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"C'est scandaleux": qu'est-ce que Sniffy, cette poudre blanche à inhaler par le nez vendue en bureaux de tabac?

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Ce produit composé uniquement de produits légaux promet des effets énergisants. Mais son administration par inhalation fait vivement réagir les professionnels de santé et les buralistes qui s'opposent à sa commercialisation.

C'est une poudre blanche vendue au gramme qui se consomme par le nez à l'aide d'une paille et promet des effets énergisants. Il ne s'agit pas de cocaïne, mais de Sniffy, un produit légal vendu depuis quelques jours dans des bureaux de tabac français et sur internet.

"Une poudre blanche qu'on inhale par le nez? Bien que cela puisse évoquer le plaisir interdit, c'est totalement conforme à la loi", assure la marque sur son site internet.

Le produit, disponible en cinq saveurs pour moins de 15 euros, "booste l'énergie instantanément" pendant "20 à 30 minutes", notamment grâce à la présence de caféine, de créatine et de taurine dans ses ingrédients. La marque justifie la consommation par inhalation par la "rapidité" de ses effets.

"C'est totalement scandaleux"

Mais la ressemblance de son administration avec celle de la cocaïne fait vivement réagir certains professionnels de santé, comme Amine Benyamina, psychiatre-addictologue et président de la Fédération fançaise d'addictologie qui appelle à son interdiction par les pouvoirs publics "dès ce week-end".

"Ce qui me choque, c'est l'intention derrière ce produit. Vous vendez un produit sous forme de poudre blanche avec une pipette, l'intention est très claire, c'est de rappeler la consommation de la cocaïne, c'est une outrance de marketing, ils ont osé et ont réussi à le placer chez les buralistes ou ailleurs, ce qui me semble totalement scandaleux" dénonce-t-il sur BFMTV.

Le psychiatre addictologue rappelle aussi que l'addiction ne se résume pas à la consommation du produit mais est aussi liée aux "effets du produit et à l'intention qu'on donne à ces produits".

Ce produit ressemblant "de manière complète, totale et sans ambiguité" à la cocaïne a, selon lui, vocation à "d'une manière ou d'une autre" amener les consommateurs à consommer "un produit qui n'est pas toxique au sens de ses composants mais qu'il l'est par le message qu'il véhicule".

"Il n'y a pas que le geste, c'est le geste et tout le pensif inconscient autour du produit qui est sous forme de poudre avec une pipette qui est l'équivalent de la gestuelle et du rituel de la cocaine, c'est encore plus pernicieux qu'on ne peut l'imaginer".

Les buralistes dénoncent "l'amalgame" du produit

Un avis partagé par Elina Dumont, ancienne toxicomane et présidente des Oubliés de la République, qui craint que des dealers se servent de Sniffy pour tromper des consommateurs et les rendre addicts à des stupéfiants.

Le produit n'a pas été facile à trouver en bureaux de tabac par BFMTV. Et pour cause, le produit étant récent, il n'est pas encore distribué partout. Mais certains buralistes ont aussi indiqué avoir été dévalisés depuis sa commercialisation, quand d'autres ont confié ne pas avoir envie de le proposer à leurs clients.

La Confédération nationale des buralistes, qui représente les 23.000 commerçants du territoire, s'oppose d'ailleurs "fermement" à sa commercialisation. "Nous avons une éthique, nous avons une morale, ce produit fait l'amalgame ou un parallèle avec un produit stupéfiant, il est pour moi impensable que le réseau puisse commercialiser ce produit", martèle Philippe Coy, président de l'organisation à notre antenne.

Les pouvoirs publics alertés depuis "plusieurs semaines"

Il indique avoir "alerté les pouvoirs public il y a plusieurs semaines" pour demander son interdiction.

"Ce produit n'est pas illicite par sa composition mais c'est plutôt sa façon de le consommer qui choque et perturbe", explique Philippe Coy, qui dénonce aussi sa promotion sur les réseaux sociaux par des influenceurs.

Interrogé par 20 minutes, le fabriquant de Sniffy, qui est un spécialiste marseillais du CBD selon le journal, s'attendait à ce que la comparaison de son produit avec la cocaïne "vienne sur le tapis". S'il reconnaît que "ça peut choquer les gens", il se défend de toute incitation à la consommation de produits illicites. Le produit est interdit aux moins de 18 ans et déconseillé aux femmes enceintes et aux personnes cardiaques.

Julie Roeser, Emilie Roussey