sert de porte d'entrée au coronavirus, et "on sait que la nicotine joue un rôle sur la régulation de ce système", explique Bertrand Dautzenberg. "Il y a quelque chose, mais on ne sait pas quoi", car ce fonctionnement reste plein d'inconnues.

L'ancien pneumologue prévient dans le même temps qu'il s'agit là d'une simple théorie, et qu'il ne faut surtout pas se jeter sur des substances nicotiniques car rien n'est encore prouvé dans cette théorie. "Il n'y a aucun début d'argument pour commencer à prendre de la nicotine" toxique chez les non-fumeurs, assène-t-il.

Des études sont également en cours concernant les vapoteurs, qui eux aussi inhalent de la nicotine.

Salomé Vincendon